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  • Dossier Whisky dans L'Express paru ce matin

    photo 2.JPGVoici le papier principal, avec l'un des encadrés. Le reste est à découvrir en kiosque.

    Speyside 

    LE TRIANGLE D'OR DES SINGLE MALTS

    Ou : Des géants au cœur (de chauffe) tendre

    Visiter les diverses distilleries d’une région singulière démontre que la qualité d’un single malt de dépend pas forcément de la taille de la fabrique.

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    L’Ecosse aimante. Ses routes du whisky, dans le nord-est du pays, entre Aberdeen où l’on atterrit, et Inverness au nord-ouest, recèlent une concentration exceptionnelle de distilleries de renom, et d’autres modestes, donc discrètes, soit une cinquantaine environ – la moitié du nombre total des distilleries du pays. Nous sommes dans le Strathspey, à cheval entre les secteurs (Council areas) de Moray et duIMG_3438.jpg Highland. Speyside est le nom donné à l’une des grandes régions du whisky écossais*. Elle doit son nom à la rivière Spey qui la traverse, comme l’autre grande rivière du cru, la Livet, principal affluent de la Spey, avec également la Fiddich et l’Avon. Deux autres rivières, la Finshorn à l’ouest, et la Deveron à l’est, strient cette zone bénie des dieux de l’eau douce. Car, le whisky, c’est d’abord une question d’eau très pure. La région, humide, fertile, si généreusement irriguée, est propice à la production de l’orge, l’autre composante de « uisce beatha » l’eau de vie, en gaélique, qui a engendré le mot whisky. Ce triangle d’or jouit par ailleurs d’un climat tempéré, moins rude que sur les îles du nord ou du sud. Speyside est par conséquent un grand terroir entouré de montagnes, où nichent depuis des lustres de très grands noms du single malt.

    IMG_2987.jpgDouble maturation simultanée

    Grantown-on-Spey, Dufftown, Keith… Sont autant de noms de ravissantes bourgades qui résonnent dans le cœur de l’amateur de single malt du Speyside. Prenons une distillerie au hasard, parmi celles visitées, Aberlour, sise au sein du village éponyme. Elle a de quoi surprendre par le gigantisme des installations. Marque mondialement connue, la distillerie Aberlour fut fondée par James Fleming en 1879. Ici, comme chez de glorieux voisins : Glenlivet, Glenfiddich… Nous sommes au pays des géants de la distillation, là où les alambics sont énormes et nombreux, et les chais longs comme un jour sans scotch. L’obsession de l’eau pure, qui anime le whisky man, s’infiltre jusque dans l’étymologie : Obar lobhair, « la bouche du ruisseau qui murmure », en gaélique, a donné le mot Aberlour. La Lour (bavarder, en Gaélique, en référence au son d’une cascade), coule là, pas loin de la Spey. Et c’est, comme souvent, à proximité ABERLOUR 15 ANS SELECT CASK RESERVE DETOURE.pngimmédiate d’une source d’eau cristalline et d’une pureté absolue, ou du ruisseau élu qui en découle, que la distillerie a été construite. Autre caractéristique d’Aberlour, l’importance accordée au bois des fûts. Les single malt de la maison : 10, 12, 15, 16, 18IMG_3389.jpg ans, qui raflent souvent des médailles d’or ici et là, subissent une double maturation : « double cask matured », pendant au moins douze ans, à la fois en fûts de Sherry (ou de Xérès), espagnols, la plupart ayant contenu du Oloroso, et en fûts de Bourbon, soit américains et ayant contenu du bourbon. A l’inverse de beaucoup d’autres distilleries du Speyside, pratiquant un vieillissement principal, long, en fûts de Bourbon, puis une maturation plus courte en fûts de Sherry, Aberlour a très tôt opté pour la double maturation simultanée, avant de procéder à l’assemblage des distillats. La complexité des arômes des single malt du Speyside reflète ainsi, à des degrés, voire des dominantes divers, des notes de fruits confits et d’épices – signature des fûts de Sherry, et des notes de fruits frais, rouges, et des notes vanillées – signature des fûts de Bourbon. Mais, Aberlour se livre aussi, une fois n’est pas coutume, à des créations élargissant la gamme, qui font montre d’un esprit d’ouverture. Ainsi du A’bunadh (origine, en Gaélique), exclusivement vieilli en fûts de Xérès Oloroso. Il s’agit d’un « brut de fût » (Original Cask Strength) remarquable de puissance et de velouté (mangue, pomme rouge, léger fumé à l’attaque, épicé souple, notes cacaotées, pralinées, à peine tourbées, et de pain d’épices en finale). Une sorte de synthèse du Speyside. 


