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Tauromachie

  • Petit éloge amoureux...

    Voici ce que mon éditeur publie ce matin sur son compte Instagram :

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  • Petit éloge amoureux du Pays basque

    Capture d’écran 2023-01-13 à 12.18.18.pngIl est certes trop tôt pour évoquer cela, mais puisque les sites marchands proposent de le pré-commander, je vous montre les "prière d'insérer" de l'éditeur de mon prochain livre, trouvés ce matin sur les sites divers comme la fnac, amazon, Babelio (ce dernier donne un texte plus touchant, mais les deux sont signés de mon éditeur chez Privat, Christian Authier). Patience jusqu'au 27 avril, jour de sortie de mon (très subjectif) Petit éloge amoureux du Pays basque.

    Capture d’écran 2023-01-04 à 11.52.30.pngCapture d’écran 2023-01-04 à 10.45.24.png

  • Françoise Bourdin, Sang et or

    IMG_8094.jpegIMG_8097.jpegNoël 2022 au fin fond du Périgord pourpre en compagnie de ma fille, de son bébé d’un mois et demi et de la famille de son compagnon, le père de Sael Áodhán. Nous sommes treize autour de la cheminée que j’alimente en chêne sec. J’apprends la mort de Françoise Bourdin et je me souviens. Rapidement, je parcours la dépêche reproduite un peu partout, à peine modifiée, sur cet auteur « populaire » qui a vendu plus de quinze millions de livres en cinquante romans issus de sagas familiales comme les lecteurs de Christian Signol, de Claude Michelet... et de Françoise Bourdin les aiment. Pas besoin d’un papier dans Le Monde des Livres ou Le Figaro littéraire - lesquels les boudent en se pinçant le nez - pour propulser ces sous-marins de l’édition qui, sans aucun bruit, en font beaucoup dans les chaumières, loin des bobolands circonscrits à quelques arrondissements germanopratins. Je me souviens... Je copilotais le service des manuscrits de La Table ronde avec Stéphane Guibourgé (que devient-il ?) deux jours par semaine (je vivais encore à Bordeaux), tour à tour rue du Bac, rue Huysmans, rue Corneille... Autrement dit, j’ouvrais le sac postal quotidien en toile de jute beige, j’en extrayais le monceau de tapuscrits, je les flairais tous avec une technique « pro » précise, et, un matin de l’année 1990, je suis tombé sur l’un d’eux, mince, intitulé « Sang et or » (était-ce le titre originel ou bien celui que je trouvai au moment des épreuves corrigées ?) d’une certaine Françoise Bourdin qui n’avait publié jusque là que deux romans chez Julliard, « De Vagues herbes jaunes » en 1974, et « Les Soleils mouillés » en 1975. Rien d'autre depuis quinze années. Je me souviens m’être assis par terre, entouré de piles de tapuscrits sous papier kraft comme un soldat de sacs de sable, et avoir lu d’un trait ce texte dont l’action dure quelques minutes au cours desquelles un jeune torero gravement encorné est transporté à l’infirmerie de l’arène où il est en train de toréer, et l’instant de son expiration. Entre temps, sa vie défile, Bourdin la raconte, et c’est poignant, tendre et tragique, solaire et mélancolique. J’alerte aussitôt mon pote et néanmoins président des éditions Denis Tillinac par téléphone (absent, il surfait alors en Chiraquie). On a reçu un manuscrit fascinant d'une presque inconnue, il faut que tu le lises. Bloque, appelle-là, et tu lui proposes un contrat. Mais, Denis, tu ne veux pas le lire avant ? Pas le temps, j’ai confiance, vas-y. J’appelle Françoise Bourdin. Elle me dit que Actes Sud lui a déjà donné une réponse positive. Je lui coupe quasiment la parole en lui disant que je m’en fiche. Où êtes-vous ? À la Feria de Nîmes justement, pour voir des toros. J’adore. J’arrive. (J’y retournerai en septembre de la même année, à la Feria des Vendanges, pour assister à la prise d’alternative de Jesulín de Ubrique). Je pris un contrat pré rempli comme un constat d’accident au 40, rue du Bac, et un train à la gare Montparnasse. Nous nous retrouvâmes dans les salons de l’hôtel Imperator, et elle signa le contrat tandis que je sifflais manzanilla sur manzanilla La Gitana. Nous publiâmes son troisième roman en mai 1991. Une peinture de Fernando Botero, « Muerte de Luis Chalmeta » orne en vignette la couverture. J’en conçus une certaine fierté lorsque, plusieurs années après, Françoise Bourdin devint l’un des écrivains les plus lus de France, le (ou la ?) cinquième je crois. Je l’ai croisée à plusieurs reprises lorsque je fus éditeur chez Editis entre 2002 et 2006, au sein de Place des éditeurs, dont ma boutique, fitway publishing faisait partie. Mes bureaux étaient voisins de palier de ceux de Belfond, son éditeur historique. Nous prîmes quelques verres lors de salons du livre à Paris et à Francfort je crois aussi, et puis en bas des éditions, avenue d’Italie dans le XIIIe. Elle était timide, frêle, mais son regard était doux et droit, d’acier tendre. La force du jockey sous une apparence cristalline. Elle se souvenait en riant de moi déboulant à Nîmes... Je confesse n’être pas lecteur de ses romans, de cette littérature que l’on dit populaire, mais ni par aversion ni par snobisme. Seulement parce qu’elle ne me « parle » pas, comme par ailleurs la science-fiction, la fantasy, le polar (à de très rares exceptions près), le développement personnel, l'ésotérisme, la B.D. figurent des genres qui me sont étrangers – et je m’en réjouis d’une certaine manière, car cela fait ça en moins à découvrir, lors que je sais, hélas, que je n’aurais pas assez de quarantedouze vies pour avoir le temps long et calme de lire tout ce que j’envisage de lire de poésie, de romans, de philosophie, d’essais... Je confesse n’avoir pas lu une ligne de Françoise Bourdin après « Sang et or », et je me souviens le lui avoir dit, et qu’elle me répondit par un grand éclat de rire, et qu’elle me fit déposer, la délicate, une pile de Pocket choisis de ses romans, mais que je distribuais – sans éprouver le moindre sentiment d’ingratitude, cependant -, à des amies de passage chez moi (car j’ai le sentiment que le public de sa littérature est essentiellement féminin), lors de dîners à mon domicile parisien qui s’achevaient invariablement par une répartition de livres empilés devant la porte – condition expresse établie : nul ne sortira d’ici sans plusieurs livres en mains. « Sang et or » donc, que je viens de retrouver dans le long rayon de ma bibliothèque réservé à la tauromachie littéraire. Je ne sais pas si j’ai envie de le reprendre, tant ma « desafición » est devenue grande. Peut-être, oui, quand même, en souvenir de la confiance de Denis, pour l’effervescence nîmoise de ce jour-là, pour l’émotion singulière, pour la pluie qui tombe soudain sur Bayonne ce 29 décembre 2022 après-midi, et ma moto qui se mouille avec le casque et les gants sur la selle. Pour les livres. Je vais appeler ma fille, tiens, et prendre des nouvelles du petit. L.M.

