Gardel l'Etranger
Mon ami Louis Gardel (Fort Saganne etc) m'envoie son dernier roman, La baie d'Alger (Seuil). Ses accents camusiens y sont torrides, fréquents, justes. C'est du très bon Gardel. P.167, il emmène une fille à la plage, un Arabe passe devant eux exactement comme dans la scène du célèbre roman de Camus. Le garçon le désigne et dit à la fille : "C'est comme dans L'Etranger!". Mais l'effet tombe à plat car elle n'a pas lu le livre. C'est avec ce genre de déconvenues que l'on se retrouve seul, les pieds douloureux sur le sable brûlant. Je veux dire seul avec soi-même en dépit de la présence de l'autre et que (personnellement) je rêverais de sauter sur un étalon noir à la crinière vaporeuse et de fuir, oui tant pis : fuir!, au triple galop le long de la plage jusqu'à disparaître, baigné dans l'océan de mes cris. Plutôt que de rester faire la causette et dragouiller une fille à la peau de toute façon trop pâle...
Commentaires
Le gars attend, il est déçu. L'a-t-il vu cette fille qui avancait, tranquille, à ses côtés vers une plage quelconque, qui regardait le même Arabe et se faisait une toute autre reflexion ?
Elle voit dans cet homme bleu le drâme de l'humanité. L'homme seul; le froid dans son coeur, dans son coprs. Il ne sourit pas, il n'y a pas de quoi sourire. Sa faim n'est pas comblable, c'est le poids de son histoire, de sa culture. Alors il travaille, il s'occupe, marche, ici et maintenant. Qu'est ce qui le nourrit, quel est son choix ?
Tandis que le gars voulait causer littérature, la fille pleurait dans son âme. S'ils avaient essayé de ne pas parler justement, pas de blabla, pas de séduction! Juste gouter le paysage, l'arabe et ressentir chacun. Puis partager, sans attente.
Aude
La Vache! C'est complètement juste et d'une vérité doublée d'une sensibilité (bref, d'une intelligence) étincelantes, ce commentaire! Bravo et merci.
Il est vrai que j'ai un peu de mal avec la "culture" (blog à part) : je ne pourrais par exemple jamais faire l'amour avec une analphabète au prétexte qu'elle a le plus beau cul de la planète. Mais c'est une autre histoire...
C'est l'évidence. Les filles à chaîr laiteuse se rétractent sous le soleil en languissant leur voie lactée. On en connait qui se firent bien couillonner au rendez-vous de leur reflet de lune. Mettons que leur nez fut un peu trop camus.
Wouaff! Tu "blondinises" comme disait Nimier, en calembourrant tes phrases. J'adore!