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Le sommeil

Un bienfait principal du voyage en train est de nous permettre d'avaler des livres tandis que la micheline avale les kilomètres. Le TGV tend à devenir mon salon de lecture favori. Avant-hier, à la faveur d'un retard de deux heures entre Bordeaux et Paris, j'ai pu engouffrer la totale de Jean de La Ville de Mirmont, qui reparaît donc en semi-poche (Les Cahiers Rouges). J'ai déjà dit ici le bien que je pensais des poèmes de L’Horizon chimérique, de l’absurde troublant des Contes, de l’énigmatique roman Les Dimanches de Jean Dézert.

Puis, j’ai pris Je vivais seul, dans les bois, de Henry David Thoreau, en folio à 2€ (premier et long chapitre de son fameux Walden) : écolo, roots, authentique -nous sommes en 1845 ; « into the wild » , genre…

Enfin, j’ai lu Les grandes blondes, de jean Echenoz (minuit/double). Là, les étincelles stylistiques qui font sens et qui définissent à mes yeux une certaine littérature contemporaine, française, vraiment jouissive, que le catalogue des éditions de Minuit reflète bien depuis une vingtaine d’années, a repoussé les limites de ma fatigue et une légitime propension à m’endormir, bercé par les vibrations et le ronronnement du wagon.

Trois exemples : un court, un plus long et un autre en guise de sujet de réflexion :

« Donatienne (s’exprime) d’une voix rapide, acérée mais fragile comme une arête de craie."

« … il retire un quarante-cinq tours de sa pochette, il dépose Excessif sur la platine. Debout près de la fenêtre il aperçoit, sur le boulevard, une femme en cuir en train de s’extraire d’un véhicule diesel. La chanson passe, il écoute les paroles, il fait éclater entre ses doigts les petites bulles en plastique de l’enveloppe, l’une après l’autre, comme il traitait déjà, trente ans plus tôt, en famille en vacances, les petites bulles de varech sur les roches submergées de la presqu’île de Giens (Var). »


Enfin, il y a ce début de chapitre (le sixième) :
« On peut se représenter le sommeil sous plusieurs formes. Echarpe grise, écran de fumée, sonate. Vol plané d’un grand oiseau pâle, portail vert entrouvert. Plaines. Mais aussi nœud coulant, gaz asphyxiant, clarinette basse. Insecte rétracté sur sa vie brève, dernier avis avant saisie. Rempart. C’est une question de style, c’est selon la manière dont chacun dort ou pas, selon les rêves qui l’éborgnent ou l’épargnent . »

Et pour vous, le sommeil revêt quelle forme, a quelle image ? C’est la question du jour. A vous !

Commentaires

  • j'ai pâs trop aimé "Ravel" , peut être parce que j'aime trop Ravel
    celui la vaut le détour ?
    je suis en plein jazz ! clarinette basse ça swingue ! ça me bouscule , j'aime !

  • oui les grandes blondes, Cherokee, lac, ou un an valent largement un détour prolongé... le sommeil alors...

  • biz

  • Echenoz a ceci de génial qu'il a su intégrer l'austérité glaciale d'un Manchette ( z'étais très amis). A mon humble avis, vraiment ne vous méprenez surtout pas, je ne ose pas au spécialiste, juste un amateur je suis, Echenoz et cette mouvance de l'écurie Minuit (François bon, Yves Ravey, les toujours excellents Chevillard ( son blog l'autofictif est un régal, ici un style plus aphorique et foutraque, et Gailly, écrit comme du jazz, ) se situe à la croisée du nouveau roman et de ce néo-polar assez sec. Manchettien. Ce que l'on a appelé à tort ou à raison le roman fin de siècle. En tout cas une écriture en apparence un peu ( trop pour certains mais les goûts et les couleurs) désincarnée.

  • L'avant dernier com, tel laconqiue Biz est juste une effraction onirique ( je ne vous dirais pas à qui ou vers quoi cette biz était destinée...) dans le réel. A propos d'Echenoz, et des discussions sans fin à l'heure de savoir la place aujourd'hui du roman, de quelle matière est-il fait, et toutes ces questions autour de l'annonce de sa mort, supposée, fantasmée ou réelle, j'ai souvenir de ce numéro de feu "Qu'est-ce qu'elle dit Zazie?" grande émission littéraire où le cadre de la caméra ne saisissait jamais ( ailleurs certains mulets devraient en prendre de la graine) que les livres et leurs auteurs, le journaliste restant hors champs par dévotion à la littérature, et de ce long plan séquence qui nous montrait, think in progress, Echenoz, Michon, Bon et peut-être bien Bergougnioux mais au sujet de ce dernier, je suis moins sur ( mais comme il n'aurait pas dépareillé mon cerveau extrapole, interpoile), en train de deviser de toutes ces choses, et de ce moment ou Saint Michon, tout soudain se pascal quignardant les poignets à l'extrême souplesse, évoqua un passage du dernier François Bon articulé sur une chanson des Rolling Stones, puissant mes chers petits, et donc une association d'idées bienfaitrices réunie autour d'une même table par Jean- Baptiste Harang ( aimait bien ses papiers dans libé) qui, c'est le cas de le dire, leur servait la soupe...fumante...et le sommeil dans tout_ça...du travail en retard et tantôt, promis, zoom sur le grand sommeil...Quand c'est donc que la bébête (t'sais celui qui monte et finit bien par renaître de redescendre) meurt toujours un peu moins idiote, grâce à quoi le guerrier de l'arrière reste en paix...Sac à puce épuisé "like a sac a poopoo" aux dires de certaine blond next door à l'accent duraille de Durham...t'sais près du mur d'Hadrien..

