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  • Joan As Police Woman

    IMG_0507.jpgVue, écoutée hier soir au Nouveau Casino (rue Oberkampf à Paris). Elle dégage. Seule, sans son Band, elle alterne chansons au piano et à la guitare. Les meilleures sont à la guitare, dont sortent des sons bouleversants. Sa façon langoureuse, mélancolique, infiniment lente de faire mourir les cordes en laissant tomber doucement son bras droit, les yeux fermés et la bouche entr'ouverte sur un son à peine audible -de sa voix qui évoque immédiatement celle de Catpower, la rendent infiniment fragile et ses reprises sont fortes, tenues serrées, délicatement maîtrisées. Emouvante Joan As Police Woman. Le dernier morceau (offert en rappel) fait partie de son futur album. La vidéo bientôt, ici même (avec un téléphone, bon, mais elle envoie quand même). Photo : © L.M.

  • Côte sauvage

    9782363940858.jpegPuisque l'atmosphère est à l'échappée en bord de mer, glissez dans votre plus petite poche le Guide nature des Balades en bord de mer (Points2). Extrait des fameux et irréprochables guides publiés par Delachaux et Niestlé, c'est un compagnon malin et idéal pour identifier la faune (oiseaux, poissons, crustacés) et la flore de nos côtes plus ou moins sauvages. Personnellement, je déteste hésiter entre une sterne arctique et une sterne pierregarin lorsque l'une passe et que je nomme l'autre intérieurement. Si je doute, je peux souffrir de n'avoir pas avec moi un guide vérificateur comme celui-ci. Les illustrations sont très fidèles et les fiches signalétiques concises, précises; précieuses. Et puis savoir distinguer le réséda blanc (si bien décrit par Proust qu'il devient impossible de le confondre) du gaillet des sables, ou encore l'actéon, de la nasse réticulée (deux coquillages) enrichit et transforme une promenade sur la dune en exploration douce. Bon à prendre.

  • Le bréviaire du zinc

    331x500_couvertures_9782361570293.jpegNous avons tous nos bars d'élection, nos repaires, nos petites adresses, nos querencias, nos annexes où nous nous sentons bien, accoudés au zinc ou bien assis en terrasse; seul ou avec un ou plusieurs amis. Un café peut devenir le centre du monde et, selon sa clientèle et donc l'endroit où il se trouve, son style aussi, une photographie de la société. J'adore les bars pour cela. Pour observer l'autre, prendre le temps, l'air et aussi déguster un bon vin. Pierrick Bourgault est un bourlingueur. Il va de bar en bar, partout et il sait parler de ces microcosmes qui en disent si long sur les rapports humains, sur les caractères, les habitus. L'écho des bistrots, son petit bouquin sous-titré Petite confidence sur les cafés, pubs, tavernes et autres buvettes (Transboréal) est un bréviaire, une somme sensible et le compte-rendu vigilant de ses innombrables observations subtiles. A lire sur place et à faire passer.


  • du jardin

    9782710369332.gifC'est plein d'un humour léger, de jeux de mots simples au creux de tout petits textes tendres placés en vis-à-vis d'illustrations botaniques qui donnent à cet album intitulé Jardin pour les jours de pluie, de Jean Zéboulon (La Table ronde), un air de manuel de leçons de choses rédigé les après-midi d'école buissonnière.

    Extraits : 

    Je fais souvent ce rêve étrange... 

    Au Jardin des Plantes, ma boulangère en tenue d'Eve, m'invite à goûter au fruit de l'arbre à pain


    Six caractères suffisent à écrire la bruyère.


    Je suis le fruit de la passion de ma mangue et de papaye.


    Les groseilles à maquereaux n'excitent guère le palais des filles de joie.

     

    Le poinçonneur est mort, les lilas embaument.


    9782330005375.jpegDans un registre plus sérieux, Jean-Pierre Le Dantec, dont on avait évoqué ici la Poétique des jardins, publie Dix jardiniers (les deux chez Actes Sud), ou l'éloge, en dix mini-biographies très libres, de dix jardiniers exceptionnels, passionnés, flamboyants, géniaux en somme. L'historien de l'architecture, de la ville et du paysagisme raconte des vies et il aime ça. Il invente sans doute un peu, mais il envoûte avant tout. Le substrat informatif est solide et la littérature nappe l'ensemble, avec sa part nécessaire de fiction : la recette prend, que l'auteur narre l'existence et l'oeuvre de Pirro Ligorio (à qui l'on doit les jardins de la Villa d'Este), celles de Frederick Law Olmsted et Calvert Vaux (Central Park à New York), ou encore la vie singulière de Charles Pecqueur, cet ancien mineur du Nord qui concentra sa vision du monde dans son minuscule jardin d'art brut. 