    IMG_3464.jpgL’obsession de l’eau pure

    L’histoire de William Grant, le fondateur de Glenfiddich en 1887, reflète bien aussi les rapports viscéraux que le distillateur entretient avec l’eau : lorsque, dans les environs de Dufftown, il découvre en 1886 Tobbie Dhu, une source d’eau très pure, William achète aussitôt le terrain qui l’entoure, au cœur de cette verdoyante et sauvage « vallée des Cerfs » (glenfiddich, en Gaélique), pour y bâtir aussitôt lui-même, pierre par pierre, sa propre distillerie, aidé de sa femme et de leurs neuf enfants –et d’un précieux maçon. Mais c’est l’œuvre de son gendre qui distingue cette marque avant-gardiste. Charles Gordon est parti voyager à travers le monde dès 1909 avec sa grande sacoche en cuir de médecin, garnie de trois bouteilles de Glenfiddich, ainsi que de nombreux carnets qu’il noircira scrupuleusement de notes variées fort intéressantes, pour faire découvrir son whisky, de Port-Saïd à Sydney, en passant par Bombay, Rangoon, Shanghai, Hong Kong, ou encore Auckland. Charles Gordon aura roulé sa bosse du commerce à travers les océans, et, ce faisant, l’homme d’un marketing embryonnaire aura fait connaître l’eau de vie écossaise dans son ensemble, en devenant aussi son premier ambassadeur. C’est d’ailleurs en hommage à ce voyage de onze mois, précurseur, de Charles, que son « doctor bag » - nous l’avons vu sur place, fatigué, tout fripé -, a été réédité l’an passé, en édition très limitée, par une jeune artisan du cuir, Edwina de Charrette (atelier « laContrie »). Glenfiddich, la marque au cerf et à la bouteille triangulaire si ergonomique, possède – c’est rare -, sa propre tonnellerie depuis bientôt 60 ans : reconditionnés et « toastés » sur place, les fûts espagnols et américains appuient la signature des single malt maison. Et, singularité totale, le single malt 15 ans est élaboré depuis 1998 selon le principe andalou de la solera, mais dans un foudre. (Après avoir vieilli en fûts américains neufs, il séjourne donc dans un foudre maison en pin de l’Oregon). Epicé, miellé, fruité (vanille, fruits rouges, pâte d’amande, cannelle, gingembre), le « Unique Solera reserve » est vite devenu l’un des best-sellers de la marque. 

    IMG_3397.jpgÉnorme mais bon

    Lorsqu’il fonde en 1824 la distillerie The Glenlivet, dans la Livet Valley, tout près de la précieuse source Josie’s Well (que l’on peut voir, dans le parc de la distillerie), George Smith est loin d’imaginer qu’il est un pionnier qui ouvre la voie des single malts, et que dans ses futurs chais, agrandis à plusieurs reprises, pas moins de 65 000 fûts font aujourd’hui maturer en permanence, les eaux de vie de la célèbre maison. Ces single malt sont les plus consommés aux USA, et ils ont beau représenter la deuxième vente de single malt au monde, « huge » (énorme) est parfois « beautiful ». La forte personnalité d’Alan Winchester, le maître distillateur maison depuis 2009, n’est pas étrangère aux récents et fulgurants succès de la marque, sur nombre de marchés exigeants. Force est de reconnaître que la complexité et la subtilité de la gamme de ces whiskys un brin oxymoriques ne peut qu’avoir rendez-vous avec le bon goût : ils allient puissance et finesse, fougue et douceur. Comme en témoigne le 18 ans, dont on peut remplir et signer soi-même une bouteille, à l’issue d’une longue visite de la distillerie, assortie d’une dégustation – le jour de notre passage en mai dernier, c’est Charles MacLean, l’un des plus grands experts en single malt du monde, et bien connu des lecteurs de L’Express **, qui y animait une master class. Cela s’appelle la proposition « hand fill » : Un must !.. (partagé avec d’autres distilleries, qui proposent le même « clou » de visite).

