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  • Fermer son blog


    C'est Alina Reyes qui m'a alerté l'année dernière. Elle fermait le sien, convaincue du gâchis de la chose, parce qu'une armée des ombres pompe la substance des blogs comme autant de sangsues sans vergogne. En toute impunité, à la manière des pillards sur un champ de bataille. A se demander si Yannick Haenel, accusé par Aline Nardone, "survivante" d'Alina Reyes, d'avoir plagié le dernier roman de "feue" Alina Reyes, n'a pas construit son Cercle (Gallimard) à partir des coupes de Forêt profonde (Le Rocher) qu'Alina donnait, innocemment, sur son propre blog (qu'elle vient de rouvrir pour l'occasion, ai-je appris). Je l'ignore, n'ayant lu aucun de ces deux ouvrages. La polémique n'a pas eu lieu, comme elle a surgi entre Camille Laurens et Marie Darrieussecq (et leur éditeur au milieu, P.O.Laurens). Alors? Fermer son blog or not. J'avoue que certains jours, je donne à manger à mon chien (c'est ainsi que je désigne le fait d'ajouter une note ici même) en étant saisi d'un sentiment pregnant de vacuité, d'inutilité, qui ne s'apparente, hélas, ni à un acte gratuit, ni à un geste surréaliste; mais à rien. Sauf à un lancer d'avion en papier, comme on continuera encore d'en faire longtemps dans les écoles primaires. Chacun sait plier la feuille. Lancer, c'est autre chose. Jamais nul ne sait à l'avance si l'avion de papier piquera du nez aussitôt ou s'il effectuera un joli vol, dont la durée (et c'est beau à cause de cela) n'excèdera pas quelques secondes. Ah! Si nous pouvions faire ainsi des livres de sable, chers à Borgès...

  • Michon l'immense

    1b6c0e74de8a16b342cfc9486c18ed3e.jpegLe grand écrivain des vies minuscules et autres vies de... livre un beau bouquet d'entretiens sur la littérature, donnés ici et là depuis 23 ans et rassemblés par Albin Michel sous le titre Le roi vient quand il veut. Une somme d'intelligence à l'état brut, un feu d'artifies de subtilités sur l'esprit de la création littéraire. Michon confie qu'il "écrit court pour garder intacte l'émotion, le tremblement, d'un bout à l'autre. La longueur de corde impartie au fildefériste est brève", ajoute-t-il. Pierre Michon recherche l'épure du roman, ou du récit, et pense avec Bataille que l'on ne peut s'attarder à des livres auxquels, sensiblement, l'auteur n'a pas été contraint. Si cela était raisonnablement observé par la machine littéraire, les libraires auraient davantage de place...

  • Magnanime

    En feuilletant ce matin les archives de ce blog, ce que chacun peut faire, je reprends cet extrait d'une note écrite le 26 octobre 2006, il y a pile un an : la peinture comme le papier-peint n'ont pas encore besoin d'être changés.
     
    "On devient vraiment majeur en donnant à ceux qui ont lâché les chiens contre nous sans savoir ce qu'ils faisaient le geste de paix nécessaire à une vie par-delà le ressentiment - trop coûteux en énergie gaspillée. La magnanimité est une vertu d'adulte. (...) Serein, sans haine, ignorant le mépris, loin de tout désir de vengeance, indemne de toute rancune, informé sur la formidable puissance des passions tristes, je ne veux que la culture et l'expansion de cette "puissance d'exister" -selon l'heureuse formule de Spinoza enchâssée comme un diamant dans son Ethique. Seul l'art codifié de cette "puissance d'exister" guérit des douleurs passées, présentes et à venir".
    Michel Onfray, La Puissance d'exister, Grasset.

  • De la douceur

    EXTRAITS DOUX :

    La culpabilité est une passion triste, qui ne doit en aucun cas être encouragée. (p.93)

    Toute force réactive hait la douceur et cherche à la remplacer par d'odieux simulacres : la mièvrerie, la niaiserie, l'infantilisme, le consensus. (p.10)

    Les puristes font la gueule, mais les puristes font toujours la gueule.(p.35)

    Les douceurs sont des forces : un enfant sait cela. Souffler la graine des pissenlits. Caresser un caneton. Embrasser la petite fille de ses rêves. Porter un poisson rouge gagné dans une fête foraine. Goûter. Vivre ravit, chavire.(p.50)

    Godard, jadis : on dit faire l'amour, c'est bien qu'il y a une notion de travail. L'amour est une douceur violente, comme l'espérance. Un oxymore, quand  la passion est un simple paroxysme.(p.56)