  • La Patience des buffles sous la pluie

    téléchargement.jpegCOUP2COEUR

    Vous allez l'aimer et l'offrir à tous vos amis. On parie? Ce petit livre composé de soixante-neuf très petites nouvelles sèches et tranchantes, rondes et captivantes, douces et cassantes, aigre-douces et bouleversantes, fondues enchaînées et toujours drôles, incisives et clairvoyantes est un régal de style, d'observation acérée de nos tempéraments amoureux et sociaux en général. Il y a du Bref (la fameuse série diffusée sur Canal+) pour l'autodérision dans ce petit livre touchant et attachant. Beaucoup de mélancolie aussi, un ton désabusé, une désinvolture délicate et un questionnement profond à travers un regard, des petites touches sur le couple, nos états d'âme d'hommes et de femmes contemporains. Tout y passe : la solitude, la fidélité, le libertinage, les ex, l'ennui, l'humiliation, les ruptures, l'attente et le désir, le besoin de sexe et le manque, les petits arrangements avec nous-mêmes... La Patience des buffles sous la pluie, de David Thomas (Le Livre de Poche) est un bréviaire tendre et percutant qui lira loin. 

  • Montlouis-sur-Loire

    Quelle douce, vive et belle appellation. Montlouis-sur-Loire ou la gloire du cépage chenin né sur un sol argilo-silicieux et un sous-sol de tuffeau. Montlouis-sur-Loire ou l'expression de vins blancs (nous n'évoquerons que les tranquilles, aujourd'hui) minéraux aux arômes d'acacia, de coing, de giroflée... De jeunes vignerons y travaillent de mieux en mieux et produisent de grands blancs séduisants, certains en agriculture biologique, filtrés ou non; avec un peu de soufre quand même! (disons-le une fois pour toutes : c'est indispensable. Sans soufre, pas de bon vin). L'AOC, située en amont de Tours, aux confins de la Loire et du Cher, couvre trois communes : Montlouis-sur-Loire, Saint-Martin-le-Beau et Lussault-sur-Loire et environ 400 ha de vignes.

    Voici ma sélection parmi un certain nombre de cuvées dégustées récemment :

    premier-rendez-vous.jpegLise et Bertrand Jousset produisent Premier Rendez-vous 2011, un vin vivant, pourvu d'une grande fraîcheur et d'une franchise minérale remarquable. Premier Rendez-vous exprime la philosophie bio de ses concepteurs : des sols vivants, une vigne vivante, une vie animale, un laisser-faire contrôlé et une conviction chevillée au corps. Un rien canaille, c'est un vin de clin d'oeil au fond du jardin, autour d'une plancha entre copains et copines. 13€

    Coralie et Damien Delecheneau produisent Clef de Sol 2010, à Laclef-de-sol-montlouis.jpeg Grange Tiphaine, à partir de vieilles vignes (80 ans, rendement faible d'environ 33 hl/ha). Là aussi, il s'agit d'un vin bio (Ecocert) d'une très belle minéralité en bouche -qui se décèle au nez. La douceur est cependant le mot qui peut également résumer ce blanc aux flaveurs soutenues de poire, d'abricot, de pomelo et de pain d'épices. 14€

    montlouis-chidaine-bournais.jpegFrançois Chidaine produit Les Bournais 2009, une cuvée issue d'une parcelle de son domaine, lequel domine la Loire. Le vignoble est conduit en biodynamie. Les vignes sont jeunes et donnent une jolie nervosité à ce vin (mis en bouteille il y a pile un an) doté d'une puissance aromatique qui s'exprime à travers des arômes classiques de poire et de coing et aussi une note truffée délicate. C'est également rond, gras et plein. Très belle longueur en bouche avec une finale persistante de plusieurs caudalies. 19€

