Je retombe sur ceci, ...
... au moment où reparaissent en format "poche" (chez Cairn) mes Bonheurs de l'aube.
Merci à son auteur(e), Rita des Roziers.
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... au moment où reparaissent en format "poche" (chez Cairn) mes Bonheurs de l'aube.
Merci à son auteur(e), Rita des Roziers.
Ce fut une première dans tous les sens du terme. Pour tout le monde. Enfin, nous six. Le rugbyman que l'on ne présente plus Pierre Berbizier qui lut de larges extraits de Sur la route de Jack Kerouac, un livre qui accompagne sa vie depuis ses quinze ans, le journaliste de L'Équipe et auteur de nombreux livres sur l'Ovalie Richard Escot (à l'origine de ce montage foutraque et sans presque aucune préparation), au piano pour rythmer les lectures - y compris celles du regretté Michel Sitjar, flanker international d'Agen-même, poète à seize heures et des poussières..., Jean-Michel Agest, ancien joueur de la Section Paloise et poète du rugby, Benoît Jeantet, poète, blogueur, scénariste, fin connaisseur du rugby et coauteur de pas mal de choses avec "Ritchie" Escot, Eric des Garets, ancien joueur amateur, passionné de littérature et lui même auteur de textes fins sur le motif, et enfin ma pomme, Candide de l'Ovale avide d'émotions procurées par les stades. Nous devions lire tour à tour des textes de notre cru (je lus les extraits aux accents rugbystiques de mon Bruissement du monde), sauf Berbizier donc. Sur une vraie scène de théâtre (à l'espace Felix Arnaudin) avec projecteurs, micros, tout le toutim et un public aficionado devant nous. Et nous nous sommes bien marrés durant 1 h 45 samedi dernier 21 mai en soirée... Photos (de la ville de St-Paul-lès-Dax, où se déroula le pestacle qui s'inscrivait dans le week-end Le Grand Maul - lire plus bas -, dont le talentueux directeur artistique est Jean-Claude Barens). L.M.
De gauche à droite, ci-dessus : Eric des Garets, Pierre Berbizier, Léon Mazzella, Richard Escot, Jean-Michel Agest et Benoît Jeantet à l'issue de la représentation.
Dernières images : table ovale en long (cherchez la ronde...), dans l'après-midi sur le thème : Les rugbymen peuvent-ils (encore) devenir des personnages de roman ? Avec, en plus des précités, Serge Collinet, formateur d'entraineurs de rugbymen à Paris et auteur de Rugby au coeur, et Jean Colombier, ancien rugbyman briviste et Prix Renaudot 1990 pour Les Frères Romance (Richard Escot ayant le rôle de modérateur depuis la salle, où se trouvaient notamment Pierre Albaladejo qui nous raconta comment il passa une nuit avec Hemingway durant les fêtes de Pampelune, et Jean-Louis Bérot, célèbre demi de mêlée de l'U.S.D. des années 80). Enfin, la scène et la salle peu avant l'entrée du public.
Cliquez là => LE BRUISSEMENT DU MONDE
Le choix de la première chronique littéraire de l’année s’apparente à la cueillette des champignons, dans un sous-bois, à l’automne, quand la feuille morte rythme le pas, quand l’incertitude guide la main du critique. La pluie grise les sentiments, la nature protège et isole; le critique hésite, il tâtonne, il se rétracte parfois, puis il se lance, il a enfin trouvé le livre qui correspond à son souffle intérieur, à son émotion du moment, à sa volonté de ne pas ensorceler le monde. En 2021, l’esprit ne sera ni à la querelle incestueuse, ni à la légèreté béate, plutôt à la beauté qui s’efface peu à peu, elle s’échappe, nous le sentons charnellement, et pourtant, il faut la retenir, s’incliner une dernière fois devant elle, la remercier encore et toujours. Se rappeler que sans elle, nous sommes des êtres désarticulés, surnuméraires fantômes. Cette beauté fugace n’est pas grandiloquente, elle ne bombe pas le torse, elle ne nous fait pas du gringue au coin d’une rue ou à la lecture d’un paragraphe trop étincelant; discrète, elle sait tenir ses distances.
