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  • Vacqueyras blancs

    IMG_0366.jpgL'appellation Vacqueyras -célèbre pour ses excellents vins rouges- ne produit que 3% de vins blancs, mais loin de négliger cela, elle (l'ensemble des vignerons) travaille ardemment à en faire de grands vins blancs des Côtes-du-Rhône. Et ça marche. Récemment, nous en avons dégusté sur place une vingtaine, en 2010 (grand millésime) et 2011 (élégant millésime) et force est de reconnaître que la palette est large, les personnalités saillantes, mais l'esprit, un caractère commun, une identité forte dominent aussi, qui donnent à ces vins un équilibre rare. Dans l'ensemble, la robe de tous ces blancs est d'un jaune éclatant avec des reflets verts. Leur nez est floral (acacia, genêt) avec des touches d'agrumes. En bouche, ils sont d'une grande fraîcheur, d'une belle intensité florale et fruitée (agrumes, fruits exotiques). Ils sont bien sûr plus complexes, plus puissants et plus longs (en arrière-bouche) s'ils sont élevés en fûts. Revue de détail (de ceux qui ont nettement retenu mon attention) :

    vin_vac_blanc.jpeg2010Montirius -dont j'adore les rouges (en biodynamie), cuvée Minéral (grenache, roussanne, bourboulenc) est souple et plaisant (mais j'en attendais davantage), le Domaine le Sang des Cailloux (une star à Vacqueyras) est superbe de finesse, avec son léger boisé tout en délicatesse, sa fraîcheur, un léger gras et une franche minéralité qui achève de nous séduire. Six cépages le composent. Le Clos des Cazaux, Vieilles Vignes, est d'une B10.jpeggrande amabilité, mais il manque de suffisamment d'architecture pour être rond et... carré à la fois. Le Domaine de la Pigeade possède un bel équilibre minéralité-fruité, une belle expression en bouche, une corpulence trop légère (à mon goût). Le Couroulou (courlis, en Provençal), est doté d'un excellent équilibre acidité-minéralité et d'une grande fraîcheur désaltérante et profonde dès l'attaque en bouche. Le rollovervinmelodine.jpegDomaine de la Monardière exprime une touche bienvenue de viognier (20% décisifs, en plus des roussannes et grenaches).

    2011 : Le Domaine Palon explose par son côté grillé-beurré md_5178_46db54a89c0ea0567e38bf072d276f8a.jpegétonnant, mais pas forcément plaisant. Le Clos des Cazaux délivre une belle expression acide-minérale équilibrée. Le Domaine de Montvac (notre chouchou depuis sa découverte, il y a des années pour un papier paru dans L'Obs), cuvée Mélodine, semble très prometteur mais, le matin de cette dégustation, il était "recroquevillé" comme me l'a précisé la charmante Cécile Dusserre elle-même (celle qui le fait). Deux semaines après sa mise en bouteilles, il semblait faire la sieste comme un chat. phpFqoatV_1.jpegAttendons. Le Domaine La Fourmone est plaisant comme vin d'apéro ou de soif. Il a même un côté légèrement doux... agréable. Le vignoble Alain Ignace est une vraie découverte (doublée d'un excellent rapport qualité-prix : 10,50€). Minéral avec ce qu'il faut d'acidité, complexe, une attaque toute en finesse, 40% de viognier pour épauler la fraîcheur du bourboulenc et la structure donnée avec générosité par la roussanne : c'est une réussite claire. Le Domaine La Garrigue jouit d'un bel équilibre général : c'est la bouteille idéale pour découvrir (à 9€ le flacon) la typicité, le caractère, la carte d'identité des vacqueyras blancs.

    Je n'évoquerai pas en détail les domaines suivants : 2010 : Les Amouriers, Domaine Les Ondines. 2011 : Montirius, Seigneur de Fontimple, le Mas des Restanques, Le Couroulou et le Vieux Clocher, parce qu'ils ne m'ont pas conquis -ce matin-là!- et que cela est peut-être dû au vin lui-même, au temps, à ce jour-là, au hasard... Par conséquent, l'humilité oblige au no comment.

    Alliances : une brassée de poèmes de René Char et, au choix, un roman de Giono  (Que ma joie demeure) ou un autre de Jean Carrière (L'Epervier de Maheux). Avec des grillades (agneau) aux sarments, de la caponate, une tarte aux fruits rouges et un cigare léger (robusto de Maya de Selva) pour finir, les pieds croisés, jambes allongées, en contemplant les Dentelles de Montmirail jusqu'à la nuit noire...