    La brièveté en poésie n'est pas tant le signe d'une modestie que celui d'un orgueil : il s'agit de parler peu, mais de dire l'essentiel.(p.64)

    Il existe des violences propres à la douceur. Puisqu'elles nous emportent, appelons-les des ravissements.(p.70)

    Il faut, nous dit Barthes, lire Sade selon un principe de délicatesse. A vrai dire, c'est toujours ainsi qu'il faut lire. La lecture est la plus subtile, la plus tendre, la plus raffinée, la plus raffinante de toutes les activités.(p.74)

    ©Stéphane Audeguy, Petit éloge de la douceur, folio 2€ 

  • Dépêchez-vous...

    ... De lire la tribune signée par l'avocat Alain Weber et que publie Le Monde daté d'aujourd'hui (page 19) sous le titre : "Amis Anglais, merci d'avoir gagné!", car elle est brillante et salutaire.

    Le chapô du papier, seulement (à vous de voir la suite) : "L'échec français met fin au hold-up de Sarkozy sur la Coupe du monde de rugby".

    Je me marre...

     

  • Revue de presse

    Note spéciale autopromo

    A lire ce matin :

    Dans VSD, pages 78 à 81, mon reportage rugby sur Saint-Vincent de Tyrosse, village Gaulois. Ou plutôt Gascon. Résistant, le village Landais enfante des champions depuis des lustres. Question de microclimat, affirment les hommes du club. Reportage aux sources du rugby, donc, dans le village d’Astérix le rugbyman. Là où, précisément entre la place du Foirail avec la 10 dans le dos, le bar Beneyx et le stade La Fougère, se trouve l'âme du rugby hexagonal.
    Il y avait longtemps que je voulais le faire, ce papier... Oui, cela fait bien 30 ans que j'entends parler de Tyrosse le crot à bons joueurs, alors té! Voilà la copie (réduite de moitié pour la maquette étriquée de l'hebdo, mais je garde au frais mes chutes et autres bons -pas bas!-, morceaux pour une autre fois).

    Dans Le Nouvel Observateur, Paris-Ile de France, pages 30 à 32, mes idées de balades gourmandes en famille, dans le 77 et dans les Vosges, à l'occasion de la Semaine du Goût (dans le Spécial Junior de ce numéro). 

    Sinon, on commence à lire ici et là des bonnes feuilles des Mémoires de Sollers, qui arrivent le 25 chez Plon, après la Finale et avant la fin du tumulte des prix littéraires d'automne.

    La Une de Libé est drôle : Desperate Housewife (à propos du divorce des Sarko). J'adore.

  • Bouche

    "Il fait bon savoir que les oenologues distinguent, au sein de la complexité d'un vin : la robe, le nez, la bouche. Et que la bouche, par exemple, comporte trois temps : l'attaque, le milieu, la finale. Ces finesses de langage correspondent à une finesse pratique du sensible et sont un salutaire appel à la lenteur des dégustations, qu'il n'est aucune raison de ne pas étendre à l'ensemble des objets du monde sensible. La haine petite-bourgeoise à l'encontre des finesses de vocabulaire, de sensations des amateurs de vins et, d'une façon plus générale, à l'égard de toute différence, est proprement terrifiante." Stéphane Audeguy, Petit éloge de la douceur.

  • Jardins

    "Et n'oubliez pas le jardin, je vous prie, le jardin aux grilles dorées. Et entourez-vous d'hommes qui soient comme un jardin, ou comme une musique sur l'eau quand le soir tombe et que le jour n'est plus qu'un souvenir. Choisissez la bonne solitude, la solitude libre, capricieuse et légère, celle qui vous accorde aussi le droit de rester bons en quelque manière." Nietzsche, Par-delà bien et mal.

  • Le Vieux-Port aller/retour

    TGV Paris-Marseille A/R, avant-hier et hier. Alors j'ai lu... Le somptueux Rafael le chauve, de Jacques Durand, sur El Gallo, torero couard et légendaire, magnétique et drôle des années d'avant, avant... (Actes Sud).

    Le délicieux et si délicat, subtil même Petit éloge de la douceur de Stéphane Audeguy (auteur de l'inoubliable et magique Théorie des nuages), les 2 en Folio, le premier en Folio à 2€, ce qui est encore mieux.

    L'énigmatique et violent Hommes entre eux de Jean-Paul Dubois, d'habitude si gracile et léger, désinvolte et aérien (L'Olivier).

