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  • Sur le parler pied-noir

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    J’étais chaleureusement invité à participer à une sorte de colloque ayant pour thème « le parler des Français d’Afrique du Nord, un melting-pot linguistique méditerranéen », soit « le parler pied-noir », thème qui me touche particulièrement IMG_7975.jpegpuisque j’ai écrit un livre sur le sujet qui vit toujours en librairie, trente-six ans après sa première publication (Rivages, 1989, Payot, 2017, 192 pages, 8€). Cela se passait au CDHA, le Centre de documentation historique sur l’Algérie (française), sis à Aix-en-Provence, les 15 et 16 novembre derniers. Cet organisme est des plus dynamiques, et des moins nostalgériques façon couscous-lacrymal-d’un-là-bas-perdu-la-purée-d’nous-z’ôtres.

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    Anne-Marie Perez

    Essentiellement animé par une tonique équipe issue de la génération des années 1962, le CDHA, piloté par l’énergique Anne-Marie Perez (et présidé par Martine Ivara-Deveney), œuvre à entretenir la mémoire des années 1830-1962 en collectionnant un tombereau de témoignages, livres, journaux, documents, objets de toute sorte, soit tout ce qui constitue un patrimoine précieux, un capital mémoriel irremplaçable et à thésauriser coûte que coûte. Le stock déjà acquis est aussi considérable que l’accueil fait à de chercheurs du monde entier intéressés par le sujet. L’espace dédié s’avère formidablement confortable.

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    C’est donc en son cœur que les débats, spectacles, conférences, tables rondes eurent lieu deux jours (de liesse) durant. J’en fus réjoui. Parmi les temps forts, il y eut une conférence de l’historien Jean Monneret sur l’interaction linguistique, une autre de l’universitaire vénitien Alessandro Costantini sur le pataouète et la littérature, plusieurs interventions poétiques de Paul Monnier – homme des « mots enfouis » qu’il sait ressusciter avec gouaille et talent, une synthèse subtile en forme d’hommage sensible du psychologue des âmes exilées Hubert Ripoll, un long conte touchant de Nicolas Bourdon, « Et Pataouète et Patatras », des choses comme ça, diverses, et notamment un formidable hommage rendu par Gérard Crespo au poète injustement oublié Gabriel Audisio, « frère de soleil » d’Albert Camus, Max-Pol Fouchet, Emmanuel Roblès et d’autres... et mis en lumière via des lectures croisées de Isabelle Lillo, Amalia Escriva et Paul Monnier notamment. Deux jours de bonté, de beauté, de partage, de souvenirs, d’amitié et de gaîté simple. On en redemande. L.M.

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    Ma pomme, Stéphane Sarrat (médiateur), Nicolas Bourdon et Sophie Colliex

     

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    NicolasBourdon

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    Paul Monnier (premier rang, au centre)

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    "é oilà !"

     

    Post-scriptum : Lisez l'interview donnée par Boualem Sansal au Figaro (paru ce matin), et dont voici un extrait :

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  • Conférence à propos de Julien Gracq

    Julien Gracq à l'IFM et sur France Culture

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    Je relisais déjà la correspondance Breton/Gracq parue il y a quelques jours chez Gallimard. Et repensais "tout à trac" à une conférence que j'ai donnée à l'Institut français de la mode (Paris XIIIe), à la demande de mon ami Lucas Delattre, et que France Culture enregistra sans que je le sache. Le site de la radio publique a semble t-il supprimé le lien pour l'écouter. Quel dommage. Reste, par bonheur, la source, que voici CI-DESSUS en guise de TITRE de cette note, afin de cliquer pour l'écouter. J'ai été si heureux d'évoquer mon auteur fétiche en toute liberté, sans notes (sauf un demi-feuillet garni de mots-repères, et de quelques citations phares griffonnées à la hâte) ce, à la faveur d'une matinée bleue dans le ciel et blanche car givrée au sol - ce 7 novembre 2017 -, aussi belle que celle de ce matin 22 novembre, et cela eut lieu alors pour mon anniversaire ; par surcroît... Cliquez donc là-haut sur les majuscules pour écouter (ça dure une heure). L.M.

     
  • Boualem libéré. Danke !

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    Honte à l'Elysée et au caniche Barrot, et gloire à l'Allemagne, où Boualem est considéré depuis son premier livre comme un demi-dieu, où il est archi lu (bien davantage qu'en France), où il est adulé, honoré et récompensé par les plus grandes distinctions nationales. Vive sa liberté, et croisons les doigts pour sa santé considérablement mise à mal. Enfin, je vomis sur l'abject régime dictatorial de Tebboune, et sur l'urticaire qui se développe déjà sur la peau de tous les LFIstes.

