Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • au rayon copinage

    mansouriathenescouvwebdef.jpgSaber Mansouri : Remettre l’Athénien et l’autre – esclave, affranchi, étranger, métèque, femme – au travail et au cœur du jeu politique de la démocratie athénienne classique est sans doute une idée scandaleuse aux yeux de Platon, et des historiens modernes fascinés par la voix philosophique atemporelle du Maître, celui qui rédigea La République, Les Lois et Le Banquet. Et pourquoi ?

    Longtemps considérés comme des sujets exclusivement non politiques (histoire économique, histoire du travail, représentations figurées), les artisans et les commerçants apparaissent dans cet ouvrage comme des sujets et des acteurs politiques. Athènes n’est certes pas une république d’artisans. Elle n’est pas non plus une république de commerçants, mais cette nuance ne doit pas négliger le fait que ces catégories sont concernées, voire impliquées dans la vie politique athénienne du IVe siècle. La notion d’homo politicus, chère à Max Weber, apparaît fragile pour qualifier le citoyen athénien.

    Tel est, en substance, le propos du livre de mon ami Saber Mansouri : La démocratie athénienne, une affaire d’oisifs ? Travail et participation politique  au IV ème siècle av. J.C., (André Versaille). Disciple de Pierre Vidal-Naquet, hélléniste, arabisant, Saber enseigne à l’Ecole pratique des hautes études. Le mois prochain, Actes Sud publiera également de lui L’Islam confisqué. À suivre.

    9782758802099.pngUn autre ami, Benoît Jeantet, publie Ne donnez pas à manger aux animaux au risque de modifier leur équilibre alimentaire (Atlantica). L’écriture de Jeantet crépite comme du feu de pin mêlé à du chêne. On dirait du Nougaro en ligne. Ca swingue à chaque page, car l’auteur jongle avec les mots. Ce saltimbanque de l’alphabet est un musicien et le stylo est son instrument. Sa phrase chante, rime et fait sens, et sous couvert de calembours à pleines fourches, Benoît nous dit cependant et surtout des choses fortes, des choses essentielles, intimes et indéfectibles. Le personnage du père, par exemple, de retour de la guerre d’Algérie, est flaulknérien, si je puis me permettre. (Et nous avons envie de goûter à son gâteau, lorsqu’il le sort du four…). Les descriptions sans concession pour la terre sans ânes de son enfance sont tendres comme le blé en herbe, et celles des personnages attachants comme le bûcheron Jocondo  Cantoni, dit Fernando tréss caféss, ou Arezki, sont touchantes et sèches comme un démarrage de Motobécane dans la brume du matin paysan. En plus, Jeantet a son style propre : ses phrases sont  les plus courtes du monde. Et même privées de verbe, elles contribuent à ce feu crépitant qui fait sa signature, en nous servant un coup à boire. Tchin, té!

  • Freud, Rimbaud, In treatment, Le Roi Lear, etc

    Une nouvelle photo de Rimbaud à trente ans, prise à Aden, vient d'être découverte. So what? En plus, elle n'est pas terrible, c'est un portrait de groupe (ci-dessous : le détail agrandi), et Arthur n'a pas l'allure du poète voyant que l'on préfère relire, mais plutôt les traits d'un Proust sortant de chez le coiffeur... L'image, toujours l'image...139860.jpg

    Onfray déboulonne la statue Freud dans son nouvel ouvrage, Le crépuscule d'une idole, l'affabulation freudienne (Grasset). 600 pages pour tuer le père de la psychanalyse. Freud n'aurait fait que projeter sa propre névrose en l'érigant en dogme et en tentant de l'imposer au monde. A la manière de saint Paul, qui aurait pu faire de sa secte une religion planétaire, à la faveur des facilités accordées pour faire prospérer ladite secte par l'empereur Constantin, qui s'enticha des thèses saint-pauliennes, pures projections, donc, de la propre névrose de leur auteur... On sent là le procédé d'Onfray. Et du coup, à la lecture seule de ses premiers détracteurs (Sylvain Courage dans L'Obs, Elisabeth Roudinesco dans Le Monde des Livres, sur Mediapart et ailleurs aussi, car la papesse du freudisme se déchaîne et semble vouloir la peau d'Onfray), je n'ai guère envie de me plonger imméditatement dans l'épais volume qui trône à côté de mon Mac -tandis que je me défends constamment de me laisser empêcher par d'autres jugements que le mien propre (mais je le ferai, bien vite quand même). Le préjugé, toujours le préjugé...

    Au sujet de la psychanalyse, connaissez-vous la série In treatment? On en devient vite accro. L'empathie opère, tant avec l'analyste (interprété par Gabriel Byrne) qu'avec ses patients, que l'on suit semaine après semaine, puisque nous participons de l'impossible voyeurisme par la magie de l'idée de cette série, soit aux séances!..

    Face à ces questions, car la série américaine, version d'une série originelle israélienne, Betipul, réalisée par Hagai Levi, passe en revue le catalogue de tous les poncifs de la psychanalyse, en particulier le sentiment de culpabilité et la mort symbolique du père, sans oublier les sujets  périphériques inévitables comme le coup de foudre de la patiente pour son analyste, mais justement cela permet de se remettre à jour et même de faire un point avec soi-même, je pense au Roi Lear, de Shakespeare. Et notamment à Cordélia, celle des trois filles du vieux roi qui résiste à l'aliénation de son désir dans celui du père, celle qui se tait, ne demande rien, tandis que ses deux soeurs deviennent de pitoyables et néanmoins talentueuses hypocrites lorsque le père annonce sa décision de partager son royaume en trois parts égales. Cordélia est dans l'être, jamais dans le paraître. Elle aimera son père devenu fou, quand ses soeurs l'auront trahi et humilié. Là, ce n'est pas My Kingdom for a horse! (Richard III) que nous entendons, mais : quelques mots d'amour, s'il vous plaît, en échange d'une part de mon royaume, afin d'assurer ma descendance. Lear achète son don, maintient sa descendance sous sa coupe en l'aliénant. Cordélia part, sans héritage, silencieuse et pure, enrichie d'un manque. Mais reste fidèle au père. Et son désintérêt matériel mâtiné d'un amour originel font sa grandeur.