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Ciao Chien-Brun, Dalva... Ciao, Big Jim!

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Je reproduis ci-dessous les deux pages que je consacre à Jim Harrison (lequel a quitté ce monde hier), dans mon Dictionnaire chic du vin (Ecriture, sept. 2015, pp.177-178), à la lettre H. So long, Jim. Notre rencontre sur tes terres n'aura donc pas lieu... 

HARRISON, Jim

Capture d'écran 2016-03-27 19.35.30.pngAutant faire une note sur Gargantua, tant « Big Jim », son surnom, aime bouffer, picoler (du bon – toujours lucide, le garçon !), lâcher prise, vivre en somme, dans son jardin des délices partagées en amitié. Je le sais amateur de Cos d’Estournel, saint-estèphe de très haut vol, et de tant de flacons français, de Loire, de Bourgogne et de Bordeaux. Avec Gérard Oberlé, son double du Morvan, son « jumeau astral », dirait Pierre Veilletet, Oberlé l’écrivain rabelaisien et subtil, Big Jim aime à en découdre avec les flacons purs, droits, riches, profonds, capiteux, débordant d’énergie substantielle des Côtes-du-Rhône.

Un soir que je dînais chez Manuel Carcassonne (patron des éditions Stock, et de Grasset alors), avec Laure Gasparotto et Emmanuelle Jary, et que Pascal Quignard (l’un de mes écrivains français vivants favoris, avec Pierre Michon, Jean Échenoz, Pierre Bergounioux, Sylvie Germain et peu d’autres : Olivier Frébourg, Christian Authier, Stéphane Guibourgé...), devait être de la partie, ce fut Oberlé qui surgît, Gérard Oberlé de toute sa masse, de toute sa voix, de tout son crâne, de toute l’amplitude de sa verve et de tous ses gestes larges, nous parlâmes donc forcément de Big Jim. Je racontais que rendez-vous avait été pris, quelques années auparavant, avec lui afin de l’interviewer dans sa retraite du Montana, lorsque j’étais rédacteur en chef d’un magazine de chasse, et que je dus renoncer à ce voyage parce qu’un cancer méchant et dévastateur venait de se déclarer dans le corps de ma mère. Nous avons bu les flacons sélectionnés par la délicate Laure, ce soir-là. Et Emmanuelle, fine connaisseuse (elle débutait dans le métier de journaliste gastronomique et nous avions déjà asséché son meuble Eurocave, qui contenait de très grands crus), commentait les bouteilles tandis que Jim revenait sur la nappe de nos paroles. Manuel arbitrait, l’œil avisé – il connaissait l’animal borgne et auteur de Légendes d’automne, et il avait même déjà donné, je crois me souvenir, un vibrant entretien avec l’inoubliable auteur de Dalva au Magazine littéraire, mais il observait un demi silence de sage Sioux campé sur sa réserve. Comme quoi. Oberlé, lui, la voie si libre, en rajoutait, pantagruélique, ogre – oui ogre ! Et la soirée se plaçait naturellement sous le double signe des vins de France et de Jim Harrison, écrivain adulé par les Français. Je me jurais d’offrir un Cos d’Estournel à Jim H. lors de sa prochaine tournée « promotionnelle » en France. Las. Je ratai les suivantes. Aujourd’hui que son dos est vermoulu, et qu’il ne se sépare pas d’une canne pour aller jusqu’à un tire-bouchon, je me demande si je ne vais pas reprendre un billet d’avion pour le Montana et rouler un Cos d’Estournel dans les chemises. Vu que le vin est tiré et que ma mère est morte. L.M.

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Commentaires

  • Bel hommage... Levons donc nos verres et buvons à sa santé, en relisant sa prose. Il va terriblement me manquer, à moi aussi...

  • Je sais combien il va te manquer, à toi, Sylvain. Tchin-tchin, Jim!

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