    Entamé -enfin!- La Reine de pommes de Chester Himes (folio noir),

    et parcouru, en baîllant grave, le dernier Modiano ainsi que l'inutile et sénile opus sur Hitler môme, signé Norman Mailer, lequel s'achève mal, le pauvre. En plus, le titre (de son éditeur français) est si gracquien (Un Château en forêt. Il fallait oser!..) qu'une telle usurpation, un tel squatt, me dégoûtent définitivement.

    Heureusement, entre deux, il y eût le Vieux-Port, des balades, le "ferry-boîte" pour aller de la Mairie à La Marine (le bar), un apéro ici, un truc là, un dîner inoubliable au "29", Place aux Huiles, à l'angle de la Place d'Etienne-d'Orves où siègent le journal "red" La Marseillaise et Les Arcenaulx des soeurs Laffitte,  éditrices-librairistes-galeristes-restauratrices-amatrices-souriantrices (j'ai juste embrassé Jeanne en passant : c'était complet!).  Le "29" inaugurait ce soir-là (avant-hier) : le mecton est un bon, qui fit ses classes chez les plus grands, comme Ducasse etc, et qui officia comme second de Lionel Lévy pendant pas mal d'années (Une table au Sud, the best of Marseille à mes yeux, que je dopais comme "meilleur espoir de l'année" il y a 4 ou 5 ans je ne sais plus, lorsque je dirigeais les rédactions de GaultMillau). Là, il vole de ses porpres ailes, le minot, en mâtinant néanmoins sa carte de chimie "mode" façon Ferran Adria sous-titrée par Hervé This (la description, orale, des plats, par un mec fin et vif, pas con, cependant, m'a quand même donné l'impression de lire un devis de révision de ma bagnole), mais ça reste bien, et surtout bon (aïoli reloaded, sepias bien aliacées, et un Domaine Sorin, vin de St-Cyr-sur-Mer, à tomber...).
    Les coquillages en veux-tu-en-voilà chez "Toinou" (Canebière, au début à droite après l'Opéra, tu vois?) furent comme d'hab' formidables (araignée, oursins, tout le truc, le vacqueyras blanc en cuvée toinou -les yeux fermés tu prends, etc).

    De quoi oublier modianiania, mailerdeseretireràpetitspas, gars! l'Iran et Poutine, Cécilia qui se retrouve être la SEULE femme de France à ne pas pouvoir divorcer (lire Libé d'aujourd'hui) , la petite finale, la grisaille du ciel parisien cet aprèm, et mon téléphone qui déconne. Bisous

  • Chabal, les toros et Paquito

    ef366ad9eb30c20aac09732056965a37.jpegLe Hmmmmm… poussé par le public des stades lorsque Sébastien Chabal prend le ballon ovale et le Hooouuuu… que celui des arènes pousse lorsqu’un énorme taureau jaillit du toril, ont partie liée. Ils expriment la nostalgie des origines. Il semble révolu le temps  métrosexuel où le monde n’avait d’yeux que pour David Beckham et ses clônes ou pour les éphèbes du Stade Français propres et nets, façon pub pour produits de beauté masculins. Voici revenu le temps de l’homme des cavernes, de ce fond d’animalité qu’on croyait disparu au cœur de la nature humaine, urbaine et lisse. Une soif de Sauvage gronde dans les tribunes des stades de rugby, à la faveur d’une Coupe qui sacre la force davantage que la tactique. Elle ne doit pas être confondue avec la sauvagerie mâtinée de haine ayant cours dans certains stades de foot. Aux corridas, c’est pareil : la corpulence d’aurochs est admirée. Il faut du brutal et du costaud partout. De l’être préhistorique. Des cheveux longs, de la barbe, des carrures sorties de la BD Rahan. Les ados surnomment Chabal Hulk. En trois mois, le rugbyman est devenu une star absolue, à son corps défendant. Passé du stade « inconnu au bataillon » au statut de people du Stade de France. Cet engouement est de bon aloi. En exultant, les spectateurs (certains se déguisent en Chabal) expulsent cette part manquante d’une société où le politiquement correct cerne, puis noie toutes les strates du comportement. Et il ne s’agit66158a2241dc4df6d6f5832de759990a.jpeg pas de violence, mais de joie. Celle de projeter sur un athlète au look antique les fantasmes de combats âpres et loyaux. Chabal est là pour enfoncer une ligne adverse, mais c’est un combattant armé de respect. Dans l’arène, le frisson provoqué par un de ces taureaux échappés d’une gravure de Goya, renvoie à un temps finalement cyclique. Rien n’est jamais irrémédiable, sauf la mort, nécessaire, du taureau. Les opposants à la corrida, dont le lobbying est plus puissant lui aussi, ne feront pas de différence entre une bête effilée comme un sanglier corse et une autre surarmée accusant 600 kg sur la balance. Donc, qu’importe. Avec un « toro-aurochs » le combat est plus dur, plus équitable. Et le respect reste l’arbitre de chaque corrida. Le public réclame davantage de spectacle, des jeux du cirque. Rome ! Il espère que Chabal prendra le ballon à chaque percée bleue. Qu’il envisage de faire un tour chez le coiffeur-barbier devient une rumeur nationale. La menace d’interdire la corrida aussi. Ce retour à l’âge de fer ou de pierre, à l’heure où les ours blancs luttent pour leur survie sur une banquise fondante, est salutaire. Il exprime une résistance. Une morale ded4120b9e133739f2df5255d05aa88493.jpg la solidité. Une éthique homérique. podcast