    Vincent Girault donne Clos de Volagré 2011, cuvée du Clos de la Briderie (Ecocert, ClosdeVolagre2008detoure.jpegDemeter). C'est d'un vin à l'équilibre acidité/minéralité remarquable et au rapport qualité/prix méritoire. Son vigneron le qualifie de vin de fruit en bouche. Au nez, il exprime l'acacia, le miel et le coing. Vin de soif, d'apéro et d'amitié, c'est d'un montlouis-sur-loire sans chichis qu'il s'agit. Comme on les aime. 7,60€

    images.jpegValérye Mordelet offre La Nef des Fous sec 2010, cuvée remarquable de son Domaine Les Loges de la Folie. C'est mon chouchou, je ne m'en cache pas. De vieilles vignes (70 ans) conduites en viticulture bio (Ecocert), un sol labouré avec un cheval (nommé Taga je crois), des vendanges manuelles bien sûr. Le résultat? -Un miracle de rondeur et de minéralité, de fraîcheur et de droiture sans sècheresse ni agressivité. Ce vin possède à la fois un côté tendu et un autre d'une souplesse confondante -effet double que l'on recherche souvent. C'est d'un blanc aux arômes de fruits (abricot, pêche blanche, pamplemousse rose, mangue) d'une grande franchise et très séducteur. La Nef des Fous (pensez à la peinture éponyme de Bosch) enveloppe, provoque, emballe. C'est par ailleurs un vin de longue garde. Avec ma recette toute simple de dos de cabillaud rôti - chorizo - tomates cerises - ail - huile d'olive, au four dix minutes, ce flacon fut souverain. téléchargement.jpeg12€

    Suggestions d'alliances : Poissons blancs de rivière, poissons nobles de mer (sole, cabillaud, turbot), coquilles Saint-Jacques, fromages de chèvre frais, Comté de 12 et 18 mois, cuisine asiatique sweet & sour, charcuterie simple (bon jambon blanc à l'os et au torchon).

  • Réflexions Masterclass

    images (3).jpegGiorgia Fiorio, célèbre photographe, a créé Réflexions Masterclass en 2002. Associée avec Gabriel Bauret, leur démarche constitue un singulier laboratoire dans le domaine du questionnement de la photographie et de sa pratique. Laboratoire d'idées, université nomade, pépinière de talents (jeunes, en devenir ou confirmés) révélés dans de nombreux pays, Réflexions Masterclass a hissé une centaine de photographes dont l'écriture, la démarche forment un corpus à la fois cohérent et protéiforme. La richesse des photos publiées dans ce gros livre (Actes Sud) est impressionnante. Comme l'est également la teneur des contributions écrites, qu'elles émanent de plumes célèbres comme Régis Debray (sur le concept de frontière -lire à ce propos son petit livre éponyme, repris en folio) ou de spécialistes de la question connus seulement dans leur milieu ou dans leur pays : Jean-Luc Monterosso, Victor I. Stoichita. Les textes des coauteurs eux-mêmes : Giorgia Fiorio (sur l'événement, l'immédiateté, l'ugence et l'ici-maintenant) et Gabriel Bauret (Parler photographie aujourd'hui?), sont d'une grande richesse. Réflexions Masterclass est tout sauf un workshop. Le livre rappelle le mot fameux de Jean-Luc Godard : Il ne s'agit pas de produire juste une image, mais une image juste. Cela pourrait résumer l'exigence de cette académie peu académique.

    Le livre accompagne une exposition qui se tient jusqu'au 23 septembre aux Ateliers SNCF, dans le cadre des Rencontres d'Arles. 

  • Le bureau de Lorca

    images (2).jpegIl serait commode de dire qu'il s'agit d'un roman à tiroirs. La grande maison, second roman traduit de Nicole Krauss (folio) est pourtant une prodigieuse construction qui présente, entrelace, mêle, démêle quatre histoires gravitant autour d'un bureau ayant appartenu à Federico Garcia Lorca et qui possèderait une âme capable de lier quatre destins éparpillés : à Londres, celui d'Athur Bender qui découvre que sa femme lui a caché une partie de sa vie. A Jérusalem, celui d'un père qui adresse une lettre émouvante à son fils Dov dont il n'a jamais su être proche. A Oxford où une Américaine, Isabelle, venue étudier outre-Atlantique, tombe éperdument amoureuse du fils d'une étrange antiquaire dont l'existence est dédiée à la restitution des biens juifs confisqués par les nazis. Et le destin du poète Daniel Varsky enfin, qui confie à une certaine Nadia le bureau si particulier. L'écriture envoûtante de Krauss, son sens prodigieux de la construction d'un roman (elle retombe toujours sur ses pattes et ne nous cause aucune peine à suivre l'écheveau de ces histoires) ainsi que sa capacité à ouvrir des tiroirs, à les refermer discrètement, à en laisser d'autres entrouverts, donne à ce roman une dimension mystérieuse singulière. Comme avec son précédent livre L'Histoire de l'amour (déjà évoqué ici l'an passé), on ne lâche pas les pages de cette grande maison.