  • en attendant et comme vous m'avez l'air sage comme tout, telle petite citation de Pétrarque ( René Char devait aimer Pétrarque. Et là c'est à vous Kally et à lam, ( et à tous les autres of course) que je pose la question) extraite de Canzonière "le ventre et le sommeil, avec les plumes sèches de la mollesse, ont du monde banni toute vertu; de là vient que notre nature, vaincue par l'habitude, est comme égarée de son cours..."

    quelle forme le sommeil...voyons, "la vengeance de la pelouse" de Richard Brautigan posé en équilibre sur les fesses au goût de sucre de pastèque ( kézako c't pataquès Benoit...rien Maman...je suis avec des amis là et pis je suis grand, laisse moi dormir M'man) d'Amour de ma vie...oui voilà

  • le sommeil m'étreint, m'enveloppe de sa douceur,lentement, très lentement, tels les bras d'un homme, m'invitant au lacher prise qui me conduira ineluctablement vers cette soyeuse pente -parsemée de couleurs, d'odeurs, de senteurs, d'émotions- qu'est le rêve.

  • quelle image le sommeil...mettons...deux peaux délassées, et par dessus le duvet d'un ventre suint et douceur d'une main placée en dévotion...chérie tu rentres tôt ce soir...ta mère se propose de garder les petits...

  • Exactement!

  • je cherchais une citation lu hier dans la journée " type façon d'éveillés , façons d'endormis" ( ça y est j'en ai mis une !) mais je ne la retrouve pas et travaillant dans une bibliothèque , j'ai du soucis a me faire pour la retrouver ! à moins que je l'ai croisé dans la mienne qui est quand même plus petite ,
    pétrarque ! oui , à relire !

    ...to sleep , perchance to dream ! ay there's the rub , cause in that sleep of death what dreams may come , when we have shuffled of this mortal coil must give us pause ....hamlet de mémoire dans une mise en scène de peter Brook of course !

  • "le sommeil m'étreint, m'enveloppe de sa douceur,lentement, très lentement, tels les bras d'un homme, m'invitant au lacher prise qui me conduira ineluctablement vers cette soyeuse pente -parsemée de couleurs, d'odeurs, de senteurs, d'émotions- qu'est le rêve" (merci Ange!) -> sincèrement ça donne envie de s'y laisser bercer, envelopper, emporter jusqu'aux rêves !

  • Merci Saharienne de ce commentaire...Alors chuuut, fermez les yeux, sentez-vous le sommeil vous étreindre?

  • difficilement car encore au travail : ;-)

  • Angelique pratiquant l'hypnose sur une vraie-fausse hantée au Sahara...la sueur me perle au front...ai toujours eu l'émotivité hémophile...hep les filles et si le sommeil était un mensonge...l'endormi se ment..

  • la sueur perle à mon front...je pense donc je sue...

  • Sourire...le sommeil, un menteur? Non...un séducteur tout au plus.

  • Le charme lové tel une lovelace entre les plis de l'assoupissement...Seducir serait s'adoucir...

  • très joli! "seducir serait s'adoucir" (se durcir serait s'appesantir)

    J'aime l'image de succomber aux charmes du sommeil

  • "Se durcir serait s'appesantir" poussé à bout reviendrait à ourdir quelque lourdeur

  • Cette nuit, le sommeil m'a enveloppé de son drap de soie blanc aux parfums discrets de fleurs blanches, et vous?

  • de mon côté, le gauche toujours, on se refait pas, jamais, m'occupèrent continument, obscures idées personna nonna grata un poil trop à gratter, tout un tas d'atermoiements d'aoûtats...

  • Oh...bououh...alors mettons des bulles dans le sommeil...(Je me permets une parenthèse)

    Pour le délice de vos amis (soirée réussie, sommeil garanti!), j'ai préparé quelques mises en bouche qui ont fait l'unanimité:

    sur une feuille d'endive (de petite taille de préférence), posez délicatement une noisette de figues émiettées, une noisette de fourme d'ambert, une noisette de moutarde au cassis et croquez! (dans cet ordre impérativement pour que le mélange des saveurs soit subtil)

    et en apéritif, préparez une soupe de champagne (personnellement, je remplace le cointreau par du vin de framboise)

    Ainsi, soirée remplie de douceurs, saveurs, rires et bonne humeur, à consommer de toute urgence Benoît!

  • "Son sommeil était, de beaucoup, ce qu'elle avait de plus profond".
    Sacha Guitry

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