    Et le plus savoureux est que Chabal et les beaux taureaux se retrouvent unis dans la ferveur, lorsque à chaque match de rugby, les  « bandas » (ces orchestres de rue sont tous du Sud-Ouest : ceci explique cela) entonnent, comme à chaque corrida, Paquito chocolatero, ce paso doble taurin symbole de fiesta, de feria, de gaîté partagée et de rassemblement, toutes origines confondues . Car c’est un hymne à la joie qui met immédiatement le feu du bonheur et qui n’a pas la morgue guerrière de la Marseillaise ni le ton rogue et  mortifère de la Lettre de Guy Môquet. Il soulève les foules. ¡Ola !  Léon Mazzella

    PS : je devrais citer aussi Vino griego, fameux chant de fin des fêtes de Dax, tous foulards rouges tendus à bout de bras dans les Arènes d'abord, lorsque toutes les bandas sont dans le ruedo, et qui marque -à l'instar de Pobre de mi à la fin des Sanfermines, les fêtes de Pampelune-, le début de l'attente : à partir de ce chant, il ne reste plus qu'un an à tirer avant de revivre l'ouverture des Fêtes!.. Vino griego est aujourd'hui souvent donné (mais peu entonné) dans les stades (pendant cette Coupe, c'est le cas) et ça réchauffe les coeurs. Moi, ça me rappelle chaque fois Dax, en particulier la fin de Toros y Salsa de septembre 2002. Les larmes aux yeux je te dis, oui!..

    Photos : Chabal, avec ou sans cheveux, ne produt pas le même "impak".

    Toro de Osborne.

    Lien media : Paquito chocolatero, à écouter en lisant ce papier. (Pour écouter Vino griego, rendez-vous sur radioblogclub.com : zik seule, ou bien sur UTube : ils ont la video en plus!)

    ¡Olé!

     

  • Avé sagesse, té!

    "Ce matin, allons, il faut sécher nos larmes, savoir remercier nos joueurs, et se draper de dignité ( pour le coup, de grâce, ne cédons pas à la franchouillardise) avant d'aller doucement chuchoter à l'oreille en chou fleur de toute une équipe dévastée de chagrin, ces mots de Jean- Pierre Rives "le rugby est l'histoire d'un ballon avec des hommes autour; et quand il n'y a plus de ballon, il reste l'essentiel, les hommes. "...(Benoît Jeantet)

    Source : http://www.rugbymane.blogspot.com/ 

  • Le Roi Cophetua

    En écho à Quignard (lire plus bas) :

    Je restai éveillé auprès d'elle assez longtemps. Le sommeil d'une femme qu'on regarde intensément conjure autour d'elle une innocence, une sécurité presque démente : il m'a toujours paru inconcevable de s'abandonner ainsi les yeux fermés à des yeux ouverts.

    Julien Gracq, Le Roi Cophetua, in La Presqu'île (José Corti)

  • Villa Amalia, encore

    confier à l'autre son sommeil est peut-être la seule impudeur
    laisser se regarder en train de dormir, d'avoir faim, de rêver, de se tendre, de s'évaser, est une étrange offrande
    une incompréhensible offrande

    (...)

    le jour s'était levé. de sa vie jamais Ann n'avait dormi si longtemps qu'auprès de cet homme.

    Pascal Quignard, Villa Amalia, Folio 

  • Rien, rien, rien...