    Strathisla.pngSmall is beautiful

    La modeste distillerie Strathisla, à Keith, ses petits alambics coniques, c’est le charme de l’ancien. Il s’agit de la plus ancienne distillerie en activité. Bâtie en 1786 par George Taylor et Alexander Mine tout au bord la rivière Isla dont le bruit des eaux torrentueuses berce notre visite, elle est célèbre pour ses flacons millésimés, dont certains sont très vieux et hors de prix, et pour son 12 ans d’âge relativement confidentiel. Mais elle l’est avant tout pour sa production d’une gamme de blended de Chivas Regal (elle fut rachetée en 1950 par Chivas Brothers, et elle est depuis 2001 dans le grand giron du groupe Pernod-Ricard). Et comme le fameux 12 ans d’âge entre dans la composition des blends Chivas, nous retrouvons dans ce dernier ses notes de fruits secs, d’agrumes et de céréale. Cadeau ! La gamme des Strathisla Cask Strength Edition, qui titre près de 60° d’alcool, excelle quant à elle sur les desserts, avec un nez d’acajou et des notes d’abricot, de miel et d’agrumes. Nous avons pu le vérifier au cours d’un dîner spécial accords « cask strength editions » dans la « Chivas Gallery » (les chais de la distillerie), au cours du dernier Speyside Festival. 

    De taille raisonnable mais encore modeste, The Balvenie, située contre la distillerieIMG_3398.jpg de Glenfiddich, est une marque qui a le vent en poupe. La gamme maison exprime une douceur très reconnaissable, qui sculpte son succès. Le Single Barrel 25 ans d’âge, par exemple, vieilli en fûts de chêne américains de second remplissage, sélectionnés avec un infini scrupule, est un whisky très recherché, aux notes d’ananas, de vanille, de miel, d’épices poivrées et de boisé aussi, si caractéristiques de la marque synonyme de saveurs suaves et caressantes. La visite de la distillerie expose sereinement l’artisanat du travail, des greniers à orge aux aires de maltage traditionnel (unique), et il n’y a pas, jusqu’à l’échange de quelques mots avec David Stewart, le maître de chai - un vrai sage du Speyside -, pour nous conforter dans l’idée que des distilleries à taille humaine et à forte personnalité peuvent cohabiter avec des géants au cœur (de chauffe) tendre.

    Léon Mazzella

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    *Avec l’immense région des Highlands, dont il fait partie intégrante (le Speyside se situe entre les Northern Highlands et les Eastern Highlands), les Lowlands, les îles (Orkney, ou Orcades au nord, Skye à l’ouest, et les fameuses Islay, et Jura, entre autres, au sud), et enfin Campbeltown.

    ** Charles MacLean a animé l’an dernier une série de master class « whisky » dans les locaux de L’Express, qui ont rencontré un vif succès.

     

    IMG_2907.jpgAberlour et les accords musicaux

    C’est au cours du dernier Spirit of Speyside Whisky Festival, le premier mai dernier (la prochaine édition de ce « mois du whisky » foisonnant d’activités en tous genres : dégustations, concerts, repas thématiques, dans et autour des distilleries, se déroulera du 21 avril au 1er mai 2017), que nous avons pu faire une expérience singulière à la distillerie Aberlour : deux experts en musiques et en single malts, Joel Harrison et Neil Ridley, les « Cask strength boys », proposaient une sorte de master class intitulée « The Sounds of Aberlour », dont le but était d’associer cinq whiskies maison avec cinq musiques distinctes. Le résultat fut confondant, car il était évident, à la dégustation précise et à l’écoute très concentrée, avec Robinphoto 1.JPG mon studieux voisin de table, que le style du 8 ans d’âge correspondait à la musique planante des Pink Floyd, autant que l’expression du 16 ans Old Bourbon Cask se mariait à merveille avec les airs tonitruants de Johnny Cash. Une expérience. L.M.

     

  • On se croit curieux...

    téléchargement.jpegOn se croit curieux, et nous passons à côté de choses, comme ça, qui sont de petits cadeaux mieux dissimulés que des oeufs de Pâques dans le jardin de notre enfance. Je viens de découvrir (à la faveur d'un message amical et bienveillant), un écho écrit à une émission de radio (cliquez ci-dessous), et je remercie au passage Philippe Vallet, fort tard certes, mais vieux motard que j'aimais, n'est-ce pas. Il s'agit de mon premier roman, écrit à l'âge de 23 ans, soit il y a (putain!..) 35 ans... Purée... Outch, la gifle. Envie donc de partager, car c'est de saison : l'arrière-automne, le givre, les parfums capiteux de sous-bois, la migration qui strie le ciel bellement, l'écharpe diaphane du brouillard de l'aube, tout ça qui fait le sel de l'existence, pour peu que nous la voulions, ou voudrions toujours là, parmi ces plaisirs simples, et surtout naturels, sans aucun artifice. Jamais...

    chasses furtives

  • Bon appétit, Messieurs!