  • Journaux intimes

    images (1).jpegL'été se prête à la lecture des Journaux intimes d'écrivains. Voici une solide anthologie qui balaye le genre -car c'en est un, concoctée par Michel Braud, spécialiste de la question : Journaux intimes, de Madame de Staël à Pierre Loti (folio). Il permet de se souvenir que le Journal est un incomparable baromètre de l'âme qui donne ce que le roman ne donne pas encore. Arrière-boutique du work in progress, il en est aussi le laboratoire, le brouillon magnifique, la chambre des débats intérieurs, y compris lorsqu'il consigne le quotidien et son cortège de faits et gestes d'une banalité qui serait affligeante si elle n'était pas écrite. Produite par un écrivain. Et je pense à ce mot de Robert Kanters (je cite de mémoire) : le roman (en cours) et le Journal sont comme le vêtement et sa doublure et cette dernière est d'une étoffe si fine que l'on peut être tenté un jour de porter le manteau retourné. C'est pourquoi j'aime retourner souvent,  comme on vole dans les plumes, au hasard et à la régalade, au coeur des Journaux des grands diaristes tels que Renard, Torga, Amiel, Bloy, Perros, Juliet, Jaccottet, Kafka, Montherlant, Gide et tant d'autres. Que ces auteurs aient eu conscience ou non de faire oeuvre en l'écrivant -qu'ils aient pensé ou pas à rendre un jour extime leur journal intime.

  • MM

    téléchargement (1).jpegC'est l'année Marilyn. Le cinquantenaire de sa disparition (le 5 août prochain) est l'occasion d'une profusion d'hommages et de la publication de nombreux livres. Parmi ceux-ci, voici la réédition dans un agréable format semi-poche de ces Fragments (Points) qui nous firent découvrir l'année dernière une Marilyn Monroe intime et intello. Histoire de clouer le bec à tous les mysogynes et autres esprits réducteurs enclins à penser hâtivement qu'une blonde pulpeuse ne pouvait posséder le moindre neurone. Les cons. La sensibilité extrême d'une femme fragile et grande lectrice, amie de nombreux écrivains, apparaît au fil de ces pages précieuses qui permettent également de lire ses poèmes (de nombreux manuscrits sont reproduits), ses lettres, son Journal, ses états d'âme et l'ensemble produit un bouquet si délicat qu'on en oublierait le sex symbol; l'inoxydable icône. Une réussite. 

  • Taurines

    téléchargement.jpegSebastien Castella, l'immense torero français (il est Bitterois), l'équivalent de José Tomas en Espagne -les deux figuras les plus importantes du moment- ont en commun le partage du mystère. Austères, fermés, ils ne semblent pouvoir s'exprimer que devant un toro de combat. A coups de quarts d'heure d'une émotion parfois insoutenable de justesse, de lenteur (de temple) et de beauté. Le chroniqueur taurin Jacques Durand dit de l'un qu'il laisse son corps à l'hôtel lorsqu'il va toréer. Il y a de cela lorsqu'on voit l'un et/ou l'autre au centre d'une arène. Un livre magnifique vient de paraître sur Castella, signé Olga Holguin (Actes Sud). Cette photographe a suivi le torero pendant plusieurs années. Son livre tire la quintessence visuelle de l'art toreo du maestro. Des textes de grande teneur accompagne ces photos d'une sensibilité de chair de poule, signés Arevalo, Durand, Diusaba. Et des huiles de Robert Ryan enveloppent l'ensemble. Un beau livre; vraiment. 

    images.jpegLe peintre Gardois Jean-Pierre Formica livre quant à lui ses Carnets taurins (Actes Sud, préface d'Alain Montcouquiol), réalisés à main levée pendant les corridas de Nîmes et d'ailleurs. Une sélection drastique de ses dix mille dessins à la craie et au fusain nous est proposée, qui choisit de traduire le mouvement, la durée, la retenue, l'instant où le temps semble se taire au détour d'une passe et au coeur de la chorégraphie particulière que livrent sous nos yeux un homme et un fauve. Il est question de geste dans ces dessins et du fameux silence sonore du toreo dont parlait le grand José Bergamin.