  • Crucifiction

    IMG_0633.jpgC'est un lumineux jeu de mots. Nous devons cette touchante faute d'orthographe (l'auteur en commet plusieurs sur ses toiles, en écrivant par exemple détrese pour détresse), à Louis Soutter (1871-1942), peintre autodidacte étonnant dont j'ai vu l'oeuvre (ses peintures "aux doigts" de personnages en mouvement perpétuel sont particulièrement frappantes) à la Maison Rouge (Boulevard de la Bastille à Paris). Crucifiction... Cela fait réfléchir, non?

    (photos volées avec mon téléphone : la toile et le détail).IMG_0632.jpg




  • Joseph Anton et les oiseaux

    9782259214858.gifJe n'ai pas encore lu Joseph Anton, Une autobiographie, de Salman Rushdie qui paraît ces jours-ci chez Plon, mais j'ai lu avec beaucoup d'intérêt les trois pages du Monde des Livres daté d'hier consacrées à son auteur, rencontré le 12 septembre dernier à Londres. L'entretien avec Jean Birnbaum (par ailleurs responsable du meilleur supplément littéraire de la presse quotidienne nationale française), est complété d'éclairages, notamment celui de l'historienne Lucette Valensi.

    Je veux juste reproduire ici quelques extraits de cet entretien et les livrer à votre réflexion  :

    (A propos du 11 septembre 2001, de l'assassinat du cinéaste Théo Van Gogh, de images.jpegl'affaire des caricatures de Mahomet et de l'incendie des locaux de Charlie-Hebdo) : Tout cela fait partie de la même histoire, du même récit fondamental, affirme Rushdie. Mais, en 1989, il était trop tôt pour comprendre de quoi il s'agissait. Personne n'a vu la fatwa comme le début d'un conflit plus large, on y percevait une anomalie farfelue. C'est comme dans Les Oiseaux, d'Hitchcock. Il y a d'abord un oiseau qui apparaît, et vous vous dites : "C'est juste un oiseau!" C'est seulement plus tard, quand le ciel est rempli d'oiseaux furieux, que vous pensez : "Ah, oui, cet oiseau annonçait quelque chose, il n'était que le premier..." Cette comparaison est omniprésente sous la plume de Rushdie, dont le livre bâtit une "onithologie de la terreur".

    images (1).jpeg(...) Vers le milieu de Joseph Anton, Rushdie évoque en particulier une "mouette aux ailes mazoutées qui ne pouvait plus voler". Le mazout, ici, représente la visqueuse tolérance à l'égard de l'intolérance, l'idéologie sirupeuse du compromis et l'accusation paralysante d'"islamophobie".

    (...) Salman Rushdie : L'islamophobie, c'est un mot qui a été inventé récemment pour protéger une communauté, comme si l'Islam était une race. Mais l'Islam n'est pas une race, c'est une religion, un choix. Et dans une société ouverte, nous devons pouvoir converser librement au sujet des idées.

    Lucette Valensi (à ce sujet) : Prenons l'exemple du blasphème contre le Prophète : il est
    passible de la peine de mort dans les pays musulmans, mais ça ne concerne normalement pas les autres pays. Or, ce que demandent, à l'occasion du film
    L'Innocence des musulmans, Rached Ghannouchi, du parti Ennahda, au pouvoir en Tunisie, ou les manifestants d'Europe, c'est qu'on applique une législation musulmane dans des pays qui ne le sont pas. C'est inouï dans la tradition juridique islamique! 