    (Quelle joie ! Mais quelle honte ! La démocratie allemande a fait montre de fermeté intelligente; efficace. La « pleutrocratie » macronienne a chié dans son froc devant un minus : Tebboune). L.M.

  • Des vivants

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    Je viens de regarder la mini-série de huit épisodes à la fois choc et douce de Jean-Xavier de Lestrade, « Des vivants », sur les survivants du Bataclan, ceux du 13 novembre 2015. Notamment cette poignée de jeunes adultes qui furent pris en otage dans un étroit couloir à l’étage de la salle de concert durant 2h30 par deux inqualifiables barbares dingues, deux crevures terroristes. Et c’est bouleversant de retenue, de justesse, riche de sentiments, de fraternité, d’humanité, de victoire à la fin. Victoire de l’amitié, de l’amour, de la musique malgré les blessures profondes et ineffaçables, assorti d’un hommage appuyé au courage inouï, au sens du sacrifice des hommes de la BRI, la Brigade de recherche et d’intervention. Je recommande vivement, car il n’y a aucun tremolo, aucune recherche lacrymale, aucune empathie excessive dans la réalisation. Les acteurs sont vrais. Le scenario brut et sensible. Réel. C’est juste équilibré, donc rare. L.M.

    (france.tv)

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  • Neuhoff en habit vert

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    Eric Neuhoff en habit vert, ça a de la gueule ! Je commence à comprendre pourquoi il fut porté pâle lors des premières délibérations du jury du prix François Sommer il y a environ trois semaines (nous y siégeons tous deux). Il devait peaufiner sa campagne auprès des immortels. Je plaisante, bien sûr. Je l’avais rêvé au fauteuil de Michel Déon, auteur du Jeune homme vert... Il avait échoué de peu il y a deux ans pour occuper celui de Jean-Loup Dabadie, ç'eut été du sur-mesure ! Il hérite de celui de Gabriel de Broglie. Pas commode comme sujet pour torcher un éloge comme l’exige la tradition, avec l’esprit vif et claquant d’Éric Neuhoff. Florian Zeller, autre académicien du jour, aura l’exercice plus fastoche en occupant le fauteuil laissé vacant par Hélène Carrère d’Encausse. Il suffira au dramaturge rendu célèbre par sa coupe de cheveux étudiée pour la télé, de pomper quelques extraits de Kolkhoze, prix Médicis 2025. Quelques jours après le centenaire de la naissance de Roger Nimier, fêté par un Quarto (Gallimard), « la Pléiade du pauvre » à l’instar de Bouquins (Robert Laffont), l’élection de Neuhoff ne manque pas de panache. Nous sommes ravis ! L.M.

  • Nuit d'insomnie

    La nuit dernière fut d’insomnie comme d’autres nuits peuvent être de volupté ininterrompue, de sensualité joyeuse. Non, d’insomnie. Moins gai, quoique susceptible de générer une étrange poésie. Je regardais le ciel par la fenêtre grande ouverte. Une touffeur légère ouatait l’atmosphère plongée dans un silence d’abbaye. La constellation d’Orion, entre toutes ma préférée pour plusieurs raisons, scintillait comme la lune sur la mer, mais ni la mer ni l’océan ne se trouvaient dans mon champ de vision. Orion ne cessait de me faire des clins d’œil blancs argentés. Je repensais à sa légende, ce chasseur transformé en constellation, aux poèmes de René Char à elle consacrés, lorsque soudain un vol de grives musiciennes traversa la nappe noire comme autant de fusées, comme des fées. Je reconnus leur cri, ce sifflement impossible à confondre avec celui, possiblement en novembre, de la grive mauvis. J’en eus les larmes aux yeux, car tant d’émotion est capable de procurer, d’engendrer cela en moi. J’eus envie de chausser mes bottes, d’enfiler mon vieux Barbour, et de filer jusqu’aux barthes de l’Adour, du côté de Pey et d’Orist, de marcher dans la nuit à la faveur de la lumière procurée par la lune dans l’herbe gorgée d’eau, avec l’espoir de voir s’envoler devant mes pas lents et silencieux, qui auraient soulevé la peau de l’eau pour éviter tout dérangement sonore, quelques sarcelles, bécassines, colverts et autres pilets peut-être. Et puis je me suis ravisé, pensant qu’il ne fallait pas secouer le sommeil de ceux qui ne sont pas frappés d’insomnie, surtout les oiseaux, mes chéris. Alors, j’ai attrapé la Correspondance André Breton – Julien Gracq fraîchement parue, et je me suis souvenu que, dans les Souvenirs désordonnés de José Corti, l’éditeur historique, premier, de mon auteur fétiche, Gracq, avait demandé sept mille cinq cents francs à Louis Poirier qui changeait alors d’identité, afin de pouvoir publier Au château d’Argol, dont la fabrication nécessitait entre onze et douze mille francs. Le jeune professeur, qui venait de se faire retoquer par Gallimard – éditeur qui ne s’en remît pas -, accepta. André Breton reçut un exemplaire. Il aima démesurément l’ouvrage, le « lança » si je puis dire. Ç’en était fait. Julien Gracq prenait soudain corps à la littérature. Il en est aujourd’hui le pilier central, sans lequel tout pourrait bien s’effondrer. L.M.