Elle s’apprivoise difficilement. L’écrivain Léon Mazzella, styliste des terres basques, grand spécialiste du vin, part à sa recherche dans Le Bruissement du monde aux éditions Passiflore. Il est de ces explorateurs esthètes qui ne surjouent pas la surprise ou l’émerveillement. Ce gracquien sème la chronique au vent, sans charger sa phrase d’un affect débordant, elle garde sa pureté originelle tout en susurrant son pouvoir d’abstraction. Là, réside le charme vivifiant de ce recueil buissonnier qui promène son bonheur de vivre entre fragments, souvenirs d’enfance, nostalgie du cœur, sens de la transmission et plaisir du palais. Mazzella nous touche car, avouons-le, il caresse notre vieux monde, il cajole notre désenchantement, il ouvre la volière de notre mémoire. Ne vous méprenez pas sur son dessein, il ne panthéonise pas le passé, ce n’est pas un embaumeur, plutôt un exhausteur de goût. Son toucher de plume lifte l’existence, lui donne du rebond. Nous avons les mêmes codes d’entrée, les mêmes marottes, les Renault Floride et les chevauchées landaises de Christine de Rivoyre
Avec ce compagnon hussard, on se rappelle d’un texte lu à l’adolescence qui a fait chavirer notre suffisance, on se met alors à dessiner des volutes de Havane dans le ciel laiteux de la province française, à rêver aux seins obuesques de Silvana Mangano dans « Riz amer » ou à la bouche désirable de l’impénétrable Monica Vitti. À nous extraire simplement de notre quotidien par le talent des autres, voilà un résumé de ce que fut notre jeunesse. Pour nous, garçons ahuris, bouffis de caractères d’imprimerie et de cinéphilie, la réalité passe souvent par le tamis de la fiction. Mazzella est un merveilleux brouilleur de météo, il détraque toutes les horloges. Avec lui, la chronologie s’émancipe des dates. On le suit avec gourmandise dans cette belle littérature, giboyeuse et sauvage des Trente Glorieuses puis, le texte suivant, il nous ramène au présent, dans le spectacle chantant d’une bergeronnette grise ou la pesanteur ensoleillée d’un champ de maïs. Tantôt mélodiste d’antan, tantôt aquarelliste du paysage en mouvement, sa mélancolie sous-jacente n’est ancrée dans aucun port d’attache. Elle est libre, elle se moque des convenances, elle cabote sur des côtes intimes. C’est pourquoi nous prenons autant de plaisir à le lire, surtout quand il écrit: « Je suis Claude Sautet » ou qu’il fait l’éloge du stylo à plume: « Bonheur de retrouver le glissement de l’encre, sa fluidité, et le crissement sur le papier vergé ivoire, cette teinte bleu nuit qui forme les lettres, les mots qui naissent, le mouvement du poignet, le sang qui afflue sur la dernière phalange de l’index comme si nous labourions ». Mazzella sait, par instinct, qu’un bon livre ne ressemble pas à une autoroute rectiligne, il doit cahoter, ne jamais utiliser le même instrument de musique, de la variété naît l’harmonie. Mazzella ose passer de Gracq au Bricomarché, sublime impertinence et poésie de l’infiniment petit, de Calet à Anouk Aimée, de Larbaud à une libellule indisciplinée, de Gómez de la Serna au croquant du chipiron. Vive 2021 !
Le Bruissement du monde de Léon Mazzella – éditions Passiflore.
Elle niche dans l’une des granges et sort tard, la nuit. Mais je veille encore, tire sur un cigare ou pas, contemple les étoiles, écoute les froissements, les chuintements, les cris, le silence ; le temps. Alors, depuis le faîte, elle ouvre ses ailes vers minuit, et se lance, décrit une courbe, tombe bas, rase le sol, évite joliment le mirabellier, puis remonte très vite et me frôle la tête, ou peu s’en faut. Cela fait déjà deux fois. Deux soirs de suite. Signe. Par son vol d’intimidation caractéristique, cette chouette effraie me signifie que je suis moins chez moi qu’elle n’est chez elle. Qu’elle entend bien rester ici, en posant ses conditions. C’est elle la patronne. J’obtempère mais elle ne le sait pas. J’aime. L.M.
Le décapiter et retrouver aussitôt le fruité fort, le Sauvage, ce sous-bois des sensations comme on le dit d’un scent de bécasse sous le flair d’un setter bien créancé et statufié tout à trac. Un côté fumier aussi, mais point entêtant ni désagréable : on ne hâte pas le pas, on le ralentirait plutôt afin d’en savourer les flaveurs mâles et primitives, et de fourrure aussi mais qui possède un certain vécu, un usé rassis pelé patiné soyeux. Montecristo Open Master. Robusto robuste. Sa dégustation à cru. La meilleure. Les narines absorbantes collées contre sa tête qui exhale, enfin libérée, tant de cèpe d'octobre, de mûre de septembre écrasée par inadvertance, de primevère de décembre foulée sous la botte et dont la semelle se souviendra tout le jour, de blouson de cuir pour la moto, de cheval en sueur, de chien dans la voiture, de sauvagine, de draps dans la cabane au bout d’une semaine de bivouac. Que voulez-vous, les habanos sont ainsi lorsqu’ils sont bien... nez. Minute, je l’allume. La suite appartient aux murmures, aux yeux fermés, aux pensées, au baroque - Jordi Savall et ses fougueuses Follias de España, à une aube ici - dans les barthes de l'Adour sans doute, un crépuscule là - à La Barbade peut-être, aux sensations furtives un peu partout, un éclair dû à un subtil trait d'esprit lancé par un ami comme une ligne pour le bar, disséminées par notre oublieuse mémoire tout à coup rassemblée, au rapport comme pour prendre son quart. Passerelle. L.M.
Alliances : Rhum Mount Gay XO pour boire, Le fusil de chasse, de Yasushi Inoué pour lire (à voix haute, façon gueuloir de Flaubert). Le reste pour voir. Plus clair, à n'en pas douter, sur la carte brouillée de nos sentiments dans la salle dédiée. Compas. Sextant. Étoile Polaire. E la nave va.