  • A lire sur lemonde.fr

    Une tribune sur le 5 juillet 1962 à Oran : cliquez sur le lien ci-dessous pour pouvoir la lire (ou bien vous allez sur le site du Monde) : 

    http://www.lemonde.fr/idees/article/2012/07/05/5-juillet-1962-souvenir-du-massacre-d-oran_1729190_3232.html


    En version papier (texte légèrement raccourci), cela donne ceci (page 15), mais une grève empêche Le Monde de paraître aujourd'hui. En vieil aficionado indécrottable de la presse écrite, je râle de ne pas pouvoir tenir le journal entre mes mains...

    LE MONDE 6:7:12.pdf

    hp_scanDS_127613331936.jpg

     


  • L'homme-livre, l'écriture du désir et les jeux littéraires

    images.jpegVoici une biographie, une vraie, signée Bernard Fauconnier, inédite et qui paraît directement en poche (folio) sur l'immense Flaubert. L'auteur avait déjà donné un Cézanne qui fut remarqué. Voici l'homme-livre décrit par le menu de l'oeuvre, chronologiquement, avec force documents, masse d'informations et dans un style captivant. On ne lâche pas ce petit bouquin une minute. Et l'envie de reprendre la Bovary, l'Education, les Trois contes, Salammbô et surtout la Correspondance est forte. Car Fauconnier nous prend par la main et nous fait cheminer à côté de Flaubert. Nous ressentons les atermoiements de Gustave, ses joies et ses peines, ses amitiés, ses déconvenues en amour et jusqu'à ses chaudepisses! Nous voyageons en Orient, nous allons par les champs et par les grèves en Normandie et ailleurs, nous compatissons pour lui lorsqu'il souffre de réécrire La tentation de Saint-Antoine, son obsession, lorsqu'il est couvert de lauriers ou bien de dettes, louangé ou bien laminé par une presse vengeresse ou encore vilipendé sournoisement par les précieux ridicules frères Goncourt. La maison de Croisset nous devient aussi familière que Louise Colet, George Sand, Alfred Le Poittevin et plus tard le jeune Maupassant, Maxime Du Camp, Sainte-Beuve, Tourgueniev. Nous vivons sa prodigieuse boulimie de vie et surtout cette rage d'écrire majuscule, cardinale. Nous entrons dans l'intimité de la table de travail de l'homme-plume, de l'ogre des Lettres; et l'on s'y sent bien.

    Signalons, dans la collection folio biographies, un Maupassant, signé Frédéricimages (2).jpeg images.jpeg Martinez, et un bienvenu florilège de l'auteur de Bel-Ami, Contes au fil de l'eau (folio 2€) dans lequel un bonheur intact nous fait retrouver les pages denses de textes courts et forts comme Amour (in Le Horla) , Sur l'eau (extrait de Une partie de campagne), ou encore En mer (dans Les contes de la bécasse).

    En folio essais, il faut lire le précieux petit ouvrage de Belinda Cannone, L'écriture du désir, si la chose écrite et les ressorts qui la font naître intéressent un tant soit peu. L'écriture du désastre à partir du désastre est incontestable : le malheur pousse à l'écriture; grosso modo. Mais le bonheur aussi! lance l'auteur, qui se livre à un panégyrique de l'écriture heureuse, de et à partir de la joie, de notre volonté d'étreindre -le monde, la réalité rugueuse ou douce. Le même mouvement qui me pousse vers images (1).jpegune peau m'incite à essayer d'écrire le goût de cette peau, la forme de mon désir, et le plaisir est grand de chercher, de trouver les mots pour décrire la chose minuscule et immense, l'élan de l'être. La narration du désir, y compris érotique, occupe cet essai sensuel dans les grandes largeurs.  Comment édifier le bonheur à partir de notre connaissance du désastre? demande Cannone. Je crois la richesse de la langue miraculeuse, dit-elle. Grâce à elle, le mouvement d'écrire est une étreinte et une célébration. Même lorque les mots disent l'ombre, l'effroi et la souffrance. 

    Enfin, je me réjouis d'évoquer brièvement un petit bouquin (folio 2€) promis à un grand succès et à offrir sans modération : Jouons avec les mots est un recueil de jeux littéraires concocté par Julie Pujos et images (3).jpegqui revigore l'esprit, notre mémoire des oeuvres, des dates, des pseudos d'écrivains, des Prix, des lieux, des personnages de romans, des incipit, du subjonctif imparfait... Tester ainsi ses connaissances littéraires est littéralement jouissif. On y joue comme avec un quizz ou avec un psycho-test sur la plage. Et l'on se casse parfois les dents avec un certain délice, si-si!