  • Lectures de ces derniers jours

    Capture d’écran 2021-03-27 à 15.17.01.pngIl y eut, douloureusement, le roman posthume de Denis Tillinac, Le Patio bleu (Les Presses de la Cité). Sa page de faux-titre sans dédicace – et pour cause, résonna longtemps comme le timbre éraillé de sa voix, « Comment tu vas!.. ». Il y a tout là-dedans, il y a beaucoup dans cet épais roman riche d’images percutantes et de phrases aussi tendres qu’assassines parfois, et si justes, si fortes. Il s’y trouve une maturité de romancier impeccablement ramassée, une intrigue tillinacienne totale, la province gersoise, Condom – d’Artagnan n’est pas loin -, des Rastignac femelles, le désir d’en découdre avec une bourgeoise a priori rangée, les intrigues de ministère comme il y en eut de cour, les coups bas ou fourrés, l’amitié triomphale, les non-dits et les ouï-dire, la tendresse des paysages d’une France encore profonde dans tous les sens du terme, une mélancolie viscérale et bougonne par crainte de paraître trop délicate, des traits d’une justesse dans le mille à faire pâlir le La Bruyère des Caractères. Une ambiance IVe République, avec un Chirac en culottes courtes, une atmosphère « rad-soc » qui eut cours dans les campagnes qu’un jacobinisme arrogant ignorait, de Bellême (Perche) à Tulle (Corrèze), en passant par Condom, donc. Un air de Claude Sautet à la caméra plane sur ce dernier opus de Denis, et l’on se souvient tout à trac de son regard de saurien lorsque le silence se faisait parfois, qu’il suspendait sa cigarette (moment rare), et que nous l’entendions nous dire tant de choses dans le virage du rien. Salut l’ami.

    Capture d’écran 2021-03-27 à 15.34.47.pngIl y eut la somme de chroniques d’Éric Neuhoff parues dans Le Figaro, sous le titre Sur le vif (Le Rocher), évoqué brièvement ici il y a peu, pour nous offrir le plaisir de relire les phrases brèves et toniques, à la Nimier, le style félin et claquant de son héritier spirituel. Qu’il évoque Biarritz, Brigitte Bardot, Los Angeles, Françoise Sagan, la Fontaine de Trévi, Frédéric Berthet, Cadaqués, Stallone comme Mastroianni, le Toulouse de Christian Authier ou encore l’une de ses idoles, Frank Sinatra, Dieppe ou Truman Capote, Le Ritz ou Michel Déon, Neuhoff délivre ses denses déclarations d’amour comme on ne délivre plus des compressions de César, car lui le fait avec tact et sensibilité, intelligence et style. Un pur bonheur.

    Capture d’écran 2021-03-27 à 15.19.13.pngCapture d’écran 2021-03-27 à 15.19.45.pngEt, comme le hasard n’existe pas, il y eut deux compilations fraternelles quasiment au même moment à l’étal des librairies : d'un côté, les romans corréziens de « Tilli » chez Omnibus, Le Bonheur en Corrèze, qui rassemble en un épais pavé huit de ses romans essentiels, et de l’autre, trois romans indispensables de Neuhoff réunis par Albin Michel, Les romans d’avant.

     

    Capture d’écran 2021-03-27 à 15.21.31.pngIl y eut le premier roman d’Olivier Mony, Ceux qui n’avait pas trouvé place (Grasset) retardé pour cause de pandémie, enfin entre nos mains (nous l’achetâmes le jour de sa parution), un bref roman modianesque en diable – tant qu’on croirait entendre la voix de Patrick le Nobel le dicter, avec des personnages foutraques, soit attachants (Serge, bien sûr, Elkoubi, etc, et puis Piètre, et d’autres), un Bordeaux lisse et troussé en connaisseur, et au fond un livre comme un tapis volant sur lequel nous sommes priés gentiment d’embarquer, ce que nous avons fait gaiement.

     

    Il y eut cette belle surprise stylistique, Capture d’écran 2021-03-27 à 15.25.49.png rugueuse et âpre, si vraie « avé l’accent » médocain, ces très courtes nouvelles qui circonscrivent des personnages forts, durs, à la Franck Bouysse, des scènes d’un quotidien que peu connaissent, sauvage, reculé, essentiel car forestier, chasseur, braconnier, rude, d’une vérité crue à côté de laquelle steak tartare et carpaccio passent pour des carnes cuites. Presqu’îles, de Yan Lespoux (Agullo) est un livre précieux comme un premier roman de Sylvie Germain ou de Jean Carrière. Un beau cèpe cru dans ce beau voisinage gionesque-là...

     

    Capture d’écran 2021-03-27 à 15.27.00.pngCapture d’écran 2021-03-27 à 15.27.39.pngIl y eut l’annonce du Printemps des poètes, avec pour thème Le Désir, loué par Sophie Nauleau chez Actes Sud (nous attendons l’ouvrage), et des phares ici et là pour éclairer la route du mot qui émeut plus qu’un coup de foudre. André Velter, compagnon de la précitée, livre Séduire l’Univers, précédé de À contre-peur, illustré de « tracés sonores » de Jean Schwarz (le premier), et de quatre « ciels » de Marie-Dominique Kessler (le second). Il s’agit de l’un de ces livres composés à plusieurs mains, dont Velter a l’habitude, et qui produisent un dialogue en fruition, une poésie non pas amalgamée, mais épousée, risquons un mot : « puzzle-isée », c’est l’agudeza de Baltasar Gracián invoquée par l’auteur, autrement dit l’acuité ingénieuse, dont il est ici question. « Par-delà l’espace et le temps », dit l’auteur, « il est des affinités électives, ou ce que Julien Gracq appelait des consanguinités d’esprit, qui ne peuvent durablement rester sans résurgence. »

    Ainsi, par ailleurs, cet ouvrage de plus en collaboration : André Velter avec Ernest Pignon-Ernest (nous avons évoqué ici même les précédents), nommé Sur un nuage de terre ferme (Actes Sud) et où il est question de tauromachie, mots et dessins mêlés, plus précisément de José Tomás à Grenade le 22 juin 2019. Faena mystique entre toutes. La grâce transcendée en textes et en traits, le vertige, un certain duende, l’émotion qui frissonne durablement ; un torero « sur un nuage de terre ferme ». Soit une chanson de geste d'un singulier maestro qui, lorsqu’il se rend aux arènes, laisse son corps à l’hôtel (dixit Francis Marmande). Le sable et l’indicible, en somme.

     

    Capture d’écran 2021-03-27 à 15.28.47.pngIl y eût la somme infiniment précieuse, l’anthologie personnelle de l’immense Charles Juliet que propose Poésie/Gallimard, Pour plus de lumière, 1990-2012. L’essentiel, choisi donc par l’auteur lui-même (à l’instar de Commune présence, de Char, et de L’encre serait de l’ombre, de Jaccottet), d’une poésie placée sous le signe d’une « ardente recherche de la lumière » (et je m’autorise à reproduire ici, avec ces quelques mots, un extrait de la dédicace que l’auteur a rédigée sur mon exemplaire). Nous y retrouvons les recueils majeurs comme Affûts, Ce pays du silence, Moisson... Des trésors réunis en un seul recueil lourd et compact, que l’on a envie de trimbaler chaque week-end, où que l’on aille.