  • Syrah du South

    crozeshermitagebio2011cavedetainlhermitage_resized.jpgC'est un Crozes-Hermitage (rouge 2011) de la Cave de Tain (sise à Tain L'Hermitage, dans la Drôme et dont je ne me lasserai pas de dire du bien). Syrah à 100%. Cuvaison courte et mise rapide afin de préserver le fruit dans sa pureté : bon point. Robe profonde, sombre comme la nuit tombante. Nez de fruits des sous-bois et des haies dont on fait des confitures ce mois-ci, suivi d'arômes plus durs de cuir et de tabac à pipe blond légèrement poivré. Bouche ravissante de fraîcheur, belle structure, longueur plus que correcte. Finale doucement épicée. J'ai accompagné ce vin issu de raisins biologiques (10€ le flacon et ça les vaut bien) et qui s'inscrit sans forfanterie mais avec une réelle conviction dans la démarche de la Cave de Tain en faveur du Développement durable, avec -ne riez pas-, d'un côté une simple pizza margharita de belle facture, rehaussée d'huile pimentée et de l'autre l'âpreté des Croquis de la Nouvelle-Orléans brossés par William Faulkner (in Coucher de soleil, folio 2€). Et bien la syrah s'en est sortie la tête haute. téléchargement.jpegLes croquis  du Deep South circonscrivent en trois ou quatre phrases à peine un personnage saisi sur le vif aussi efficacement qu'un portrait exécuté par un peintre leste et sur lequel nous portons un coup d'oeil puis un regard appuyé. Tout est là, dit ou (dé)peint. Cela s'appelle le talent et Faulkner n'en manquait pas. Ses sujets d'écriture sont les humbles. Mendiants, cabossés de la vie, simples d'esprit, alcooliques, tous sont avides de reconnaissance et lancent des appels à l'autre comme on jette une bouteille à la mer. Ce crozes-hermitage n'a pas besoin de cela, car c'est lui qui envoie des signes où l'on reconnaît l'évidence de la syrah lorsqu'elle s'épanouit dans les côtes-du-rhône septentrionales, rive gauche bien sûr et qu'un travail à main d'homme a fait consciencieusement le reste; soit l'essentiel. A la manière de l'écrivain ou du peintre devant le motif. Et comme j'étais en appétit, j'ai enquillé en feuilletant les poèmes hiératiques d'Erri De Luca tout en picorant des baies de raisin noir (lire Solo andata, juste dessous). En lisant, en croquant, en prenant une gorgée par-ci, par-là, ce rouge d'une distinction franche m'a soufflé une idée : désormais, je me livrerai au jeu charmant des alliances vins-mets-livres. Parce que ça marche.  

  • Solo andata

    Quand nous serons deux nous serons veille et sommeil,

    nous plongerons dans la même pulpe

    comme la dent de lait et la deuxième après,

    nous serons deux comme sont les eaux, les douces et les salées,

    comme les cieux, du jour et de la nuit,

    deux comme sont les pieds, les yeux, les reins, 

    comme les temps de la pulsation

    les coups de la respiration.

    Quand nous serons deux nous n'aurons pas de moitié

    nous serons un deux que rien ne peut diviser.


    Erri De Luca, Aller simple (Gallimard).

  • Faites passer!

    images.jpegRaphaël Poulain, ex rugbyman pro du Stade Français surnommé un temps le Lomu frenchie, se confesse à fond dans Quand j'étais Superman (Robert Laffont) et c'est infiniment attendrissant. Le beau bébé de 100 kg de muscles, issu du terroir Picard (around Beauvais) aura connu (de manière par trop fulgurante) les ors, la gloire, l'argent facile, le champagne, les filles en veux-tu en voilà autant que des bagnoles décapotables et de la dope et tout ce que tu voudras. Résultat : une jolie dépression en cours de fausse-route, une décheption (déchoir, se décevoir peut-être, remettre les compteurs à Z surtout -et c'est ça qui compte aujourd'hui) : au présent et à l'avenir, Raph s'est engagé dans le métier dur, âpre, pas gagné de comédien comme on s'engouffre dans la Légion. Histoire d'oublier, de se refaire surtout -le gamin a la trentaine tout juste dépassée et un talent à revendre comme Matthias Schoenaerts dans Bullhead, un film puissant et retournant de Michael R. Roskam; vu hier soir (il me fait beaucoup penser à cet acteur belge si physique et au regard identique -le pendant, une sorte de jumeau même, d'un autre acteur-phare : Michael Fassbender. De rouille et d'os de Jacques Audiard, a révélé Schoenaerts au "grand" public). J'ajoute que Bullhead est un film dur mais infiniment humain, aussi violent que tendre, aussi coupant que touchant. Rapprochement : j'ai lu le bouquin de Poulain d'un trait et je me suis marré; j'ai eu les larmes aux yeux aussi. Je l'ai aussitôt passé à mon fils, vingt ans, qui ne pense qu'à ses potes, qu'à ses études d'architecte-paysagiste (en Belgique à présent) et au rugby. Je n'ai donc plus mon exemplaire annoté sous la main. Qu'importe! Je l'ai en tête. Car le bonhomme, même s'il se raconte avec un excusable narcissisme (être sous les feux de la rampe ébrèche) donne une belle leçon à tous les jeunes sportifs attirés par les sirènes d'Ulysse de la gloire éphémère, celle qui -à la fin, plus ou moins vite : c'est selon la cuisson-, a la peau de toutes les Marilyn du monde, à Paris itou. Son bouquin en devient une leçon. A faire passer aussi vite qu'un ballon ovale, mais après l'entraino et sur tous les stades de France et de Navarre (surtout de Navarre). Alors lisez cette confession d'une rare sincérité car c'est une adresse à l'Autre doublée d'un message de détresse et d'espoir confondus. Chapeau.