    RUY BLAS - Victor Hugo
    Acte III - Scène 2 :

     

    Ruy Blas, survenant.


    Bon appétit, messieurs ! 

    Tous se retournent. Silence de surprise et d'inquiétude. Ruy Blas se couvre, croise les bras, et poursuit en les regardant en face.

    Ô ministres intègres !
    Conseillers vertueux ! Voilà votre façon
    De servir, serviteurs qui pillez la maison !
    Donc vous n'avez pas honte et vous choisissez l'heure,
    L'heure sombre où l'Espagne agonisante pleure !
    Donc vous n'avez ici pas d'autres intérêts
    Que remplir votre poche et vous enfuir après !
    Soyez flétris, devant votre pays qui tombe,
    Fossoyeurs qui venez le voler dans sa tombe !
    – Mais voyez, regardez, ayez quelque pudeur.
    L'Espagne et sa vertu, l'Espagne et sa grandeur,
    Tout s'en va. – nous avons, depuis Philippe Quatre,
    Perdu le Portugal, le Brésil, sans combattre ;
    En Alsace Brisach, Steinfort en Luxembourg ;
    Et toute la Comté jusqu'au dernier faubourg ;
    Le Roussillon, Ormuz, Goa, cinq mille lieues
    De côte, et Fernambouc, et les montagnes bleues !
    Mais voyez. – du ponant jusques à l'orient,
    L'Europe, qui vous hait, vous regarde en riant.
    Comme si votre roi n'était plus qu'un fantôme,
    La Hollande et l'anglais partagent ce royaume ;
    Rome vous trompe ; il faut ne risquer qu'à demi
    Une armée en Piémont, quoique pays ami ;
    La Savoie et son duc sont pleins de précipices.
    La France pour vous prendre attend des jours propices.
    L'Autriche aussi vous guette. Et l'infant bavarois
    Se meurt, vous le savez. – quant à vos vice-rois,
    Médina, fou d'amour, emplit Naples d'esclandres,
    Vaudémont vend Milan, Leganez perd les Flandres.
    Quel remède à cela ? – l'Etat est indigent,
    L'Etat est épuisé de troupes et d'argent ;
    Nous avons sur la mer, où Dieu met ses colères,
    Perdu trois cents vaisseaux, sans compter les galères.
    Et vous osez ! ... – messieurs, en vingt ans, songez-y,
    Le peuple, – j'en ai fait le compte, et c'est ainsi ! –
    Portant sa charge énorme et sous laquelle il ploie,
    Pour vous, pour vos plaisirs, pour vos filles de joie,
    Le peuple misérable, et qu'on pressure encor,
    À sué quatre cent trente millions d'or !
    Et ce n'est pas assez ! Et vous voulez, mes maîtres ! ... –
    Ah ! J'ai honte pour vous ! – au dedans, routiers, reîtres,
    Vont battant le pays et brûlant la moisson.
    L'escopette est braquée au coin de tout buisson.
    Comme si c'était peu de la guerre des princes,
    Guerre entre les couvents, guerre entre les provinces,
    Tous voulant dévorer leur voisin éperdu,
    Morsures d'affamés sur un vaisseau perdu !
    Notre église en ruine est pleine de couleuvres ;
    L'herbe y croît. Quant aux grands, des aïeux, mais pas d'œuvres.
    Tout se fait par intrigue et rien par loyauté.
    L'Espagne est un égout où vient l'impureté
    De toute nation. – tout seigneur à ses gages
    À cent coupe-jarrets qui parlent cent langages.
    Génois, sardes, flamands, Babel est dans Madrid.
    L'alguazil, dur au pauvre, au riche s'attendrit.
    La nuit on assassine, et chacun crie : à l'aide !
    – Hier on m'a volé, moi, près du pont de Tolède ! –
    La moitié de Madrid pille l'autre moitié.
    Tous les juges vendus. Pas un soldat payé.
    Anciens vainqueurs du monde, espagnols que nous sommes.
    Quelle armée avons-nous ? À peine six mille hommes,
    Qui vont pieds nus. Des gueux, des juifs, des montagnards,
    S'habillant d'une loque et s'armant de poignards.

  • "On ne peut pas connaître, on n'était pas nés!"