     

    Il y eut, dans la même collection fétiche, Poésie/Gallimard, une « compil »Capture d’écran 2021-03-27 à 15.30.04.png (bilingue) d’Erri de Luca, Aller simple, suivi de L’hôte impénitent, où l’on retrouve l’auteur limpide d’œuvre sur l’eau. Poésie presque parlée, comme récitée à l’église le matin, morale par endroits, humble toujours, où la barque et le filet du pêcheur, ses quelques prises, ont la grâce du simple recueillant avec reconnaissance ce qui lui suffit. Demi-surprise : Aller simple évoque l’épopée tragique des migrants échouant tant bien que mal sur les côtes italiennes, ou la poésie devient politique, militante, mais avant tout humaniste avec une remarquable sobriété qui rappelle les récits de Primo Levi. Cependant, les poèmes qui composent L'hôte impénitent nous font retrouver le De Luca romancier devenu alpiniste mystique, et toujours sensuel, dont les épaules porteront toujours les traces salées de la Méditerranée, du côté de l'île d'Ischia...

    Capture d’écran 2021-03-27 à 15.31.10.pngCapture d’écran 2021-03-27 à 15.33.37.pngEnfin, il y eut, juste après la disparition du très grand Philippe Jaccottet, deux inédits, Le dernier livre de Madrigaux, et La Clarté Notre-Dame (Gallimard), pour nous rappeler à l’essentiel, soit au chant fragile des oiseaux à l’aube dans un verger de peu planté de longue date à Grignan, dans la Drôme, l’écho d’une cloche des Vêpres à Salernes (où vécut sur le tard le regretté Pierre Moinot), « dans l’enceinte sacrée, très-haut » (Hölderlin), des mots simples comme de ces brindilles dont Char rêvait de bâtir un rempart, des mots tragiques à peine d’un poète avouant son grand âge et citant Hölderlin encore comme on lance un grappin, « Énigme, ce qui sourd pur ». Des textes essentiels et crépusculaires, et néanmoins heureux, surtout lorsqu’il s’agit d’évoquer Claudio Monteverdi, « c’est par urgence que sa voix prend feu ».  « Ainsi lié, je me délivre de l’hiver »... Jaccottet a rejoint, à 95 ans, « le tissu bleu du ciel ». Et nous continuerons d’entretenir commerce quotidien avec son œuvre capitale. L.M.

  • Loin, derrière (ou devant, c'est boomerang pareil)

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    Et tout à trac (ne me demandez pas pourquoi puisque je l'ignore), je pense à Roger Couderc (Allez les petits, ce soir les Poules ont du pain sur la planche...), à Pierre Salviac, à Bala (Pierre Albaladejo, le Dacquois magnifique, avé le D de drop, si souvent je t'ai serré la pogne aux corridax...), à ces années Blondin, ces années Cormier, ces années Dutournier (Alain, en contra barrera), ces années de pur-sang, de rire, de gouaille, de magrets entiers, d'amitié, de transmission, de passages de ballons et de bons mots, de traits d'esprit et de pastis liquides et solides, d'absence de peur ; et de laisser-braire 24/24... Chaque soir, j'avais le sentiment de rentrer dîner chez Kléber et de demander à Caroline ce qu'elle nous avait préparé à manger, l'été finissait sous les tilleuls, oui, pourtant je rentrais a casa à Bayonne, tranquilou, et maman était encore de ce monde; et nous avions un seul mot en horreur : Adios. L.M.

  • Chez Gracq et à propos de Marie-Thérèse Prat

    Souvenir, souvenirs...

    Tribune parue dans Libération il y a treize ans jour pour jour, soit le 3 janvier 2008 => Mes journées chez Julien Gracq

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    ©Alain Collet

    Inédit...

    Et, à propos de Partnership (le lirons-nous un jour, à partir de 2027 ?.. Et lirons-nous également Port-Amen, roman inachevé de Michel Déon, disparu il y a tout juste trois ans), premier texte littéraire de J.G. écrit à l'âge de 21 ans (en 1931) et signé Louis Poirier, ce témoignage => Partnership paru en novembre dernier sur le site littéraire En attendant Nadeau, sous la plume de Christine Marzelière, évoquant la possible destinataire et sujet de ce roman inédit d'un amour contrarié ...  Bonus => Le manuscrit et de courts extraits

     

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    ©Raphaël Gaillarde

     

  • Daguin

    Je suis en train de faire mariner un lièvre, les mains dans le sang, l’ail, l’échalote, l’armagnac, et dans le tannat aussi, lorsque j’apprends qu’Alexandre est passé de l’autre côté. Je ne l’appelais pas André à cause de Dumas, auquel il me faisait penser, et parce que la première fois que je lui ai tiré le portrait, c’était pour et dans Gault-Millau, et j’avais titré mon papier « Alexandre Daguin ». Ça l’avait fait bien marrer, le Cadet, le Mousquetaire. Nous nous sommes vus parfois. À Auch, à la radio pour des enregistrements des Grandes Gueules auxquels il me convia, à Paris pour des raouts de promo gastro à la con, et je regrette de n’avoir jamais partagé un seul repas avec Son Altesse André Daguin (comme client à sa table, pour une soupe de châtaignes, une brochette de chevreuil, un magret de palombe - et oui -, c'était différent  : nous étions assis, tout petit, et il était très grand, tout blanc). Une autre fois, dans quelle gazette je ne sais plus, je titrais à son sujet : « Commissaire Magret ». Fastoche, avec le recul. Chouïa décalé, dans les années 80.

    ¡ Suerte, là-haut, sacré Gascon d’altitude !

    Ci-dessous, un chapitre sur lui et son fils Arnaud, paru dans mon livre « Le Sud-Ouest vu par Léon Mazzella » (Hugo & Cie, pp.120-125) =>

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  • Que c'est bon de reprendre Ramón!

