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Philosophie - Page 2

  • pensées pour la plage

    C'est le propre d'une âme vile et sans énergie de ne s'avancer qu'en terrain sûr : la vertu veut escalader des sommets.
    Sénèque, La Providence.

    Tu me demandes ce que je cherche dans la vertu? Elle-même.
    Sénèque, La Vie heureuse.

    Le vaniteux fait dépendre son propre bonheur de l'activité d'autrui; le voluptueux de ses propres sensations, et l'homme intelligent de ses actions.
    Marc-Aurèle, Pensées pour moi-même.

    S'ils n'ont pas de part à nos succès, nos amis nous lâcherons quand nous serons dans le malheur.
    Esope, Fables.

    Il est vil et faux de dire : moi, je préfère être franc avec toi. Point n'est utile de l'annoncer; cela apparaîtra de soi-même; cela doit être écrit sur ton front; ta voix doit y faire aussitôt écho; cela se lira dans tes yeux, comme la personne aimée comprend tout dans le regard de ses amants. Bref, il faut que l'homme simple et bon soit comme celui qui pue le bouc, c'est-à-dire qu'en s'approchant de lui on le sente, qu'on le veuille ou non. La pratique de la sincérité est un coutelas. Rien de plus honteux qu'une amitié de loup. Evite cela par-dessus tout. L'homme bon, simple et beinveillant, a ces qualités dans les yeux, elles ne peuvent échapper.
    Marc-Aurèle, Pensées pour moi-même.

    Aristote se trouva un jour en butte aux interruptions continuelles d'un discoureur qui lui débitait des histoires sans queue ni tête, tout en lui répétant sans cesse : "Epatant, non, mon cher Aristote? -Pas du tout, répondit celui-ci; non, ce qui m'épate, c'est qu'on puisse rester à t'écouter quand on a des jambes."

    Plutarque, Le Bavardage.

  • Le gai savoir

    182. "Dans la solitude. Quand on vit seul, on ne parle pas trop haut, on n'écrit pas non plus trop haut : on craint l'écho, le vide de l'écho, la critique de la nymphe Echo. La solitude modifie toutes les voix". Nietzsche.

    Et la voix, c'est ce que nous avons de moins charnel; c'est presque l'âme.

    Ecrire l'âme. Décrire la voix, le moins que charnel; l'écho, la nymphe. La lymphe, l'éther de la voix, l'êtor, la femme de soie, cette brume matinale qui disparaît, timide, aux premières blessures du jour. Le sang noir, la nuit, l'aube à la fin. Qui résoud et recoud les âmes entre elles. Non?..

  • Tesson

    Rencontré ce matin Sylvain Tesson chez mon nouvel éditeur (le même que lui : Les Equateurs). L’auteur du « Petit traité sur l’immensité du monde » (évoqué sur ce blog, comme deux autres de ses précieux livres), est un petit homme sec et tout en muscles, le cheveu ras, l’humour à fleur de lèvres. De ces hommes rares qui écoutent l’autre, s’intéressent, font montre d’une gentillesse naturelle. Aucun calcul semble n’avoir jamais traversé sa vie. Homme des grands espaces, solitaire amoureux fou de  nature sauvage, marcheur impénitent (comme Montaigne et Olivier Germain-Thomas, il pense par les pieds, puis laisse infuser), celui que je persiste à comparer à Bruce Chatwin, Paul Théroux, Nicolas Bouvier et quelques autres travel-writers, n’est pas comme Nicolas Vanier, faux Jack London (que je voyais de temps à autre, avant qu’il ne devienne la star des traîneaux sponsorisés que l’on sait). Humble, vrai, Sylvain Tesson repart toujours (il m'a d'ailleurs semblé étrange de faire sa connaissance à Paris) –dans quelques jours passer son examen de saut en parachute, puis en Bretagne. Après ? –Quelque part dans le vaste monde, loin de la civilisation qui nous bouffe tout cru. Une rencontre.

  • Passage du désir

    Ce pourrait être l'une des définitions de l'existence, l'un de ses axiomes, son antienne la plus rejouée. Arioste (dans Orlando furioso, le Roland furieux) et bien d'autres, disent ceci (là, c'est Lucrèce, dans La Nature des choses, cité par Montaigne dans le chapitre LIII, intitulé D'un mot de César, du Livre I de ses indépassables Essais) :

    "Tant qu'il nous fuit, l'objet de notre désir

    Nous paraît plus désirable que tout le reste.

    S'offre-t-il à notre prise, notre désir se porte ailleurs

    Et la même soif nous tient en suspens, bouche ouverte." 

    Et c'est la réflexion du jour...

  • Oblatif, oblada, life goes on...