    Cette phrase terrifiante, je l'entends souvent dans la bouche de mes étudiants en journalisme, à l'école où j'officie. Ce matin encore, j'évoquais, au détour de mes cours de presse écrite, et d'histoire des médias, de parfaits inconnus, qui se trouvaient dans le déroulé - et absolument pas pour faire du name dropping, mais naturellement parce qu'ils étaient cités pour leur action respective : François Mauriac, Raymond Aron, Jean Daniel, Jean-Claude Guillebaud, et à d'autres occasions Burt Lancaster, Gabriel Garcia Marquez, Miguel Torga, Alain Robbe-Grillet (ok pour les deux derniers), et aussi le slogan de la campagne présidentielle de François Mitterrand, le journal Combat, Pierre Lazareff, Françoise Giroud, et tant de choses de base, soit fondamentales... Pour Albert Londres et Joseph Kessel - le père de Vincent?(Cassel), me fut-il quand même demandé -, il y a eu quelques rares doigts levés, face à ma stupéfaction devant tant d'ignorance de la culture basique de l'environnement immédiat de leur futur métier. Mais la plupart de ces gens et faits, titres cités-là, que dalle! Nul n'en avait entendu parler.

    Il y a pire : cette vague de fond, que sous-tend la remarque qui m'est désormais systématiquement opposée comme une fin de non recevoir davantage que comme une excuse - ce qui serait déjà préférable, discutable (contenue dans le titre de cette note), signifie que la génération Z, et même la Y, sont à l'aise avec leur propre inculture, avec l'inutilité décidée de savoir ce qui s'est passé, grosso modo entre Néanderthal et leur naissance. Autrement dit, le fameux terreau dont parle Julien Gracq à propos de la littérature (laquelle se construit sur les strates qui l'ont précédée), l'Histoire pour faire court, et donc toute la culture, les cultures, en tous domaines, sont jugés, de manière péremptoire et glacée, inutiles, schnock, car tout aurait commencé dans les années quatre-vingt dix. Avant, c'était donc, à les en croire, le Néant, même pas le Big Bang. Le Trou Noir. Rien. Rien d'intéressant et qui mériterait qu'on s'y penche cinq minutes.

    Là, je n'ai pas le temps (ce soir), mais je souhaite initier juste un sujet de réflexion qui exige un sacré développement, une foutue discussion. Car, que ces jeunes fassent désormais l'économie totale de toute lecture est déjà un crève-coeur pour nombre d'entre nous, dont je suis. Qu'ils soient désinhibés, fassent montre d'une nouvelle norme, affranchie de toute connaissance d'avant eux, et qu'ils soient quasiment fiers d'en savoir si peu m'afflige; et me fait même peur. Tous les pays qui n'ont plus de légendes seront condamnés à mourir de froid, nous chuchote Patrice de La Tour du Pin, dans sa Quête de joie... L.M.

     

  • sans la musique baroque, on ferait comment...

    Capture d’écran 2016-11-03 à 23.03.04.pngUne heure et demie d'émotion, de larmes de joie et de regret, soit tout l'esprit des Lachrimae concentré ici, là, un temps sans issue palpable de musique baroque épurée jusqu'à l'os, grâce au talent de Jordi Savall et de son ensemble Hesperion XXI, tout cela en hommage à Montserrat Figueras, la femme disparue de Jordi, la moitié de l'âme de l'ensemble, l'esprit, la jumelle, l'hémisphère de tant et tant d'années, la voix surtout, la voix unique, cette voix entendue "pour de vrai" une première fois un soir divin de septembre 1980 dans une église de Coimbra, au Portugal, et après l'avoir tant écoutée sur les 33 Tours de la Platine... En hommage donc, cette heure et demie de bonheur serein et doux, ça vous dit?.. Et bien allez, zou :

    https://www.youtube.com/watch?v=dJDce7wUwDs

     
     

     

     
  • Sunset Song

    Capture d’écran 2016-11-03 à 00.19.07.pngEnvie, sincère, de partager le plaisir que je viens d'éprouver en regardant ce film puissant, et injustement passé inaperçu. Rustre avec délicatesse, rude et si tendre, cru mais si percutant, vrai, car essentiel avec pudeur et tact, cette histoire d'une femme d'exception, la réalité de la couardise de la Grande Guerre, circonscrite avec justesse, l'amour ingénu et total, la nature écossaise, sauvage mais souple de la région d'Aberdeen (que j'adore, et pas que pour ses whiskies), le jeu émouvant de bout en bout de la très belle Agyness Deyn, enfin... Tout cela en fait, je crois, un film fort. L.M.

    Sunset Song