    IMG_20190810_135004_resized_20190810_015102457.jpgGrâce soit à nouveau rendue à Valery Larbaud d’avoir découvert Ramón Gomez de la Serna en 1917 pour le lecteur français. Nous tenons Le Torero Caracho pour le meilleur roman ayant la corrida pour thème, La Femme d’ambre comme celui qui évoque Naples la vénéneuse avec le plus de subtilité, Seins pour le livre le plus sensuel, le plus drôle, le plus abouti – 300 pages - sur le sujet (nous espérons lire un jour Automoribundia, l'autobiographie de l'auteur encore non traduite), et enfin Greguerías (le terme : humour+métaphore, « l'une de mes cendres quotidiennes », « oeillet sur le mur », disait lui-même l'inventeur de ce trait poétique), comme le recueil de micro-fragments le plus agréable à lire, autant que le Journal de Jules Renard et les Carnets de Cioran, en plus humoristique. Je tape dedans au hasard afin que celle ou celui qui ne connaît pas encore le plaisir de lire Ramón ressente son ça : « Le poète se nourrit de croissants de lune. » « Les épis de blé chatouillent le vent. » « Il devrait exister des jumelles olfactives pour percevoir le parfum des jardins lointains. » « Le glaçon tinte dans le verre comme un grelot de cristal au cou du whisky. » « Le brouillard finit en haillons. » « L’âme quitte le corps comme s’il s’agissait d’une chemise intérieure dont le jour de lessive est venu. » « Le bon écrivain ne sait jamais s’il sait écrire. » « Lorsque le cygne plonge son cou dans l’eau, on dirait un bras de femme cherchant une bague au fond de la baignoire. » « Accroupies à l’ombre de l’arbre qui se trouve au milieu de la plaine, les idées du paysage tiennent salon. » « L’épouvantail a une allure d’espion fusillé. » « Les jours de vent, les joncs ont cours d’escrime. » « La migraine est cette femme pénible qu’on ne veut pas recevoir, mais qui se glisse chez vous en disant :Je sais que vous êtes là. » L.M.

  • Schnock

    Comme les temps changent, où plutôt combien nos esprits évoluent. Je quitte la Côte basque le 24 au soir. Et les Fêtes de Bayonne débutent le 25. Jadis, j'y étais pour elles, et en rouge & blanc dès avant l'heure. Francis Marmande (Bayonnais, collaborateur du "Monde" pour le jazz et les toros) me confiait hier soir à voix ourdie (je l'ai retrouvé par hasard au restaurant Chez Martin, rue d'Espagne*) qu'il partageait ma désaficiòn. Il regagnait d'ailleurs Paris ce matin, lors qu'une corrida à cheval s'annonce à Lachepaillet...

    Que penser, sinon que nous devenons schnock, ce qui est tendance, me suis-je laissé dire. Jamais blasé -oh non, ni désabusé. Nostalgique assumé, certes. Cultivant nos souvenirs qui sont notre jardin voltairien, oui. Mais, quand même, hein. Se dire à soi-même, virant de bord en scooter devant la plage de La Petite Chambre d'Amour il y a une demi-heure : Trop de monde, je passe aux halles des Cinq-Cantons faire provision de bouche complémentaire vite fait, sans case apéro rosé ni jambon truffé chez Balme, et je file griller un paleron de chez Guillo avec les Raisins gaulois, si frais en bouche, de Lapierre. J'ai appelé Machin, il est libre, on refera le monde en général, et celui des femmes en particulier devant le barbecue. Autant dire que cela prendra du temps, même avec une cuisson lente obligée... Est-ce là un signe de réclusion, de repli, de... Non : Se préserver, pratiquer la stratégie de l'évitement contre tout ce qui agresse m'appert vital, désormais. Les bons moments sont comptés. Chacun d'entre eux doit, devra être bichonné. C'est comme ça. L.M.

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    *Extraordinaire déjeuner chez Sébastien Gravé, la veille (La Table de Pottoka), sans conteste la meilleure adresse bayonnaise du moment - et pourvu que ça dure!.. Surtout en compagnie (par hasard, encore, à l'apéro, puis au dijo - mais, par ici, les rencontres fortuites sont souvent ensoleillées), du débonnaire Éric Ospital (jambons Louis Ospital, dont j'ai abondamment parlé dans L'Express paru il y a deux semaines - en kiosque tout l'été dans la région), et de Stéphane Davet (réservé, pudique chroniqueur gastronomie et musique au "Monde"). 

  • Flamencoscopie

     

    flamencopulsion.jpgMarc Dubos, architecte de formation, vit dans les Landes et il est habité par l'Arte Flamenco (allusion au fameux festival éponyme qui se tient en juillet à Mont-de-Marsan). A l'instar de Jack Kerouac et de son célèbre rouleau, sur lequel il écrivit des mètres de Sur la route, Dubos possède son propre outil, la festigraph, qui lui permet de saisir sur le vif la danse (et la musique) flamenca au fur et à mesure qu'elle se déroulent devant lui, lors des spectacles dédiés. Il appelle cela la flamenscopie (nous préférons ajouter un co, ça sonne mieux). Comme les surréalistes pratiquaient l'écriture automatique, Dubos dessine, saisit sur le vif, croque à l'infini, et à une vitesse vertgineuse, quantité de dessins - jusqu'à cent par soirée -, et c'est une sélection de ceux-ci (noir sur blanc) que les éditions Passiflore proposent dans un recueil intitulé Flamenco pulsion (18€). Je me souviens du peintre taurin landais Jean Ducasse, qui vivait à Saubion (il a disparu en mai 2011), lorsqu'il dessinait à cent à l'heure, dans la tribune presse des arènes de Saint-Vincent de Tyrosse : un oeil et demi dans le ruedo, et un demi sur le papier, il enchaînait les dessins au trait sur des feuilles blanches de format A4, qu'il faisait tomber une à une à une cadence suffocante, et à la fin de la corrida, le sol était jonché de ces croquis saisis sur le vif. Dubos fait à peu près pareil, avec son festigraph, et sa patte est différente. Lui, choisit de saisir des instants, des gestes, des mouvements de danseurs flamenco, pas ceux des toreros. Une même chorégraphie déclinée sur des terrains distincts, pour exprimer à cru l'âme flamenca. ¡Olé! L.M.

     

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  • Vivement Nîmes

     

     

    Capture d’écran 2015-05-22 à 11.29.43.pngQuelles affiches, por dios!.. Un mano a mano Morante de la Puebla - El Juli cet après-midi (avec des Garcigrande), une mixte (!) dimanche matin, avec Pablo Hermoso de Mendoza à cheval (2 toros de Fermin Bohorquez) et Enrique Ponce à pied face à 4 autres toros (notamment un Victoriano del Rio), et l'après-midi, c'est le retour à Nîmes des Victorino Martin! Avec deux spécialistes des toros compliqués, voire durs : Rafaelillo, et Manuel Escribano (ce dernier a triomphé à Séville, il y a deux ans), et enfin Paco Urena, qui confirmera son alternative... Et qui a gracié un Victorino l'année dernière. Cela promet - et nous serons dans les gradins (pour les Victorino seulement). "Vivement dimanche!", dirait Miguel El Drouquér II.

    Et vive les vins des Costières de Nîmes, qui organisent ce week-end de fiesta et de feria, aux bons soins de l'agence lyonnaise Clair de Lune. A suivre, pour le compte rendu de la corrida, et surtout des dégustations.

