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vins : le chenin

  • Le chenin dans "Le Monde"

    Dans M, le mensuel offert avec Le Monde, qui paraît aujourd'hui à Paris et demain en province, paraît ma chronique vins, anglée cépages, consacrée au chenin...


    LE CHENIN BLANC, AU FIL DE LA LOIRE

    Les vins du Nouveau monde sont en majorité de monocépage et ceux d’assemblage sont l’apanage de l’Europe. Mais la tendance mondialiste est aux premiers. De nombreux vignerons Français, Espagnols, Italiens se sont mis à produire des vins issus à 100% d’un seul cépage. Le consommateur ne s’en plaint pas, qui trouve là une simplification à ses choix et une meilleure lisibilité gustative : goûter un monocépage, puis d’autres, permet de mieux identifier les raisins, donc les vins entre eux et de mieux « comprendre » les vins d’assemblage et leurs pourcentages complexes de cépages. Le connaisseur et l’alchimiste de la vigne voient dans cette approche monolithique d’un produit magique, une uniformisation du goût et la disparition progressive du travail minutieux du vigneron, qui élabore des vins comme un tableau à partir d’une palette variée. Mais à y regarder de près, nous découvrons que de nombreux vins français sont des vins de monocépage par nature, et pas des moindres. Parmi les meilleurs du monde, La Romanée Conti est un pinot noir et Petrus, un merlot à 95% !

    En Loire, région viticole de premier plan, la plupart des vins sont ainsi issus d'un cépage unique : melon de Bourgogne (autre nom du muscadet) en Pays Nantais, chenin, cabernet et gamay en Anjou, Saumur et Touraine. C’est aussi le cas du sauvignon (blanc) et du pinot noir (rouge), rois en Touraine et dans le Centre, même si l’éventail est riche de cépages marginaux comme les grolleau, pinot meunier, pineau d’Aunis (ou chenin noir), gamay de Chaudeney en rouges, et saint-Pierre, romorantin, arbois, auvergnat gris, folle blanche (ou gros plant), tressalier et malvoisie (plus connue sous le nom de pinot gris) –pour les blancs.

    Prenons l’exemple du chenin blanc, appelé aussi pineau de la Loire, cépage principal en Anjou-Saumur et en Touraine car, sec, il escorte à merveille une volaille rare et raffinée comme la Géline de Touraine.

    Originaire du Val de Loire, le chenin, apparu au IXème siècle à l’Abbaye de Glanfeuil et s’appelait plant d'Anjou. Rabelais popularisa son nom actuel à partir du XVIème siècle*. Cépage tardif, il excelle sur les terroirs ligériens, s'adapte à merveille aux différents microclimats et permet l’élaboration de vins blancs secs racés. Ses capacités sont larges : à la fin de vendanges, lorsque le champignon appelé « pourriture noble » en Sauternes, botrytis cinerea, attaque les baies ou qu’intervient naturellement un passerillage, soit un dessèchement des raisins sous l’effet du soleil et du vent, le chenin –qui produit par ailleurs des pétillants, donne naissance aux grands vins mœlleux et liquoreux du Val de Loire : les vouvray (« vin de taffetas », selon Rabelais), bonnezeaux, quarts-de-chaume, coteaux-de-l’aubance, coteaux-du-layon, montlouis…

    Le chenin, pourtant attaché aux sols calcaires (le tuffeau de Touraine), voyage bien et donne des vins avec des bonheurs forcément inégaux, selon les terroirs où il a été implanté. Il se développe moins bien en Argentine qu’en Australie et en Nouvelle-Zélande, vieillit mal en Californie, prospère dans la province du Cap, en Afrique du Sud, où le steen (son nom vernaculaire), sert à tout, y compris à élaborer xérès, portos et cognacs locaux.

    Pourvu d’une bonne acidité qui masque son sucre résiduel, le chenin, plus floral que fruité, assure une fraîcheur salutaire en bouche et possède des arômes de miel, de coing, de fleurs blanches, d’acacia, d’herbe coupée et de paille. Les vins des appellations savennières et la célèbre Coulée de Serrant sont issus exclusivement de chenin blanc. Ces vins d’exception prouvent à eux seuls les grandes qualités d’un cépage singulier qui continue de donner le meilleur de lui-même sur sa terre natale.  ©L.M.

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    *Le cépage se développa à partir de 1445 chez l’abbé de Cormery, à Mont-Chenin, d’où son nom.

    Voici un choix de jeunes vignerons avisés, audacieux, qui jouent la carte de l’agriculture raisonnée en biodynamie avec succès :

    Anjou

    Coteaux du Loir et Jasnières

    Eric Nicolas joue l’expression totale du chenin sur son Domaine de Bellivière (www.belliviere.com), en proposant à la fois des secs racés : Effraie (Coteaux du Loir) et Calligramme (Jasnières), un blanc tendre original : Les Rosiers (Jasnières), un demi-sec, Vieilles Vignes Eparses (Coteaux du Loir), un moelleux puissant : Haut-Rasné (Coteaux du Loir),  et un liquoreux d’exception : Elixir de Tuf (Jasnières).

    Saumur blanc

    Thierry Germain, du Domaine des Roches Neuves (www.rochesneuves.com), célèbre pour ses Saumur-Champigny rouges (Domaine, Terres chaudes, La Marginale), propose un excellent Saumur blanc, Insolite, issu de chenins de plus de 85 ans.

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    Touraine

    Montlouis

    Valérie Mordelet et Jean-Daniel Kloeckle, au Domaine Les Loges de la Folie (www.les-loges-de-la-folie.com) semblent s’amuser en produisant de grands montlouis secs, minéraux et frais : La Nef des Fous, des liquoreux : Sucre d’Ange, des « fines bulles » : Perles Rares. Et aussi Le Chemin des Loges, sec, demi-sec ou moelleux selon les millésimes, ainsi qu’un intéressant vin de table, Jalousie. Un seul rouge : Velvet, dans une région qui n’en produit guère.

    Coteaux du Layon

    Christine et Joël Ménard, au Domaine des Sablonnettes (http://lessablonnettes.free.fr), outre leurs rouges (Les Copains d’abord, et Les Copines aussi), produisent de précieux liquoreux d’un bon rapport qualité/prix, issus de vieilles vignes : Fleur Erable, Noblesse, Les Erables, Le Champ du Cygne, Bohême, Le Vilain Petit Canard.


    © L.M.