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Cuisine de crise


La difficulté est créatrice. Et la crise n’est jamais triste, si l’on réfléchit un peu lorsqu’on est perplexe au marché ou devant son frigo.

La cuisine est toujours gaie, qui associe avec talent les produits simples à l’inventivité et à l’audace. La crise n’oblige en rien à manger mal. Avec quelques idées pour sublimer les restes, un trognon de chou-fleur a soudain de la gueule et des kilos de nourriture sont sauvés de la poubelle ! Les plats pauvres ont une histoire propre : les « migas » (miettes, en Espagnol), sont un plat composé à l’origine de miettes de pain ramassées aux tables des restaurants par des mendiants qui inventèrent ce mets « à la fortune de la poêle », en y ajoutant de l’ail, de l’huile d’olive et, au gré, chorizo, œuf, raisin frais ou secs. La pizza de base figure la Baie de Naples, la lave (tomate) du Vésuve, et l’écume de la mer (mozzarella). Les « pasta e fagioli » sont un plat italien humble, à base de pâtes diverses de fins de paquets, mélangées à des haricots blancs pour oublier la viande. Les « Moros y Cristianos » cubains (Maures et Chrétiens), à base de haricots noirs et de riz blanc, constituent le plat qui symbolise le métissage, une certaine « créolité » qui tient au corps. Avec la « soupe de pierres » marseillaise –des galets mis à bouillir : l’eau prend le goût de la mer et donne l’illusion du poisson-, nous touchons à la poésie. Tous ces plats réputés pauvres apaisent la faim avec talent et beauté. L’évolution du goût propulse ou rétrograde à l’envi : pêcher une femelle d’esturgeon pleine d’œufs était une plaie pour le pêcheur, il y a environ quarante ans en Gironde. Les canards de basse-cour n’en voulaient plus et les gamins se sentaient punis lorsqu’on leur en donnait à pleines cuillerées. Même chose pour les pibales. Personne ne voulait, il y a quarante ans, au fond de l’estuaire de l’Adour, de ces alevins d’anguilles valant aujourd’hui 1200€ le kilo. Sauf un fabricant de colle, installé dans les Landes, qui en débarrassait les pêcheurs. La cuisine humble a de beaux jours devant elle. Je sais qu’avec trois œufs et des chips broyées à la main et posées dessus, ma fille étudiante offre une omelette croustillante. Et qu’avec une boîte de sardines, un tube de harissa et une fourchette, elle écrase tout, tartine du pain et ravit ses copines. Pour la chef Véronique Melloul, réfléchir à un tel sujet est une occasion de cuisiner innovant et utile. Corrézienne élevée par sa grand-mère Louise, Véronique a travaillé chez les plus grands, comme Ferran Adria, et a bourlingué, notamment outre-mer, avant de se poser chez elle, au Bistro Poulbot, à Paris. La nuit, elle invente des recettes qui font entrer la campagne dans la modernité... ©L.M. (la suite en kiosque, dans VSD paru ce matin, p. 70 et s.)

Commentaires

  • Desproges a donné un jour la recette des spaghettis à la sardine et au coulis de tomate
    ce sont des spaghettis avec dessardines à l'huile et du jus de tomate
    on peut lire en même temps
    http://annaorlova.blog.lemonde.fr/leo-nemo-leternite-roman-version-facebook-page-3617-a-page-3634-2/

  • Faudra que j'essaie le coup des chips sur l'omelette !

  • Alors, conseil, aliscan : tu frottes les chips (des chips à l'huile d'olive : important! Difficiles à trouver, mais débrouilles-toi) entre les mains au-dessus de l'omelette presque cuite mais pas encore retournée, puis tu la recouvres et tu sers vite fissa pronto dans la foulée illico presto oui oui, sinon (c'est chimique, t'y peux rien) la chaleur va ôter le croustillant des chips et tu n'auras aucun effet, sauf celui, pâteux, du tout raté.
    L'idée, je l'ai piquée à Ferran Adria qui évoquait à la télé cette Madeleine de son enfance (sa mère Catalane faisait ainsi), et j'ai publié cette recette (autrement dite), dans un livre paru en octobre 2005 aux éditions fitway (que je dirigeais alors), sous le titre "Les recettes de maman pour étudiants et autres célibataires". Bon app'.

  • Merci !

  • Leo! Je me souviens aussi de la recette (du même très regretté Desproges) du cheval vapeur : il fallait faire bouillir le cheval, puis ôter les quatre fers, refaire bouillir, etc. Je n'ai jamais testé (j'aime trop le cheval et de toute façon, je ne possède pas de chaudron suffisamment grand pour contenir un canasson).

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