  • Portos et Minervois

    Image 2.pngMichel Portos ouvre (enfin) son restaurant à Marseille (où il est né) le 18 septembre prochain. Malthazar, 19, rue Fortia -plein centre! (une institution locale rachetée en juillet dernier). On brûle d'envie d'y foncer (ça ne tardera pas). Nous l'avons connu au Saint-James à Bouliac (Bordeaux), où il passait après Jean-Marie Amat. A l'époque, je dirigeais les rédactions de GaultMillau, la découverte de sa cuisine (A/R spécial dans la journée au moment de son ouverture) fut un choc. A chaque plat, la sensibilité du bonhomme explosait tranquillou en bouche. Nul doute qu'avec ses formules marseillaises décontractées -a bisto de nas-, à 22€ et à 31€, augmentées de l'accent méditerranéen  posé sur les versions tout brasserie et tout signature, il va vite oublier les pesanteurs amphigouriques bordelaises. Son bras droit au piano s'appelle Vincent Poette -ça promet! Et en plus il servira les huîtres de mon pote Joël Dupuch. Alors à vite, garçon!...

    En attendant, juste un mot sur un Minervois de haute tenue, château Millegrand Millegrand fut copyright bonfils.jpg(Vignobles Bonfils à Capestang, 34). Syrah pour moitié et le reste équitablement partagé (comme les coups de corne par Dieu à chaque tarde de toros) en carignan, grenache et mourvèdre. 18 ha plantés près du Canal du Midi. Vendangé à la main -on ne pose pas la question. Belle robe profonde, limite noiraude, nez puissant de fruits noirs, de sous-bois humide et de cuir sec. Bouche élégamment boisée comme la fin de trace (le soir venu) d'un parfum de Serge Lutens dont j'ai oublié le nom et que je retrouve dans le cou d'une. Cela possède -non : cela envoie de la classe comme une femme flamenca à la démarche unique sur le Paseo Cristobal Colon (Séville) par une après-midi d'avril vers cinq heures moins le quart. Et (au risque d'être vulgaire, mais en l'occurrence une touche de vulgarité a licence de frayer son chemin mûletier), cela vaut moins de 4€. ¡Olé!

  • Lectures fortes

    images (5).jpegLectures fortes, importantes, de l'été : Le village de l'Allemand, de Boualem Sansal (folio), courageux, passionnant, vertigineux, superbement écrit, captivant; envoûtant même. Ce "Journal des frères Schiller", issus d'une mère algérienne et d'un père allemand dont ils ignoraient qu'il fut nazi avant de refaire sa vie dans le bled algérien est si émouvant qu'il en devient dérangeant. Il est de ces romans qui, une fois leur lecture achevée, continuent de nous parler des jours durant. Et réflechissez : ce n'est pas si courant.

    Le nom de trop. Israël illégitime? de Jacques Tarnéro (Armand Colin), chef-d'oeuvre d'érudition et de réflexions sur Israël depuis les origines, sa images (6).jpegperception par une certaine gauche, le danger islamiste (admirablement décrit aussi par Sansal -tant en Algérie que dans nos "cités"), l'assimilation dangereuse entre Israël et le régime nazi et beaucoup d'autres sujets qui devraient faire davantage débat (les menaces réitérées de l'Iran d'effacer Israël de la carte du monde, par exemple) et qui, curieusement, n'émeuvent pas outre mesure les opinions française et internationale... M'est avis que ce livre fera date. 

    Les pissenlits, de Yasunari téléchargement (1).jpegKawabata (Albin Michel), roman inachevé et d'une grande poésie où percent l'ellipse, la cécité, la folie heureuse ou bien naïve, les beautés de la nature, l'approche sereine de la mort.