    La vie ne vaut rien rien
    La vie ne vaut rien
    Mais moi quand je tiens tiens
    Mais moi quand je tiens
    Là dans me deux mains éblouies
    Les deux jolis petits seins de mon amie
    Là je dis
    Rien Rien Rien
    Rien ne vaut la vie
    Rien rien rien…
    Rien ne vaut la vie.

    (Alain Souchon) 

  • Gracq, toujours

    Une lettre de lui, ce matin.

    Un plaisir, toujours.

    Rare.

    Compté, désormais.

    22 ans déjà que je collectionne ses lettres. 

    L'écriture tremble davantage (97, 5 ans).

    J'ai peur.
    Une vraie peur.


     

  • Cardiff-Procida

    f24ea31d5c5868e83242b580cf15fc42.jpg16e18622a42b7425f6a0a8d13d792a17.jpgProcida la magnifique, la sereine, quelques heures avant le match contre les Blacks (© photos L.M.). Ici, dans la Baie de Naples, le rugby est un mot que l'on n'a pas encore pensé à traduire dans les faits. Il planait sur l'île une atmosphère  pré-apocalyptique, samedi 6. Les goélands étaient devenus fous, qui prévenaient sans le vouloir les humains de l'imminence d'une catastrophe. Un orage, une armée d'orages se préparaient au large du Vésuve et au-delà de la  mer en direction de nulle part, vers d'insensés horizons qui froncaient. Déjà, les éclairs zébraient, marbraient le ciel qui prenait une couleur d'étain. La mer était du plomb fondu, le sirrocco soufflait fort et la pluie, si rare ici, vint. Violente, frappante, abondante, elle acheva de désaler ma peau qui avait plongé avec tant de volupté, à la plage del Pozzo Vecchio, surnommée plage del Postino (le film). Bien longtemps après la victoire des Bleus sur les Blacks (suivie à grand'peine sur le petit écran de télévision de l'hôtel), les éclairs continuèrent de blanchir la nuit et le tonnerre de gronder entre les parois de la baie de la Corricella aux larges bras en  arc, à la manière d'un crabe qui  voudrait retenir pour toujours tous les bateaux au havre de sortir. Le lendemain, hier, lavée, Procida semblait endimanchée, les joues roses, prête à faire un tour de balançoire dans le parc, baignée  par une jeune lumière d'automne, aussi douce que l'était la mer, où l'on entre en octobre comme en août. Le soir, au Stade de France®, je  voyais des Pumas  bouffer du chardon comme le font les ânes : avec gourmandise et cela ne manqua pas de piquant. Effeuiller brutalement la Rose sera plus compliqué, avec un Jonny Wilkinson revenu aux affaires, sauf à saboter son pied d'ici là. Mais ce serait déloyal, avouez... Le plus couard serait de le "concasser" comme dit Chabal, pour venger Betsen qui s'emplâtra Rocococko pleine poire. Alors :  ¡Vaya con dios! Et que le plus inspiré gagne.af02d1bdee274e194332d217a19a95ab.jpg

     

     

  • Xira et sa Tupiña


    Voici la fin du papier que vous pouvez lire in extenso dans Maisons Sud-Ouest actuellement en kiosque.