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  • Pourquoi ils vont voir des corridas

    images.jpegLa question méritait (enfin) d'être posée, de s'intéresser à ceux qui peuplent les gradins et non plus seulement à ceux qui jouent leur vie dans l'arène. Ce collectif d'auteurs (textes réunis par Marc Delon, éd. Atlantica) où l'on trouve notamment Francis Marmande, Florence Delay, François Zumbiehl, Guy Lagorce, Jean-Marie Magnan et de nombreux anonymes (instituteurs, kinésithérapeuthes, retraités, collégiens...), exprime les motivations de deux millions de personnes qui vont aux toros en France chaque année. Ce n'est pas rien. J'y ai apporté ma petite pierre, puisque l'éditeur m'a demandé s'il pouvait reprendre un court texte intitulé Invincible, déjà paru dans Philosophie intime du Sud-Ouest (Les Equateurs) et qui évoque ma fille. Le voici :

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  • Pierre Veilletet

    images.jpgC'est un grand journaliste doublé d'un écrivain précieux, précis qui vient de quitter ce monde à l'âge de 69 ans, le 8 janvier dernier. A Bordeaux. Sa ville. Né à Momuy dans les Landes et d'origine flamande par ailleurs, Pierre Veilletet aura effectué une brillante carrière au journal Sud-Ouest, qu'il pilota, jusqu'à son éviction brutale en 2000 -qu'il ne digéra pas. Prix Albert-Londres 1976 pour ses reportages sur l'agonie de Franco, il préféra rester le premier à Bordeaux au lieu d'être un numéro à Paris. C'était un maître à l'écriture rigoureuse, au ton singulier, hiératique et profond. Un styliste. Un observateur d'une finesse désarçonnante. Un taiseux au sourire rare aussi. Un personnage un rien intimidant mais toujours prompt à lancer un trait d'esprit pour détendre une atmosphère qu'il savait avoir rendue pesante, dans son bureau au journal ou ailleurs par hasard dans les rues de la ville. Veilletet avait le tact inscrit en lui. Et une délicatesse parfois gauche mais jamais empruntée. Il n'était pas d'accès libre. Ce n'est qu'à l'âge de 43 ans qu'il publia son premier livre, le court et dense roman La pension des nonnes, chez Arléa, maison cofondée avec ses amis Jean-Claude et Catherine Guillebaud et à laquelle il restera aussi fidèle que Julien Gracq le demeura à José Corti. L'allusion vaut rapprochement : le choix scrupuleux de l'adjectif, l'usage de l'italique pour appuyer comme on adresse un clin d'oeil entendu, rendent l'écriture de Veilletet voisine, sinon cousine de celle du grand écrivain de Saint-Florent-le-Vieil. Si Querencia et autres lieux sûrs peut faire penser à La première gorgée de bière de Philippe Delerm pour sa thématique, mais avec une autre tenue, une exigence altière, ce recueil de courts textes qui sont autant de bijoux ciselés évoque davantage les Préférences ainsi que Liberté grande, de Gracq, tant par sa subjectivité que par sa prose somptueuse. Le journaliste aura marqué Sud-Ouest Dimanche, qu'il dirigea dès 1979 de main de maître. Je le connus là, en 1981. Il fut mon premier rédacteur en chef et me permit d'écrire notamment des critiques de livres durant des années. J'entrais dans ma vie d'homme. François Mitterrand venait d'accéder au pouvoir et j'achevais mes études. Étrangement (encore que...), j'ai toujours trouvé en Veilletet un indéniable côté mitterrandien, dû sans doute à sa timidité -qui pouvait passer pour de la froideur et que l'on résumait en disant que c'était son côté British qui dépassait le côté Bordelais d'un homme à la casquette en tweed distincte de ses vestes de la même étoffe -qui le faisaient ressembler, physiquement aussi, au "Prince des reporters". L'homme impressionnait. Je n'oublierai pas ces inconnus célèbres (les seconds couteaux de la littérature que nous chérissions : Forton, Gadenne, Bousquet, Guérin, Perros, Augiéras, De Richaud, Henein, Vialatte, Calet...), dont nous fîmes une série dans le journal, avec Yves Harté -l'autre grande plume, qui lui succéda à Sud-Ouest Dimanche. Je n'oublierai jamais ce soir de 1986 copieusement arrosé que nous passâmes tous les trois (Yves Harté, Pierre Veilletet et moi), pour fêter la parution imminente de La pension des nonnes. En fin de soirée, nous avions porté à bout d'épaules un Pierre Veilletet ivre de bordeaux et de bonheur, de chez moi à chez lui ou jusqu'à un taxi, je ne me souviens plus très bien. Je garde précieusement le "tapuscrit" de ce roman, qui porte un titre originel schubertien : Un voyage d'hiver. Veilletet connaissait les vins et la tauromachie sur le bout des doigts et il a écrit des textes magnifiques sur ces sujets solaires qui le passionnaient.
    Attiré par l'Espagne autant que par l'Italie et par certaines villes du Nord, par les ports et par les fleuves, il plaçait l'exigence journalistique et la littérature au-dessus de tout. Il procurait, avec ses articles que nous guettions, ce plaisir du texte que l'on ne trouve plus guère dans les journaux et qui était alors flatté, encouragé à Sud-Ouest, journal de plumes donnant d'excellents papiers. Dans ses livres, que je relis depuis trois jours avec un plaisir mâtiné de tristesse, il donnait tout simplement la mesure d'une littérature de haut-vol. Car c'était un grand. Un très grand. 

    Lire (j'espère qu'Arléa aura la bonne idée de publier une compil°, un "Tout-Veilletet" comme cet éditeur de qualité a publié la totale d'Albert Londres, câbles compris, ou les Essais de Montaigne reloaded par Claude Pinganaud, ou bien comme il existe un Bouquins/Laffont des oeuvres d'Antoine Blondin, histoire de nous éclipser et de le relire peinard, à l'écart, comme un chien s'en va ronger au fond du jardin). Lire donc : Querencia et autres lieux sûrs (Mots et merveilles en collection de poche), La pension des nonnes, Bords d'eaux, Coeur de père, Mari-Barbola, Le vin, leçon de choses, Le prix du sang, Le cadeau du moine (tous chez Arléa); Le peuple du toro (Hermé), De l'esprit des vins (Adam Biro).

    Photo : Pierre Veilletet (lunettes) avec Jean-Claude Guillebaud (Prix Albert-Londres en 1972. Yves Harté le fut en 1990), dans le sannées 2000 : © Archives Philippe Taris/Sud-Ouest.


    P.S. : "l'avantage" d'un blog sur une publication dans la presse traditionnelle (je pense immédiatement et quasi exclusivement au support papier : je suis old school et j'aime ça), est de pouvoir s'autoriser des digressions personnelles, de se mettre en avant, ce qui est bien sûr proscrit partout ailleurs. C'est pourquoi je me suis laissé allé ci-dessus à partager une ou deux anecdotes, des souvenirs qui parlent de toute façon directement de Pierre Veilletet.