  • L'Étranger de Camus, via Ozon, en passant

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    Vu, hier soir, au cinéma Le Sélect à Saint-Jean-de-Luz, une adaptation admirable de L'Étranger, d'Albert Camus, roman paru chez Gallimard en 1942, par le très talentueux François Ozon, avec un formidable Benjamin Voisin dans le rôle si difficile, absurde, taiseux, glacial (je sais pas, répète-t-il...), désabusé, nihiliste peut-être, absent davantage qu'inconscient, de l'inoubliable, iconique Meursault. Une sublime Rebecca Marder à ses côtés, un Pierre Lottin totalement dans son rôle de marlou (mais que l'on aimerait bien voir un jour "à contre-emploi", certain qu'il serait admirable). Le texte est respecté, jusqu'à la dernière phrase, sublime, du roman, et qu'ils m'accueillent avec des cris de haine. Le noir & blanc est indispensable à l'esthétique générale du film. Quelle heureuse idée ! Même s'il y manque (je trouve) l'incandescence en quadrichromie surexposée à l'extrême du soleil et de la mer lorsqu'elle scintille d'une chaleur insoutenable, infiniment brûlante. Mais cela relève de ma propre vision, projetée, de l'oeuvre si méditerranéenne de Camus, et souvent relue : Noces, L'Été, Le Premier homme, L'Étranger, La Chute, les Carnets... Le soleil qui tue, qui provoque, qui agit ; facilite le passage à l'acte. Le couple extrêmement sensuel augmente le film, sur la bouée, dans l'eau, entre les draps. Leur amour apaise, la nudité de leur corps procure du bien. Le Schpountz aussi, avec un Fernandel tout en dents de cheval dehors, vu au cinéma Le Majestic, alors interdit d'accès "aux indigènes", dit un panneau près de la caisse. Les rues d'Alger, la rue de Lyon notamment, la tension qui monte, bien que "les événements" soient encore une absurde vue de l'esprit, en 1938. Ils n'ouvriront leur sinistre boite de Pandore que seize ans plus tard, à la Toussaint, dans un autocar... La chaleur, le soleil seuls responsables. L'arabe. L'Arabe. Nommé (enfin) comme dans le premier livre de Kamel Daoud, afin de lui conférer une identité... existentielle. Une espèce de repentance déplacée. Ozon s'inscrit ainsi dans l'air du temps, et nous ne lui en ferons pas reproche. Et puis la chanson de The Cure, signée Robert Smith, Killing an arab, en référence directe au texte de Camus, pour accompagner le générique de fin. Clin d'oeil apothéotique. Une relecture. Bienfaisante. Revenir au texte. Le relire. Je le fais, ce soir. C'est hygiénique, comme relire L'Été chaque été, et l'offrir. Comme on sème, d'un geste auguste de semeur hugolien. Aimer le faire. Partager le plaisir du texte. Surtout lorsqu'il touche par sa désarmante simplicité, son efficace évidence, sa vérité universelle, à une séduisante intemporalité. L.M. 

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    P.S. : J'ai appris (merci Benoît), s'agissant de la première adaptation de L'Etranger par Luchino Visconti, que le maestro souhaitait Delon pour interpréter Meursault, qu'Alain refusa (craignait-il les avances homos appuyées du génial réalisateur du Guépard ?), et que Marcello accepta. Cela donna - j'ai revu la version il y a peu- un Etranger affadi par un Mastroianni sans épaisseur dramatique, désinvolte et non conduit par un Visconti n'ayant visiblement rien compris à la densité tragique du singulier roman de Camus. Regret, car Delon eut été un autre Samouraï à la façon melvillienne, pour peu que Visconti eut eu envie de tout donner pour ce faire. Mais, bon...

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