    "Si l’on bardait Xiradakis avec les éloges qu’il ramasse chaque semaine à la pelle, dans la presse du monde entier, il tiendrait à la fois de la poularde demi-deuil qui fleure bon la truffe en surnombre et du général argentin ou soviétique des grandes années, aux épaules cuirassées de médailles. Quelques exemples : meilleur bistrot du monde en 1994 par l’International Herald Tribune, restaurant de l’année 1995 dans le Times, La Une du New York Times en 1997, classé parmi les 50 meilleurs restaurants du monde par Restaurant, magazine grand-breton, classé parmi les 10 restaurants « qui jouent le mieux avec le feu » au monde par Gourmet, magazine américain. Parfois, c’est drôle et Xira en rigole de bon cœur : en 1996, il est élu homme de l’année dans sa discipline, la cuisine, par  le Times de Londres, aux côtés de Tony Blair pour la politique et de Jonathan Davis pour le sport !.. Rien ne semble cependant capable de tourner la tête de Xira, qui garde au fond de lui, confit dans une couche de sagesse, une solide sérénité face aux paillettes et que je veux nommer simplement intelligence. Celle qui pétille en permanence dans ses yeux derrière les carreaux de ses lunettes. Bien sûr ça lui fait plaisir ! Qui resterait de marbre face à tant d’éloges ? Xira cultive l’autodérision comme d’autres l’orgueil. C’est dire. Xira s’est toujours méfié des trompettes de la renommée, si justement nommées !  Avec un mot qui commence comme tromperie et qui finit comme tripette, comment ne pas fuir ? Xira mégalo, cabot, fanfaron ? Xira séducteur de journalistes ? Cent fois je l’ai entendu et lu. La vérité, c’est qu’il s’en fout, pourvu qu’il puisse encore trinquer avec ses vrais amis, faire sourire une jolie fille. Xira est avant même d’être cuisinier, un homme du plaisir, du partage, de confiance, d’amitié, de fidélité, de dévotion, de transmission et d’amour. Jean-Pierre Xiradakis n’a jamais pris la grosse tête. D’ailleurs, elle « chausse » du 58 dans le casque qu’il pose dessus (j’ai vérifié) avant d’enfourcher son scooter rouge vif, façon Alfa Romeo, pour traverser la ville et rejoindre plus vite un copain dans un bistro. Car l’homme est avant tout un marcheur invétéré. Auteur du  « Piéton de Bordeaux », qui offre 10 itinéraires puissamment découvreurs à celui qui sait laisser ses préjugés sur « Bordeaux-ville-fermée-et-gniagniagnia », qui sait ralentir son pas, lever les yeux, soupeser le poids de l’histoire, le détail d’un balcon, l’originalité d’une façade, la confusion des genres. Notre homme est un infatigable useur de semelles. Il arpente le vignoble comme il prend les Landes à bras le corps jusqu’à Sainte-Eulalie. En plein Vinexpo, cette année ! « J’avais besoin de faire le vide. Cette effervescence, ça me foutait le bourdon. » Avec son vieux complice Jean-Marie Amat, ils ont marché des journées entières dans des conditions parfois difficiles et sur des reliefs peu amènes ; y compris désertiques. Marcher, toujours marcher. Pour se retrouver, mettre tout à plat, garder la tête froide et repartir de plus belle, le « gniac » de la vie, la vraie, chevillé au corps et à l’esprit. Xira le touche à tout (sauf à la copine d’un copain !) donne dans l’écriture : il faut lire son « Bordeaux l’héritière » et sa « Cuisine de la Tupiña ». Il donne dans la radio sur France Bleue, dans la télé à l’occasion, il exposait ses photos à l’Office du tourisme en juin dernier. Lorsqu’il n’est pas à La Tupiña, il se fait l’ambassadeur des produits du « grrrrand » sud-ouest qu’il aime viscéralement depuis sa naissance rue Lafontaine. Et passe une semaine à New York pour cela s’il le faut !
    Alors c’est vrai qu’une rando à pied en sa compagnie dans les rues méconnues du « Bordeaux de Xira », du côté des « Capu », de la rue Elie-Gentrac, de Saint-Michel dans les coins, peut ressembler à une présentation en règle de ses copains fournisseurs ou pas, d’ailleurs. Du genre : je vous amène des journalistes. C’est précisément là que réside la générosité du bonhomme, que d’aucuns (encore eux !) confondraient avec de l’opportunisme déguisé. Sous-genre : j’avance toujours, pedibus cum jambis, dans les rues de ma ville, chaque matin dès 8 heures, précédé de mon ventre (fais un peu gaffe, Jean-Pierre) et suivi d’une Cour « Pressée ». Après tout, l’Ambassadeur number one des produits authentiquement sud-ouest fait son boulot. Et bénévolement en plus. Sa ville le lui rend bien. Comme le Candide de Voltaire cultivait son jardin, le faux Candide Xira, en vrai bretteur gascon, sait cultiver ses connexions.  On le dit large avec « qui il faut ». Paroles de mauvaises langues, donc de mauvais palais. De buveurs d’eau. Xira a toujours su de quel côté la tartine était beurrée. C’est tout. Sinon, il n’aurait pas fait cuisinier. Mais taupinier." ©Léon Mazzella
     

  • Le livre-chien

    Je ne me lasse pas de cette phrase, de l'écho qu'elle provoque à chaque lecture.


    "Et si la littérature était un animal qu'on traîne à ses côtés, nuit et jour, un animal familier et exigeant, qui ne vous laisse jamais en paix, qu'il faut aimer, nourrir, sortir? Qu'on aime et qu'on déteste. Qui vous donne le chagrin de mourir avant vous, la vie d'un livre dure si peu, de nos jours". Roger Grenier, Les larmes d'Ulysse, Gallimard.