  • Taurines

    téléchargement.jpegSebastien Castella, l'immense torero français (il est Bitterois), l'équivalent de José Tomas en Espagne -les deux figuras les plus importantes du moment- ont en commun le partage du mystère. Austères, fermés, ils ne semblent pouvoir s'exprimer que devant un toro de combat. A coups de quarts d'heure d'une émotion parfois insoutenable de justesse, de lenteur (de temple) et de beauté. Le chroniqueur taurin Jacques Durand dit de l'un qu'il laisse son corps à l'hôtel lorsqu'il va toréer. Il y a de cela lorsqu'on voit l'un et/ou l'autre au centre d'une arène. Un livre magnifique vient de paraître sur Castella, signé Olga Holguin (Actes Sud). Cette photographe a suivi le torero pendant plusieurs années. Son livre tire la quintessence visuelle de l'art toreo du maestro. Des textes de grande teneur accompagne ces photos d'une sensibilité de chair de poule, signés Arevalo, Durand, Diusaba. Et des huiles de Robert Ryan enveloppent l'ensemble. Un beau livre; vraiment. 

    images.jpegLe peintre Gardois Jean-Pierre Formica livre quant à lui ses Carnets taurins (Actes Sud, préface d'Alain Montcouquiol), réalisés à main levée pendant les corridas de Nîmes et d'ailleurs. Une sélection drastique de ses dix mille dessins à la craie et au fusain nous est proposée, qui choisit de traduire le mouvement, la durée, la retenue, l'instant où le temps semble se taire au détour d'une passe et au coeur de la chorégraphie particulière que livrent sous nos yeux un homme et un fauve. Il est question de geste dans ces dessins et du fameux silence sonore du toreo dont parlait le grand José Bergamin.

  • L'appel de Séville

    9782846263214.gifA l'heure où l'encierro de las San Fermines bat son plein à Pampelune (ah, le bon temps où je courais devant les toros à 7 heures du matin dans cette calle Estafeta...), voici un écho taurin remarquable :

    Prof de philo à Normale Sup, Francis Wolff est l’auteur notamment de Philosophie de la corrida (Fayard, repris au Livre de Poche), chroniqué ici à sa parution, un ouvrage fondamental sur le sujet. C'est ce livre qui a sans doute valu -honneur insigne pour un Français- à son auteur d’être invité à prononcer le pregon, ou discours inaugural de la feria de Seville 2010 (le 4 avril). Voici un extrait de ce discours déjà historique, intitulé L'Appel de Séville, et sous-titré Discours de philosophie taurine à l'usage de tous, que l’exigente aficion andalouse acclama :

    « La corrida est moins qu’un art parce qu’elle semble échouer à produire une vraie représentation, vouée qu’elle est à la présentation du vrai : un vrai danger, une blessure béante, la mort. Mais, pour la même raison, la corrida est plus qu’un art : c’est la culture humaine même. Ce n’est pas, comme l’opéra, un art total, c’est une culture totale, parce qu’en elle fusionnent toutes les autres pratiques culturelles. De fait, la corrida n’est ni un sport, ni un jeu, ni un sacrifice, elle est plus qu’un spectacle et elle n’est pas exactement un art ni vraiment un rite. Comme l’opéra, elle emprunte quelque chose à toutes les autres formes de la culture pour en faire un tout original et sublime. Elle fait de la surface des autres pratiques humaines sa propre profondeur. Au sport, elle emprunte la mise en scène du corps et le sens de l’exploit physique, mais non les scores et les records. Comme la domestication, fondement de la civilisation, elle humanise l’animal, mais elle le laisse libre. Comme dans un combat, on cherche à dominer l’adversaire, mais toujours le même doit y vaincre, c’est l’homme. Aux cultes, elle prend l’obsession des signes, mais il n’y a ni dieux ni transcendance. Au jeu, elle emprunte la gratuité et la feinte, mais les protagonistes n’y jouent pas, si ce n’est leur vie. Elle rend la tragédie réelle, parce qu’on y meurt tout de bon, mais elle rend la lutte à mort théâtrale parce qu’on y joue la vie et la mort déguisé en habit de lumière. D’un jeu, elle fait un art parce qu’elle n’a d’autre finalité que son acte ; d’un art, elle fait un jeu parce qu’elle rend sa part au hasard. Spectacle de la fatalité et de l’incertitude, où tout est imprévisible — comme dans une compétition sportive — et l’issue connue d’avance — comme dans un rite sacrificiel.. La tauromachie est moins qu’un art parce qu’elle est vraie, et au-dessus de tout autre art, aussi parce qu’elle est vraie. Le toreo, art de l’instant qui dure, ne parvient jamais à l'immuabilité des œuvres des « vrais » arts et à la pureté des créations imaginaires, parce que ses œuvres sont réelles et donc vulnérables, parce qu’elles sont entachées de l’impureté de la réalité : la blessure du corps, le sang, la mort. »

     

     

  • Costières, again

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    J'aime cette appellation. Les costières-de-nîmes sont à ma taille, à mon goût, à mes attentes, que je sais partagées par pas mal de monde heureusement. Vendredi 10 juin en milieu de matinée à Beaucaire, avec quelques confrères, et après une soirée de feria nîmoise endiablée qui suivait une corrida de respect (El Juli au top de sa forme et Castella qui imposa son temple au monde entier, le temps d'une série de manoletinas inoubliables, plus un jeune local, P.Oliver, qui prit l'alternative sans bruit. Deux toros de Victoriano del Rio bons, sur six, c'est beaucoup par les temps qui courent), je dégustais une trentaine de ces vins chauds, sélectionnés "sans bois" (pour la plupart...) en 2009 et 2010 surtout, plus quelques 2008. De loin, devant, se distingua Nostre Païs rouge 2008, du génial Michel Gassier (château de Nages). C'est un vin de pur plaisir, gourmand, sur le fruit, généreux, soyeux et riche, frais et équilibré, franc et corpulent, séducteur et souriant. Le bonheur! Grenache noir, carignan, mourvèdre, cinsault et un soupçon de syrah le composent.


    Puis, 
    immédiatement derrière lui, se distinguent les cuvées de la dynamique Diane de Puymorin, du château D'Or et de Gueules. Les Cimels (rouge 2009) possède un bel équilibre fruit-fraîcheur, des tanins soyeux et une belle présence en arrière-bouche. La cuvée Qu'es aQuo (rouge 09) composée de vieux carignans, est d'une grande douceur. La cuvée La Bolida (rouge 08), composée de vieilles mourvèdres, est un miracle de féminité, de rondeur et de suavité. C'est un vin de longue garde qui magnifie la mourvèdre, mais qui est déjà formidable à découvrir. Enfin, Trassegum (philtre d'amour, en Occitan), rouge 08, offre un équilibre parfait entre fruité et puissance, longueur et attaque vive mais douce, encore. La syrah domine, l'élégance le détache, l'épicé et une pointe d'olive noire l'arrondissent.

    Il y avait encore Mourgues du Grès (rouge 2009) cuvée Les galets rouges, pour la puissance de son attaque, et la cuvée Terre d'Argence, aussi, (en 2008), pour la présence charmante des fruits noirs en bouche.

    L'Ermitage (rouge 09) cuvée vieilles vignes, pour le velours bien ajusté du tandem syrah-mourvèdre. 

    La cuvée Confidence du château Beaubois, que nous avons préférée à la cuvée Elégance, trouvant que la première portait bien le nom de la seconde (rouges 09).

    La cuvée tradition du château des Bressades (rouge 2010) car c'est gourmand, doux, à fond sur le fruit et qu'une pointe de cinsault active le duo grenache-syrah, à la manière d'une série de passes inspirée de Sébastien Castella lorsque la corrida glisse vers l'ennui...