    Total Kheops, de Jean-Claude Izzo (folio policier), premier volume de la trilogie marseillaise de Fabio Montale : il était temps que je m'y images (8).jpegplonge! -Quel plaisir, nom d'un p'tit bonhomme... On circule dans ses pages (et dans un Marseille dont on tombe forcément amoureux) comme dans un grand Fred Vargas : L'homme à l'envers par exemple, relu avant l'été just for pleasure). Je suis d'ailleurs en immersion dans Chourmo, le second volet de la trilogie qui s'achève avec Solea, du regretté Izzo. 

    Le garçon qui voulait dormir, d'Aharon Appelfeld (Points), l'immense écrivain s'autodécrit à travers les traits du jeune Erwin, 17 ans, recueilli en Palestine (encore sous mandat images (7).jpegbritannique) après la guerre, et qui commence une seconde vie déjà, au moment de bâtir Israël. L'adolescent ne trouve l'apaisement que dans le sommeil. Il semble vouloir oublier, tandis qu'il cultive inconsciemment les souvenirs. En réalité, la fuite inexorable et prégnante dans le sommeil lui permet de retrouver ses parents morts dans les profondeurs de la nuit, lui qui doit aussi désapprendre sa langue maternelle pour apprendre l'hébreu. C'est puissant et tendre à la fois, prodigieusement onirique et tendu, et à la fois accroché au réel. Un livre aussi bouleversant que l'inoubliable Histoire d'une vie, du même Appelfeld (Points).

  • Fissa

    images.jpegPêle-mêle, j’ai moyennement aimé Viviane Elisabeth Fauville de Julia Deck (Minuit) un rien "je m’écoute écrire comme on écrit dans la maison Minuit depuis Beckett jusqu’à Echenoz" –mais bon l’histoire tient debout et elle est (comme il se doit) froide comme images (1).jpegun serpent d’acier. Le plus gênant est peut-être (pour en avoir discuté avec d'autres lecteurs) l'emploi de la deuxième personne : vous avez fait ceci et vous allez faire cela... Au lieu du je ou du elle classique. Mais aucunement le meurtre du psychanalyste à l'arme blanche ou le quotidien (banalement) ordonné d'une femme (banalement) larguée par son mari avec un bébé dans les bras.

    J’ai préféré Le sermon de la chute de Rome de Jérôme Ferrari (Actes Sud), à la belle écriture tendue et qui ne cède jamais, en dépit de nombreuses divagations bien contrôlées et parce que c’est une belle métaphore de la roue de la vie doublée d'une saga familiale et tout cela gravite autour d'un bar paumé en Corse, tenu par deux jeunes amis frais émoulus de leurs études de philo.

    Oui, vous savez, ce sont des livres qui n’ont rien à voir entre eux mais dont tout le monde parle, avec une poignée d’autres ("le" Olivier Adam : bof, "le" nouveau Harrison : à lire dans la foulée, "le" Angot : laisse béton, "le" Djian : mouais), dans le maquis de cette rentrée protéiforme, pauvre pour une fois en autofiction nombriliste (qui s'en plaindra?) et qui s’appuie volontiers (panne d'imaginaire?) sur des faits de société servis chauds par les écrans de notre quotidien comme ce n’était plus le cas depuis des images (2).jpeglustres.

    D’ailleurs, j’entame Rue des Voleurs, de Mathias Enard (Actes Sud) qui a choisi le Printemps arabe pour toile de fond -entre deux friandises (et en attendant octobre qui nous apportera le dernier Quignard que nous souhaitons moins déçevant que le précédent et un Modiano que l'on dit exceptionnel) :


    Sur l’oisiveté, de Montaigne, adapté en images (3).jpegfrançais moderne par André Lanly. Débat : images (2).jpegcette adaptation (très récente, des Essais dans la collection Quarto/Gallimard -et il s'agit avec Sur l'oisiveté d'un extrait) est-elle supérieure à celle, admirable, de Claude Pinganaud (pour Arléa)? Il nous faudra comparer les deux textes (à suivre, donc). Ce petit
    2€ - Montaigne, Sur l'oisiveté.jpgrecueil reprend les chapîtres sur l'oisiveté, le pédantisme, la cruauté, la fénéantise et la colère.

    Replonger au hasard dans les  Maximes de La Rochefoucauld est un plaisir gourmand comme celui de chiper des bonbons l'après-midi. Nul ne peut se lasser d'ouvrir un tel livre et d'y trouver à chaque fois une perle d'intelligence, un trait d'esprit d'une acuité redoutable sur la nature humaine.