    Doit-on opposer le fameux Carpe diem d'Horace (et sa suite chrétienne : e memento mori) : cueille le jour et souviens-toi que tu es mortel, à la pensée de Spinoza : L'homme libre ne pense pas à la mort, sa sagesse n'est pas méditation de la mort, mais méditation de la vie. Qu'il faille constamment chercher l'ataraxie, la paix de l'âme, en considérant  que cette quête est recevable uniquement dans la vie, me semble certain (à condition de ne pas croire en un au-delà). Et qu'il faille avoir le souci (socratique) des autres, jusqu'au presqu'oubli de soi, aussi. Sénèque : Vis pour autrui, si tu veux vivre pour toi. L'Evangile -que je ne fréquente guère- dit pourtant, en substance, que la bonté suppose le désintéressement total. Elle doit être en quelque sorte spontanée et irréfléchie, sans le moindre calcul, sans la moindre complaisance en soi-même. Pure théorie, c'est vrai... Selon le philosophe Pierre Hadot, seul Marc-Aurèle a atteint ce sommet. Relisons Marc-Aurèle...

  • Montaigne par Onfray


    Une main amie m'a fait un cadeau gigantesque, hier : le coffret de 13 CD de Michel Onfray sur Montaigne. C'est son cours de philosophie donné à l'Université populaire de Caen en 2004. J'en avais entendu quelques extraits, subjugants, sur France Culture. J'en avais rêvé, ... l'a fait.

    Pour les écouter tranquillou, je sens que je vais monter dans Pépètte (ma wouature) et rouler -au hasard- jusqu'à Séville... Avec une halte-hommage(s) à Bordeaux...

    Si vous connaissez déjà ces CD, n'hésitez pas à partager ici vos impressions. 

    Je le répète, le but premier et principal de ce blog est de "faire passer". Aussi tout est bon : une recette, un cadeau, un cd, une lecture, une rencontre, une lumière, un lever de lune, un coucher de brune, un cours de philo sur Montaigne itou, donc. Allez, Zou! Et si vous ignoriez ces cours de "Contre-histoire de la philosophie" (concentrés également en volumes qui paraissent régulièrement chez Grasset -ce blog s'est fait l'écho des premiers : fouillez), cela ne fait rien! Parlons de Montaigne, d'Onfray, de n'importe quel passage des Essais... Re-Zou (allez)!

     

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  • le petit naze sous le Portique

    Les philosophes se réunissaient à Athènes au lieu dit  le "Portail peint" (Stoa Poikilè, d'où leur surnom de stoïciens, "philosophes du Portique").

    Photo : "le petit philosophe du sud-ouest sous le Portique -ou ce qu'il en reste, pense à Socrate et ignore que Cécile le photographie" ©C.L. 181464407.JPG

    Merci au "Monde de la Philosophie" de nous offrir cette semaine Sénèque (La Vie heureuse, La Brièveté de la vie, Lettres 1 à 29 à Lucilius) le Manuel d'Epictète et les Pensées pour moi-même de Marc-Aurèle. Jubilatoires lectures! 

  • Partir à deux

    André Gorz, avant de se suicider avec sa femme, comme le firent Zweig, Novalis... écrivit ceci :

    "Nous aimerions chacun ne pas survivre à la mort de l'autre. Nous nous sommes dit que si, par impossible, nous avions une seconde vie, nous voudrions la passer ensemble."

    Outch. 

  • Spinoza, toujours...

    Mais l'esprit n'est-il seulement qu'idée, n'est-il pas aussi volonté, libre puissance d'affirmer ou de nier les idées? Ceux qui ne savent rien expliquer par les causes nécessaires se réfugient dans la volonté de Dieu, cet asile de l'ignorance. (Roland Caillois, à propos de L'Ethique, de Spinoza, maître-livre absolu, de cet "athée du système" comme le surnomma Bayle).

  • Droit dans les âmes



    podcast
    Comme il est pervers et déloyal de dire : "J'ai préféré me comporter franchement avec toi." Que fais-tu, homme? Il ne faut pas dire cela d'avance. La chose apparaîtra d'elle-même. Ces mots doivent immédiatement être écrits sur ton front; ils se révèlent immédiatement dans tes yeux, comme l'aimé reconnaît immédiatement, dans le regard de ses amants, tout ce qu'ils éprouvent. Il faut absolument que l'homme sincère et bon soit comme celui qui sent le bouc, pour que, volontairement ou non, le passant s'en aperçoive dès qu'il s'approche.  Mais l'affectation de simplicité est comme une épée "cachée"; rien n'est plus honteux que l'amitié des loups : avant tout, évite-là. L'homme bon, simple et bienveillant porte ces qualités dans son regard, et elles n'échapent à personne.

    Marc-Aurèle
     
    Caetano Veloso, Cuccuruccu paloma

  • L'amour selon Conche

    Marcel Conche, philosophe, prof à la Sorbonne, spécialiste de Montaigne, Héraclite, Heidegger, Epicure… avait oublié un cahier, rédigé il y a 37 ans. Un cahier de pensées éparses, de fragments ayant l’amour pour thème. Il l’a retrouvé. Et un éditeur nantais singulier, les éditions Cécile Defaut. Sans accent sur le « e » (mais comment Cécile pourrait-elle en avoir ?!..) a accepté de le publier. Cela vient de paraître sous le titre stendhalien : « De l’amour ». Sous-titre : « Pensées trouvées dans un vieux cahier de dessin ». Et c’est délicieux. Extraits :

    Aimer et être aimé, c’est ne plus mourir seul : quelqu’un d’autre meurt avec vous, c’est-à-dire ne fait plus que vous survivre. Ou bien vous, à sa mort, devenez comme mort.
     