    Enfin, mention spéciale au rosé Les Cimels, de D'Or et de Gueules servi en magnum (c'est tellement mieux!), en 2010, rosé de pressée de mourvèdre et cinsault enrichi de saignée de syrah, à la robe délicate et au nez profond, avec des notes d'agrumes, de miel, de fleurs blanches et une longueur en bouche que nombre de rosés envient secrètement...

     

    Peinture : © Francine Van Hove 

    Tes yeux rendent jaloux le ciel d'après la pluie. Aragon, Les yeux d'Elsa.

  • lu/bu

    LU : Le nouveau hors-série trimestriel de Technikart, gourmand sauvage, libertin libertaire, décapant salutaire, irrévérencieux intelligent, gourmand fier de l'être, hédoniste fort de son instinct, shootant dans l'éphémère, artiste emmêlé, fianceur de styles-genres ... se nomme : Grand Seigneur. Le magazine qui ne se refuse rien associe culture -et notamment littérature- avec gastronomie et vins, mais aussi sexe et politique, cinoche et junk, pipeule et rouge qui tâche de bien se tenir.  Ce premier numéro est une vraie réussite. A suivre (de près)...

    La corrida du 12 septembre 2010 à Dax, unique entre toutes (j’ai eu la chance de la vivre depuis le callejon) est l’occasion d’un album souvenir publié aux jeunes éditions Passiflore à Dax : Histoire d’une corrida triomphale, du Campo au Ruedo, est signé par un collectif d’auteurs (textes et photos) ayant suivi les toros depuis leur élevage jusqu’aux arènes. Il est toujours émouvant de feuilleter un tel bouquet de réminiscences. Les couleurs, les odeurs, les bruits affluent. Celui-ci est à conserver pour les jours de disette taurine, hélas si nombreux. Car cet après-midi-là, il y eut certes huit oreilles, une queue et une sortie a hombros des trois toreros et du mayoral, mais ce fut avant tout un jour de grâce où une sorte de magie habillait l’air. Nos pas, à la sortie, étaient légers, nos sourires étaient larges, le bonheur se lisait dans le bleu du ciel et dans le regard des femmes.

    Le Dictionnaire du désir de lire, de Benoît Jeantet et Richard Escot (Honoré Champion), passe en revue cent romans contemporains du monde entier. Ces deux rugbymen passionnés de littérature dressent leur catalogue amoureux comme on hisse les voiles, et nous embarquent à bord d'un vaisseau de bon goût avec pour marins les plus grands écrivains du XXème. Cette navigation subjective peut naviguer tranquille à l'estime -que je garantis générale. Elle est aussi le reflet de ce qui fut publié de meilleur, car les drolles ont le nez sacrément fin. Ni didactiques, ni pontifiants, ni jargonautes ni abscons, les auteurs sont plutôt des passeurs d’un ballon ovale nommé littérature, et c’est en cent passes qu’il nous transforment une journée de lecture en bonheur : nul essai ici, que des romans (et des récits) au talent sûr. Des classiques mais aussi des inattendus; de la bonne came toujours.

    Signalons chez le même éditeur, un Dictionnaire du rugby, énorme, riche de plus de 1600 entrées en 610 pages, signé Sophie Lavignasse, basque et dingue de linguistique et de rugby. L’Ovalie dans tous ses sens est un précieux bréviaire à garder près de soi pour le match France-Galles de samedi prochain. Voyons voir au mot déception… Tiens, il n'y figure pas! Enfin, pas encore(*) ...

    Les Lebey 2011 sont parus : Le Guide Lebey des restaurants de Paris et sa banlieue (couverture orange) et Le petit Lebey des bistrots parisiens (couverture noire) nous sont devenus indispensables. Parce qu’ils sont fiables et pertinents, à jour et simples d’utilisation, concis et précis, sans esbroufe et à l’abri des modes branchées, ce sont des compagnons d’avant-soirée que l’on a plaisir à consulter, et même à lire !

    Le Guide Michelin 2011 est paru également, avec ses surprises (rares, cette année), une avalanche bienvenue de bib qui démocratise le gros livre rouge (bravo à François Miura, qui obtient l’un des 117 nouveaux bib restaurants, à Bayonne), et des décrochages ici et là (la Villa Stings, à Saubusse, perd ainsi son étoile, et Les Pyrénées à St-Jean-Pied-de-Port perdent leur seconde : nous compatissons, avec l'envie de dire à ces potos-là : après tout, le Rouge, on n'en a rien à cirer!).

    La vigne et le vin en cent mots, de Sylvie Reboul (Le Polygraphe) est l’un de ces petits bouquins en forme d’abécédaire qui fleurissent depuis quelque temps en librairie ; en particulier à propos du vin. Ce dernier est assez bien fichu, car enrichi de nombreux encadrés pense-bête, intitulés « Le saviez-vous ? » parfaitement opportuns, au détour de pages par ailleurs joliment illustrées de dessins et de cartes.

    Enfin, un mot sur un essai admirable et qui semble connaître un petit succès mérité, Athènes vue par ses métèques, de Saber Mansouri (Tallandier), car il met avec justesse l’accent sur ces étrangers qui vivent à Athènes au Vème-IVème siècle av. J.C., avec les citoyens, qui sont d’une part des étrangers nés libres, installés comme artisans ou commerçants, ou encore comme réfugiés politiques, et d’autre part des esclaves affranchis (devenus métèques), ayant pour patron leur ancien maître. Ce sont des non-citoyens aussi attachés à leur cité que les vrais, ils participent à l’économie et font même la guerre, expriment par là un authentique désir d’adhésion, sinon de reconnaissance. La thèse de Mansouri est donc très différente de la plupart des autres, lesquelles font des métèques des personnages seulement attirés par le gain, prêts à trahir, opportunistes, voire dangereux pour l’équilibre social de la polis. Saber Mansouri déconstruit cette image d’un métèque imaginaire qui semble avoir arrangé nombre d’historiens, pour lui donner sa vraie dimension d’homme impliqué volontairement, et dont l’action est par conséquent encore plus valeureuse, car authentique et profonde.

    BUun délicieux bordeaux, Isle Fort 2008, élaboré à Lignan-de-Bordeaux, concentré comme on aime, avec des merlots raffinés (ce qui est rare), doté d’un nez de fruits rouges assez classique, mais dopé aux épices douces. En bouche, nous retrouvons une belle ampleur apparue au nez, l’épicé donne un petit effet queue de paon à la longueur, confortable au final. Ce vin appartient à Sylvie Douce et à François Jeantet (à l'origine du Salon du Chocolat) et l'éminent œnologue Stéphane Derenoncourt orchestre son élaboration. C’est l’une des plus belles surprises de ces dernières semaines, en Bordeaux. A noter que le domaine produit un rosé confidentiel (4000 bouteilles), Isle Douce 2009, 100% merlot, à la belle robe saumonée, au nez floral en diable et à la bouche gourmande et structurée.