    Autre mini-poche : Un voyage érotique (anthologie) : Antiquité, Renaissance italienne, libertinage, érotologie arabe, le sexe sacralisé dans la liitérature asiatique et quelques pépites modernes glanées chez Wilde et chez Lawrence. Jamais sulfureux, toujours littéraire. Ces trois minces mais denses sont disponibles en folio 2€ et j’adore cette petite collection !

    images (4).jpegIl y a également des petites choses intéressantes à parcourir : Marilyn Monroe à 20 ans (« les secrets de ses débuts », sous-titre l’éditeur Au Diable Vauvert) de Jannick Alimi, car il y est question d'avant Hollywood : l'orphelinat, la pauvreté, un passage en usine comme ouvrière, des débuts inavouables de call-girl, de pin-up, les poses pour un photographe comme modèle low-cost, le premier divorce (Jim Dougherty)...  Et c'est donc touchant.

    Je relis Une autre jeunesse, de Jean-René Huguenin que Points a la bonne idée de reprendre dans sa collection images (4).jpegimages (5).jpegchic intitulée Signatures (et dans sa collection tout aussi élégante intitulée Grands romans, un fort et beau livre peu connu il me semble, maritime, ample, humain, exotique, cru, âpre de Yasushi Inoué, Rêves de Russie). Huguenin ou la voix d'une génération perdue, trop tôt flambée, qui faisait écho aux Hussards. Huguenin ou la fougue romantique d'une prose élégante et audacieuse (souvenez-vous de La Côte sauvage, et de nombreux passages admirables de son Journal).

    Je musarde entre les pages du Dépaysement, images.jpegsomptueux recueil de voyages en France signé Jean-Christophe Bailly (Points), qui partagea le Prix Décembre avec l'ami Olivier Frébourg (lire ici le compte-rendu de Gaston et Gustave daté du 14 novembre 2011).

    Jimages (1).jpege m’apprête à découvrir Exils, pièce de théâtre de James Joyce (folio), parce qu'un chassé-croisé amoureux entre deux couples pour sujet excite immanquablement, qu'il s'agit de la seule pièce de Joyce qui ait été sauvée et que l'éditeur affirme que c'est le laboratoire de toute son oeuvre, avec pour outils la tromperie, la dispute, la franchise, la jalousie, la cruauté, le vertige...  

    Je relirai enfin (de longues années après) Paris est une fête detéléchargement.jpeg Papa Hemingway dans une jolie édition collector (folio) revue et augmentée notamment d’un catalogue de « vignettes inédites » (d'autres fins possibles, car l'auteur hésitait et souffrait comme un chien pour achever ses livres!). C'est le Paris des années 20, vu par Hemingway (donc la plupart du temps depuis les comptoirs de La Closerie des Lilas et d'innombrables bars). On y croise des personnages comme Gertrude Stein ou Ezra Pound mais c'est un Paris aussi dépaysant que le fameux Piéton de Léon-Paul Fargue.

    Comme toujours sur ce blog -on l'aura compris-, le format de poche est privilégié. Comme sont mis en avant les bons flacons pas trop chers et les curiosités gastronomiques :

    L'IBERIQUE_FOIE GRAS AU JAMBON SERRANO.jpegEN LISANT, EN DEGUSTANT

    A l'aide d'une bonne lame, entamez L'Ibérique, un foie gras de la Comtesse du Barry enroulé dans une tranche de jamon serrano et parfumé (un peu trop à mon goût) de vinaigre balsamique. C’est un mi-cuit de 200g (30€).

    Je l’ai fiancé, non pas à un champagne ou à un blanc tranquille (sec) mais à un, puis deux excellents petits vins (rouges) par leur prix mais grands par leurs goûts : COSTIERES CHAT. DE CAMPUGET copyright costières de nimes.jpgVAUGELAS PRESTIGE copyright bonfils.jpgchâteau Campuget tradition 2010, un Costières-de-Nîmes à 3,60€ qui ne s’en laisse pas compter : il est puissant et rond, vif et long, épicé (poivre) et soyeux. L’autre est château Vaugelas, Cuvée Prestige 2010, un Corbières magnifique, modeste et richissime (fruits rouges et noirs, vanille, poivre, soyeux lui aussi et même velouté) qui coûte 4,5€ ! Deux vraies affaires en ces temps de Foires aux vins où les gens font du yoyo avec leur calculette entre les rayons, jusqu'à en oublier l'usage du tire-bouchon... Lisez et buvez.