    ... Il est aussi un amour qui est pur besoin de l'autre, besoin d'être avec lui dans une sorte de proximité absolue et silencieuse. On peut l'éprouver pour une femme. Quand on est près d'elle, on a besoin de la toucher, de lui parler, de faire quelque chose. Mais rien de ce que l'on peut faire ne nous satisfait entièrement : c'est que notre amour n'est rien de plus qu'un besoin de proximité absolue. On voudrait n'être séparé d'elle que juste ce qu'il faut pour sentir que l'on n'est pas séparés. On voudrait qu'elle et nous restions comme immobiles à la pointe d'une extase de réciproque appartenance.
     
    Aimer : donner, se donner –jusqu’à ne rien garder : ce que l’on avait de plus précieux nous quitte. On se dépouille de tout, comme par la mort.
    La mort nous prive de tout ; par l’amour, on se prive de tout.

    La joie d’amour : joie de penser à ELLE, joie plus grande de la voir, de la revoir, plus grande encore d’être avec elle.

    Aimer un être, c’est le vouloir fidèle à lui-même, à la vérité qu’il porte en lui. « Sois celui que tu es » : ainsi parle le véritable amour.

    L'amour rend même l’aimant aimable : il élève, ennoblit, transfigure. Ainsi pour celle qu’on en vient à aimer parce qu’on aime l’amour qui est en elle.

    Quand je t’aime, je ne peux plus dire que je te regarde : nous ne sommes pas deux ; à travers mon regard, je suis avec toi et non en face ou devant.

    ... L’amour, en l’absence de l’objet aimé qui, par sa présence, le fait vivre, le nourrit, le remplit, fait souffrir parce qu’il se défait. La sombre et farouche peine de l’amoureux privé de la vue de l’aimé exprime l’infinie tristesse de la vie à qui est refusé l’accomplissement et qui meurt en se déchirant.

    La femme n’aime pas que les choses soient dites. Celles qu’elle veut, elle n’aime pas dire qu’elle les veut ; mais elle veut bien qu’on les veuille pour elle.

    « L’amour se mesure à ce qu’on accepte de lui sacrifier. » (Geoffrey, dans le film Pandora).


  • Le fortifiant de la mort

    En relisant Cécile Guérard, Petite philosophie pour temps variables, (La Table ronde)

    La mort nous renforce. Elle transforme peu à peu notre peine en sérénité. Celle ou celui qui part et que nous aimons (nous ne pouvons écrire au passé) nous laisse un héritage fait de sa sagesse. Pétri de ce qu’elle, ou il, fut de meilleur(e). Passée la douleur qui frappe fort, la vie fait place à la douceur en éloignant l’ombre persistante, si on la laisse faire, de l’opportuniste Faucheuse. Car il s’agit d’un virage sur la piste de l’existence. Une course contre la Fucking horloge du monde. Aucun olympisme là-dedans. Juste une course. L’expérience de la mort… Epicure, que je relisais cet après-midi pour penser philosophiquement à  tout çà, nous chuchote qu’on peut se mettre en sûreté contre toutes sortes de choses, mais en ce qui concerne la mort, nous habitons tous, tant que nous sommes, une cité sans défense. « Mourir est cependant le seul verbe impossible à conjuguer à la première personne de l’indicatif présent », précise judicieusement Cécile Guérard. « La mort est intransitive »… Si je puis soulager quiconque vit cette expérience pour la première fois, et à distance, avec l’aide d’Epicure, je dirai que la mort n’est rien. C’est son attente qui est douleur. « Ce serait donc une crainte vaine et sans objet que celle qui serait produite par l’attente d’une chose qui ne cause aucun trouble par sa présence ». La mort est privation de la sensibilité. Cependant, bizarrement, c’est notre sensibilité qui se trouve soudain accrue. "La mort est l’indicible qui nous laisse muet ; un temps". Cette Etrangère suprême que nous portons pourtant en nous depuis la matrice, depuis le ventre de notre mère, frappe sans frapper avant d’entrer, ai-je envie de dire. « La mort d’un être aimé et proche nous désigne. Elle nous montre personnellement du doigt », nous dit Cécile Guérard. La mort d’un proche nous déchire, car elle emporte une partie de nous. J’ai relu, cet après-midi, à travers cette Petite philosophie pour temps variables, de vieux potes de bon conseil en de telles circonstances. Penser c’est apprendre à mourir nous dit Platon (et Montaigne après lui). La philosophie est méditation de la vie, souffle Spinoza. Au fond, avance timidement Jankélévitch, ils ont peut-être raison tous les deux, conclut joliment Cécile Guérard.