    L’autre bonne surprise bordelaise (une fois n’est pas coutume) de ces derniers jours est un graves  de Pessac-Leognan : château Rouillac, aussi vif en blanc (2009) que puissant en rouge (2008), doté d’une puissance aromatique formidable et d’un caractère bien trempé -surtout sur un risotto à la truffe noire. Bravo au nouveau propriétaire, qui signe ses premiers millésimes avec brio.

    Mais bon, l'essentiel se trouve dans le sud-est, du côté des côtes-rhône septentrionales, là où syrah, mourvèdre, cinsault, grenache et autres bricoles s'expriment comme des divas à l'Opéra, le soleil aidant. Mais ces jours-ci, aucune nouveauté, que des remettez-nous ça. Donc du bonheur : Le Grand Ordinaire.

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    (*) déception se dit delusioneen Italien.

    Question annexe : quand est-ce qu'il se casse, le Lièvremont et sa morgue d'enterrement !


     

     

     

     

  • rappel

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    La mort est comme un mètre carré qui tourbillonne dans l'arène. Le torero ne doit pas marcher dessus quand le taureau vient vers lui, mais personne ne sait où se situe ce mètre carré. C'est sans doute cela le destin. C'est Christiane Parrat la vigilante qui cite Luis Miguel Dominguin (lui-même cité par François Zumbiehl dans ce merveilleux ouvrage intitulé Des taureaux dans la tête), à l'instant dans un mail. ¡Gracias!..

    Photo (Vic-Fezensac 2009) : ©LM

  • Où est-il?

    IMG_1396.jpg<== : Voici ce qu'il reste d'un torero d'une classe rarissime, aujourd'hui chaque fois plus décevant. Sebastian ne torée plus vraiment depuis deux saisons. Souhaitons qu'il réfléchisse à son retour...

    IMG_1427.JPGIMG_1389.JPGIMG_1363.jpg(Photos prises avec mon iPhone : Sebastian Castella, Mateo Julian, novillero prometteur, Dax, samedi 11. Arènes de Bayonne, samedi 4)

    José Bergamin (La solitude sonore du toreo, Verdier/poche) :  Parce qu’elle est émotion et parce qu’elle est torera, l’émotion torera est magique.

    Tout ce qui est art, jeu, fête, dans le toreo, appartient au monde magique de l’émotion. Le cercle magique des arènes l’inscrit dans l’ensemble de ses éléments. Les barrières de bois le dessinent sur le sable, la toiture le découpe dans le ciel. Et tout ce qui demeure à l’intérieur de ce rond, dans son espace déterminé, appartient au monde magique de l’émotion, horrible ou merveilleux, selon l’objet qui le motive. De telle sorte que le véritablement horrible ou merveilleux disparaît quand se rompt le cercle magique, soit, comme dirait Sartre : « Quand nous construisons sur ce monde magique des superstructures rationnelles, car ce sont elles alors qui sont éphémères et sans équilibre, elles qui laborieusement construites par la raison se défont et s’écroulent, laissant l’homme brusquement replongé dans la magie originelle.» Pour celui qui contemple le monde magique du toreo existent ces deux formes d’émotion signalées par Sartre : celle que nous construisons et celle qui nous est brusquement révélée. C’est ainsi qu’il arrive, dans le toreo comme dans la danse  – surtout la danse sacrée et cette part de sacré qu’il y a dans le flamenco –, que l’émotion magique surpasse prodigieusement ou sublime leur réalité vivante. Exemple souvent cité par moi que celui de la danse, et Sartre aussi l’évoque, je crois me souvenir, dans sa Théorie des émotions : quand le symbolisme du sexe pour la danseuse, de la mort pour le torero, transcendant son instinctive motivation, transforme ou transfigure le désir ou la peur. Dans le spectacle magique de la course, la présence de la mort est exclusivement liée au taureau tandis que les lumières de la raison irrationnelle, s’allumant et s’éteignant sur son habit, masquent d’immortalité le torero. Dès qu’un torero nous exprime volontairement ou involontairement sa vaillance ou sa peur, l’émotion magique de son art s’évanouit. Car l’émotion du toreo relève exclusivement de l’art. Le spectateur qui s’émeut d’autre chose le détruit, en lui substituant une sorte de pornographie mortelle qui le transforme lui-même en masochiste suicidaire et en assassin sadique : tendances évidemment imaginaires, ignorées de lui, qui ne sent que plaisir et douleur frustrés, comme dans un inconscient fantasme d’onanisme...

  • la grâce

    IMG_1425.JPGC'est un refrain : il faut en voir beaucoup pour... Ainsi ces derniers jours, aux arènes de Bayonne et de Dax, parfois matin et soir...

    Celles de Dax furent hier le théâtre d'une corrida vraiment exceptionnelle. Qu'importe même les 8 oreilles et la queue (il faut remonter à 99 pour en trouver une dans ce ruedo, attribuée à Ponce -là, ce fut à un Juli au faîte de sa maîtrise qu'elle fut accordée sans réserve), car il s'agissait de grâce, et surtout de toros (de Victoriano del Rio) absolument magnifiques, nobles, encastés jusqu'aux diamants et d'une alegria générale qui habita El Cid -au toreo profond, El Juli "al tope", et Morante de la Puebla, plus authentiquement torero qu'un siècle de tardes. Depuis le callejon, les cheveux caressés par Alain et Nicole Dutournier en barrera à l'aplomb, il ne manquait à notre plaisir dévastateur, qu'una copita de ce Costières de Nîmes rouge Clos des Boutes, Les Fagnes 2009, qui présente un mélange magique de boisé discret, de fruité intense, de persistance et d'élégance, avec un chocolaté subtil (entre le noir d'ayatollah de l'amer et le lacté de l'hédoniste qui sait tout du snobisme). Olé, donc.

    Photo prise avec le téléphone.

  • Hommage à Cesar Rincon

    « Le petit homme », comme le surnommait Bala (Pierre Albaladejo) au cours de cette soirée qu’il anima avec Zocato, était venu, avec son sourire, la bonté de son regard, l’humilité de ses silences, sa femme ; son père. Vêtu d’un beau costume sans lumières, Cesar Rincon était à Paris, avant-hier soir, pour une soirée privée (et surprise) donnée et concoctée en son honneur.

    L’honneur de l’immense maestro colombien qui a fait ses adieux à la tauromachie.
    Aujourd’hui ganadero dans son pays, dans une finca perchée à plus de 2400 mètres d’altitude, Rincon demeure le torero qui a le plus respecté le toro, qui n’a jamais refusé d’en toréer un seul au prétexte qu’il l’aurait (commodément) jugé intoréable.
    Rincon nous a donné l’occasion de voir, presque à chacune de ses corridas, comment il évaluait un toro, gommait ses défauts, voire ôtait sa mansedumbre et en révélait sa noblesse ou son fond de caste. Torero de respect, il aura profondément marqué les années 90.
    Une belle poignée d’aficionados, réunis autour de Jean-François Mengelle, venus principalement de Bayonne et Dax, pour rejoindre l’aficion parisienne (du Sud-Ouest), avait décidé d’organiser cette belle fête au théâtre Edouard VII.
    ¡Suerte Cesar !